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Un jour comme un autre, cette routine pourrait être pesante mais pourtant je me sens revivre. Je suis heureux. Cela fait une semaine que je ne fais absolument rien, que les soirées ne sont plus d'actualité et que je passe mes journées avec Manon. Je ne lui ai plus reparlé de ce qui s'était passé durant la nuit, lorsqu'elle m'a dit qu'elle ne ressentait rien pour moi. À vrai dire, même si c'était compliqué de rester au quotidien avec une personne que j'aimais autant, qui me mettait dans une situation d'impuissance telle, je passais de bons moments. J'étais fou amoureux c'était sûr, mais ce n'était pas réciproque. C'etait dur pour moi de me faire à cette idée, celle qui ne se passerait rien, que nous sommes que des amis. Elle se comporte comme tel avec moi et même si ça fait mal, j'aime être avec elle.

Pour la situation d'Alix, elle voit son Jack uniquement pour des parties de jambes en l'air, elle ne veut pas s'attacher à quelqu'un qu'elle quittera dans deux semaines. Elle a bien raison, elle faisait preuve d'une lucidité impressionnante face à cela.

Deux semaines, j'avais encore du mal à m'y faire. Deux putain de semaines et mes moments passés avec Manon ne seront que des souvenirs, je rentrerai à l'université, je ferais ma vie et elle fera la sienne. Je ressentais un grand pincement au cœur en y pensant. Elle allait affreusement me manquer. On s'était promis de faire les champignons ensemble avant de partir. Avec Lewis, Camille et Alix. Jack n'était pas dans ce délire là, non Jack était un rare fumeur mais un gros buveur.

Elise était sage, avait assagi celle qu'elle aimait. Elles s'aimaient tellement, elles ne passaient pas une journée l'une sans l'autre. Mais Camille m'avait prévenu, elles retournaient en France dans trois jours. Elise avait beaucoup pleuré, Ava aussi je crois. Les deux étaient inséparables, folles amoureuses. Ça me faisait mal de les voir comme ça, que leurs trois derniers jours ne soient bercés que par leurs pleurs incessant. Camille n'était pas triste, elle commençait à trouver ce séjour bien trop long et leur famille n'était pas très accueillante, surtout quand la black était rentrée chez eux complètement déchirée par l'alcool à 1h du matin pour je cite "chercher un pull car j'ai froid". Disons qu'après ça, leur relation familiale devenait bien plus chaotique. Elise relevait le niveau, l'amour la rendait affreusement niaise, elle flottait sur un nuage de paix, d'amour et d'harmonie avec le reste du monde, ne voyait que le positif. Les deux amoureuses se dévoraient du regard constamment, je suis sûr qu'elles pourraient rester trois heures, les yeux dans les yeux.

Cette relation brisée dans trois jours, les pauvres. Camille avait peur de devoir la ramasser si elle tombait trop bas, si elle se mettait à noyer son chagrin dans des choses non conventionnelles. Les deux allaient me manquer, même si je m'étais éloigné, j'avais passé de bons moments, surtout avec Camille qui m'avait délaissé pour ce Lewis. Je ne lui en voulais pas.
J'étais dans mes pensées lorsque j'entends Manon crier du bout de la maison.

– P'tit Josh ! Il n'y a plus de pâtes, s'teu plaît va en chercher !

Je soupire et attrape mon porte-monnaie. Je lui montre mon majeur et marche dans la rue sous la chaleur d'août. J'ai affreusement la flemme. Je me reperdais encore dans mes pensés envahissantes et désordonnées lorsqu'un cri me tire de celles-ci.

– Oh frenchie !! Frenchie !

Je me retourne, un garçon d'environ mon âge aux cheveux très blonds et aux yeux très bleus se dirigeait vers moi en accélérant le pas. Je n'avais aucune idée de qui il était et de pourquoi il m'interpellait.

– Désolé on était à la même soirée et je cherche le numéro d'une meuf que j'ai pécho et je sais que c'est ta pote, Manon c'est ça?

Mon cœur rate un battement "que j'ai pécho". Je contracte la mâchoire, elle m'a menti. Je l'aime, elle m'a brisé le cœur, elle m'a trahis.

Je serre mon poing de plus en plus fort.

– Euh alors... Je peux avoir son numéro? C'est qu'elle est bonne la petite, rie-t-il.

Je fronce les sourcils et une colère vient m'envahir, surpasser ma nature pacifiste. Je brandis mon poing que je viens violemment cogné contre la joue du blondinet. Je lui donne un coup de pied dans le ventre, il recule et tombe à terre tandis que je le chevauche pour continuer de lui assener des coups sur son visage déjà abimé. Il tente de se défendre, mais je l'ai enchainé par surprise, je l'ai assez affaibli pour qu'il soit impuissant. Comme moi avec Manon. Une larme coule le long de ma joue tandis que je ne fais que frapper ce gars, encore et encore. À chaque coup, le souvenir de mes levres sur les siennes, de mon corps éléctrisé par le contact du sien, de ses mains posé sur ma nuque lorsqu'elle m'embrassait. Tout ça n'était que du vent, je ne suis rien pour elle, un vulgaire passage. Et lui... Il l'a touché, l'a sûrement fougueusement embrassé, à toucher ses parties intimes, les a pénétrer, lui a donner du plaisir. Le lendemain elle m'a dit qu'elle avait dormi seule, j'avais confiance. Je pensais naïvement que peut-être elle fuyait l'amour qu'elle ressentait pour moi mais ce n'était que foutaises. Elle l'avait fait avec un autre.

Je lui inflige un dernier coup et laisse son corps gisé à terre, tandis que mes larmes ne font que couler, je cours à l'opposé de ce corps souffrant et ensanglanté. Je m'assois au coin de la rue, contre le mur et entoure mon visage de mes mains. Il faut que je me ressaisisse. Une amie, juste une amie. Je ne suis rien pour elle, un ami. Juste un putain de compagnon de vacances. Je passe une main dans mes cheveux et vais acheter les pâtes, comme prévu dans les plans. Je prends une autre route pour ne pas croiser celui qui a couché avec elle. Je sers encore les poings à cette pensée. Mes poings abîmés par les coups que je lui avais asséné.

Arrivé chez moi, elle me regarde, toute sourire et attrape le paquet de pâtes.

– Merci esclave, me tire-t-elle la langue.

Elle ne pouvait pas dire mieux maintenant. Dans chaque plaisanterie, il y a une part de vérité, surtout dans celle-là.

En attrapant le paquet, elle reste interloqué par mes phalanges très légèrement ensanglantées.

– C'est quoi..  Ça?

Je réfléchis. Communiquer règle tous les problèmes. Je devrais lui en parler, on discuterait, elle me dirait qu'elle ne se souvient pas avoir couché avec lui, qu'elle m'aime depuis le début ou qu'elle regrette. Ou alors elle me dira que je ne suis qu'un fou, car nous ne sommes que des amis et que je n'ai aucun compte à lui rendre, elle aurait raison. Je me renferme dans mon mutisme et répond "rien" avant de monter jusqu'à ma chambre. Mon père n'est pas là, comme à son habitude, il passe tout son temps chez sa dulcinée ou au travail, je le vois parfois le soir mais pour moi, il n'est plus que mon hôte. Alix est en train de baiser. Je suis seul, je me sens seul.

Moi:
Ouais donc elle l'a baisé

Elena:
Qui donc de quoi!?

Moi:
Manon a baisé avec un bg à la soirée apres m'avoir foutu un majestueux râteau.

Elena:
Ah bon!? Ecoute j'en parle plus avec elle, de toute façon elle se barre dans 2 semaines t'allais pas te mettre en couple 😅 donc bon oublie

Oublier. Ce que je fais. Tout le temps. Mais à un moment, tout ressort et ça fait mal. J'aimerais noyer mon chagrin dans un joint mais je n'ai absolument rien.

Je pleure une dernière fois avant qu'elle hurle à travers toute la maison que nous mangeons.

À table, un silence pesant s'installe, seul le bruit des couverts berce notre repas, elle voit mon mal-être mais ne dis rien car elle sait que je ne lui expliquerais pas. Elle a raison.

Les deux semaines qu'il reste avant leur départ sont deux semaines de trop.

AloneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant