L'incendie.

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« Mais Guillaume, je dis ça parce que je m'inquiète pour toi !

— Mais arrête un peu de t'occuper de mon cul ! »

Ça faisait dix minutes que les deux hommes s'engueulaient, debout à quelques mètres l'un de l'autre, dans leur petit appartement. Ou plutôt, Guillaume s'énervait et criait sur Aurélien qui essayait de lui faire comprendre son point de vue et de le calmer.

« Guillaume... soupira celui-ci. Je comprends pas pourquoi tu t'énerves. Ce que je te dis c'est pourtant du bon sens, non ? Si t'aimes pas ta meuf... largue-là.

— Mais qu'est-ce que t'en as a foutre d'elle soudainement? s'écria le plus grand en levant les yeux au ciel.

— Je sais pas, j'essaie de me mettre à sa place. Enfin, de la comprendre.

— Ah non, ne t'avise surtout pas à faire ça. T'es pas ma meuf.

— Ouais ben heureusement, dit le plus jeune, en faisant une grimace. Vu comment tu la traites.

— Tu sais quoi ? Va te faire foutre, Orel, cracha Guillaume. Je gère mes relations comme je le décide et j'ai pas besoin de savoir ton avis dessus. »

Le plus grand se retourna et sortit de l'appartement d'un pas décidé. Il était dangereusement énervé et il valait mieux pour eux deux qu'il aille se calmer dehors. Il avait vu le visage dépité d'Aurélien, les larmes aux yeux, et ça l'énervait encore plus. Il n'avait aucun droit de se placer en victime dans cette situation, c'était lui qui avait commencé cette dispute en cherchant la merde en mettant son nez dans ce qu'il ne le regardait pas. Oui, il allait aux putes et oui, il flirtait avec toutes les filles qu'il rencontrait, malgré le fait qu'il ait une copine, et alors ? Ça faisait près de quinze ans qu'il menait ce style de vie chaotique et égoïste et jamais ça n'avait dérangé Aurélien auparavant. Alors pourquoi maintenant il se mettait à jouer les vierges effarouchés ? Il envoya valser un caillou en tapant dedans et mit ses mains dans les poches de sa veste, pour contrer le froid de la nuit.

***

Guillaume était à présent en train de regarder son reflet dans l'eau du canal, se demandant comment il avait pu autant rater sa vie. À quel moment il avait choisi le mauvais chemin. Bien sûr qu'il savait qu'Aurélien avait raison, et c'est pour ça qu'il s'était autant énervé contre lui. Il avait toujours raison et son opinion comptait beaucoup pour lui. Mais à ce moment-là, il avait eu l'impression qu'il lui faisait la morale, comme s'il était encore un enfant et il s'était senti humilié. Aurélien avait toujours été le plus attentionné et le plus mature d'eux deux dans le domaine des relations amoureuses, contrairement à ce qu'on pouvait penser de lui. Il venait de se séparer de sa copine il y a peu, après 3 ans, et Guillaume se demanda brièvement si Aurélien ne se sentait pas un peu coupable par rapport à elle. Ce qui expliquerait son discours de plus tôt. Sur le fait de la larguer pour ne pas lui faire du mal. Le plus jeune ne lui avait pas dit pourquoi il avait largué sa copine et il n'avait pas cherché plus que ça à le savoir. Il soupira. Vivement qu'il se trouve une autre meuf et qu'il lui lâche la grappe par rapport à la sienne. Il ne l'avait pas vu depuis plusieurs semaines et n'essayait pas plus que ça de prendre de ses nouvelles, mais c'est comme ça qu'il agissait avec toutes ses copines. Elles étaient prévenues.

Soudain, son téléphone portable se mit à vibrer dans la poche de son pantalon et il sursauta, interrompu dans ses pensées. Il attrapa son téléphone avec peine en se contorsionnant, ayant la flemme de se lever. En voyant le nom d'Orel apparaître sur l'écran, il hésita. Pourquoi l'appelait-il alors qu'ils étaient fâchés ? Est-ce qu'il devait répondre ou faire la sourde oreille ? Il décida de décrocher tout en lui montrant bien au ton de sa voix qu'il lui en voulait toujours.

« Qu'est-ce que tu veux !? »

Il y eut un silence au bout du fil et il l'entendit respirer fortement.

« Orel ? demanda-t-il, confus.

— Gringe... toussa Aurélien à l'autre bout du fil. Je... Je ne sais pas ce qui se passe, mais il y a de la fumée partout autour de moi...

— Comment ça ? s'exclama-t-il en se relevant précipitamment en l'entendant dire cela.

— J'ai mal à la gorge et j'ai les yeux qui me piquent... dit le plus jeune en toussant. Je... Je crois qu'il y a le feu.

— Orel, sors de là ! J'arrive tout de suite.

— Je peux pas... Je ne sais même pas où je suis, je vois rien avec cette fumée et... »

Il entendit Aurélien pousser un petit cri avant de tousser violemment à l'autre bout du combiné.

« Orel !? Qu'est-ce qui se passe !?

— Je peux pas sortir, le feu bloque l'entrée... Les flammes ont fait s'effondrer une partie du mur... Je... Guillaume, je suis désolé pour tout à l'heure.

— Pourquoi tu parles de ça maintenant, Orel !? Je suis dans la rue, là ! Je viens te chercher.

— C'est trop tard Gringe, l'entendit-il se mettre soudain à pleurer. J'arrive plus à respirer...

— Orel, ne dis pas ça ! Je t'interdis ! Je te promets de te sortir de là en vie !

— Je suis désolé, Guillaume... » entendit-il le plus jeune murmurer et il entendit un bruit alors un bruit mat à l'autre bout du fil, comme si le téléphone avait percuté le sol.

Il lâcha un juron et se précipita vers les escaliers qui menaient à leur petit appartement. Il entendit des sirènes au loin et se dit, avec soulagement, que les pompiers avaient été prévenus et étaient en chemin. La porte de l'appartement refusait de s'ouvrir, sûrement bloquée de l'intérieur par le mur dont parlait Aurélien plus tôt et Guillaume s'élança à plusieurs reprises sur celle-ci afin de la forcer. Au bout de trois essais, il avait déjà l'épaule en sang, et il faillit abandonner pour chercher un autre moyen de rentrer lorsque celle-ci céda enfin. Il entra précipitamment à l'intérieur, se couvrant le visage de son bras pour ne pas inhaler la fumée toxique. Ses yeux le piquèrent presque instantanément au contact de cette dernière et à travers celle-ci il aperçut des flammes. Il s'élança alors à travers l'appartement à la recherche d'Aurélien, paniqué. Il ne pourrait pas tenir bien longtemps ici. Mais il avait fait une promesse. Celle de venir le chercher. Il sentit l'angoisse monter en lui quand il ne le trouva pas dans le salon avant de se diriger vers sa chambre où il le trouva enfin, allongé par terre, sur le dos, les yeux fermés et une main sur son coeur. L'autre était étendue au sol, près de son téléphone portable et il comprit qu'il avait lâché ce dernier suant il s'était évanouit. Il s'agenouilla près de son ami et empoigna ses épaules pour le secouer. Aurélien ne bougea pas et il comprit qu'il devrait alors le porter jusqu'au dehors. Il plaça un de ses bras sous son dos et l'autre sous ses cuisses et le serra contre lui. Il avait beaucoup de mal à reconnaître son chemin à présent, les larmes emplissant ses yeux déjà bien attaqués par la fumée. Il pensa brièvement à quel point Aurélien était léger et se rappela sa promesse de le sortir de là. Cette pensée l'encouragea à tenir le temps qu'il lui fallut pour trouver la sortie. Une fois au dehors, il dévala les escaliers et courut le plus loin que ses forces le lui permirent avant de s'écrouler au sol, à genoux. Il tenta de reprendre sa respiration douloureusement et passa une main dans les cheveux d'Aurélien, immobile dans ses bras, pour voir son visage. Il entendit les sirènes des pompiers et des ambulances se faire de plus en plus proches et il murmura, avant de s'évanouir au sol:

« Je l'ai fait. On est sains et saufs. »

Mini Fiction OrelxGringe - Incendie.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant