Briefing

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Tristan nous regarde tous les uns après les autres, s'assurant de notre attention. Même les autres clients du bar parlent plus bas entre eux : à force de voir des cadavres pendus à chaque carrefour avec une araignée tatouée sur le front, les habitants du quartier ont appris à respecter Tristan. Il se racle de nouveau la gorge et commence le briefing :

- Bon, maintenant que vous êtes attentifs, commençons les explications. J'aurais besoin de vous pour aller récupérer une mallette et un ordinateur dans le QG de la Congrégation, qui comme vous le savez est un bunker enterré dans un endroit tenu secret. Ce qui nous facilite la tâche, c'est qu'on a réussi à capturer un des fidèles de cette secte. Après un petit interrogatoire, il a fini par nous révéler l'emplacement du...

- Excusez moi, j'ai une question ? Pourquoi vous voulez qu'on les attaque ? Et est ce que ça valait vraiment le coup de torturer ce type ? On aurait pu les infiltrer, ça aurait donné le même résultat !

Tristan lance à Noah un regard rempli de mépris.

- Noah, infiltrer ce genre d'organisation prend du temps. Beaucoup trop de temps. Et là, comme je vais l'expliquer à Yeren ensuite, nous ne pouvons pas nous permettre ce genre de méthodes lentes et peu efficaces. De plus, si la torture te dérange autant, tu n'est pas à ta place ici...N'essaie pas de te faire passer pour plus innocent que tu ne l'es. Dois je te rappeler que toi aussi, tu as pris part à de nombreux "interrogatoires" ?

Noah baisse les yeux, vaincu. Mais Reyke reprend déjà la parole :

- Et pourquoi tu expliquerais  l'urgence de la situation seulement à Yeren ? En plus, tu ne nous as toujours pas dit pourquoi on devait s'attaquer à eux ! On va risquer notre vie une fois de plus, tout ça pour sauver vos miches, j'estime qu'on a le droit d'être informés !

Tristan croise les bras et se renverse sur son siège, puis fixe Reyke droit dans les yeux :

- Tout d'abord, sache que le fait d'être ma soeur ne t'autorise pas à t'adresser à moi d'une manière si familière. De plus, les raisons et l'urgence de cette opération ne doivent être expliquées qu'à votre chef : ce sont des informations d'une importance capitale, et au moins si il y a des fuites nous saurons d'où elles viennent.

En disant cela il m'adresse un sourire sarcastique qui me donne des frissons. Ce type me terrifie...Si il y a la moindre fuite, il n'hésitera pas à me liquider. Une fois de plus, je regrette d'avoir rejoint les Esposito...À l'avenir, il faut que je réfléchisse plus avant de faire des choix. Une résolution que j'aurais dû prendre bien plus tôt...

- Yeren, tu m'écoutes ?

- Ah, euh...désolé, j'étais perdu dans mes pensées...

- Voilà le genre d'erreur qui pourrait te coûter beaucoup, Yeren. Si tu es mal renseigné sur le terrain, cela amènera forcément à un échec de l'opération. Et l'échec d'une opération de cette importance...Tu sais ce que ça signifie, n'est ce pas ?

- Mais de toute manière les autres écoutaient, alors bon...Ils pourront toujours me renseigner le moment venu...

- Un chef doit toujours avoir une longueur d'avance sur ses subordonnés, tu devrais le savoir ! Voilà pourquoi je déteste les gamins dans ton genre, ça a 250 de QI mais c'est incapable de faire ses lacets tout seul ! Alors maintenant tu écoutes et tu la fermes !

Incapable de soutenir son regard, je fixe le plancher couvert de crasse. Il reprend, d'une voix plus posée :

- Alors, où est ce que j'en étais ? Ah oui, les armes. Normalement vous ne devriez pas en avoir besoin, puisqu'on vous demande plus d'être discrets que de tirer partout. Néanmoins en cas d'imprévu il vaudrait mieux que vous soyez équipés,  c'est pourquoi vous irez récupérer le matériel dans un endroit que je vous indiquerai à la dernière minute, juste avant le début de l'opération. Une fois là bas, je vous laisse carte blanche : Yeren élaborera un plan d'action, moi je me fiche de ce que vous faites tant que vous me ramenez l'ordinateur, la mallette, et que vous n'êtes pas repérés avant d'être sortis. Sur ce je vous laisse, il faut que je donne quelques détails à Yeren en privé.

Je me lève et le suis à l'extérieur du bar. Les conversations s'arrêtent à notre passage et certains clients inclinent légèrement la tête en signe de respect : tout cela me met un peu mal à l'aise...Nous finissons par nous arrêter dehors. Il prend la parole :

- Bon, on passe aux infos confidentielles. Ne t'avise pas d'aller répéter ça aux membres de l'équipe : je sais que tu t'entends bien avec eux, mais ce genre de choses ne doit pas interférer avec les consignes que je te donne. C'est clair ?

Je hoche la tête.

- Bon, en bref, l'ordinateur que vous devez récupérer contient des informations très compromettantes sur le grand patron du cartel. Tu sais évidemment que nous et la Congrégation sommes les deux maîtres des quartiers pauvres, et que nous avons une influence égale : nous fournissons aux gens d'ici de la drogue, des armes et des filles, et la Congrégation leur fournit de l'espoir. Tu sais, tous ces prêcheurs aux coins des rues, qui parlent de la fin du monde, du paradis, et du jour où le peuple se révoltera et renversera notre gouvernement corrompu ? Eh bien, c'est eux.
Le problème, c'est qu'ils sont contre nous. Ils désapprouvent nos méthodes, trouvent nos trafics "immoraux"...enfin tu vois, toutes ces conneries en rapport avec la morale...Et du coup, ils veulent nous faire tomber. Donc ils ont réussi à mettre la main sur des dossiers très, très sensibles concernant le patron...Ne me demande pas lesquels, c'est secret. Dis toi simplement que tous ses amis du gouvernement le lâcheraient sans hésiter si ils voyaient ça. Et là la police irait se mêler de nos affaires, enfin tu vois. Ça pourrait même être la fin du cartel...

- Je vois. Et pour la mallette ?

- La mallette, c'est tout simplement l'argent qu'on leur avait proposé pour qu'ils nous remettent l'ordinateur. Sauf que non seulement ils nous l'ont pas remis, mais en plus ils ont tué notre émissaire...Et ils ont gardé notre fric.

- Combien ?

- 12 500 000 silvs. C'est une goutte d'eau par rapport au budget du cartel, mais ces gens sont nos ennemis...Et on leur laissera pas un seul silv. (Nb : 1 silv = 0,004 € donc 12 500 000 silvs = 500 000 €. De rien :))

- Très bien, je comprends. Et c'est donc la raison de l'urgence de la situation, n'est ce pas ?

- Exactement. Chaque seconde perdue est une occasion pour eux de diffuser nos infos, ou de dépenser notre fric. On vous fournira une voiture et l'itinéraire du bunker à la dernière minute, juste après que vous ayez récupéré les armes. C'est bon ?

- Oui, c'est bon.

- OK, je te laisse retourner à l'intérieur. Moi j'ai des affaires qui m'attendent, comme d'habitude...Je dois y aller.

Je me demande quelles affaires attendent Tristan, aujourd'hui. Où est ce qu'il va ? Est ce qu'il va liquider un subordonné qui parle trop ? Ou peut être qu'il va briefer une autre équipe d'élite, pour une autre opération ?  Peut être même qu'il a rendez vous avec le grand patron...ou peut être qu'il va aller torturer un autre pauvre type, qui sait. L'expérience m'a appris à ne pas poser trop de questions...Mais il y a tout de même quelque chose que je veux savoir.

- Tristan, attends !

Il se retourne.

- Quoi encore ?

- Est ce que mon frère va bien ?

Il me fait un sourire narquois.

- Astan ? Il va bien. Tu sais qu'il t'as presque oublié ?

Je baisse les yeux. Évidemment, il pense que je suis mort...Mais tout de même, je pensais qu'il se préoccupait un peu plus de son petit frère...Je tourne le dos à Tristan, pour ne pas qu'il me voie pleurer.

Note de l'auteur

Wow, ça fait longtemps ! Désolé pour cette longue absence, j'étais très occupé ces derniers temps...Enfin bref, la suite demain !

Azzuman

Le tombeau des mensonges Où les histoires vivent. Découvrez maintenant