Chapitre deux

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Amir se leva brusquement, faisant chavirer sa chaise qui alla heurter violemment le sol. Les deux autres agents sursautèrent quand, se penchant sur le bureau, il attrapa par le col de l'uniforme de leur coéquipier, l'inspecteur Mark Hopkins.
Il remarqua à peine celui qui se leva pour ramasser la chaise ainsi que sa veste qui était posée sur le dossier de cette dernière.

—Je n'ai sûrement pas été assez clair, siffla-t-il d'une voix menaçante. Je veux que vous retrouviez cet homme, et ça, dans les soixante-douze heures qui viennent.

—Monsieur, calmez-vous, réussit à prononcer l'homme au crâne chauve. En ce moment, l'enquête est close pour des raisons qui me sont inconnues et je ne peux rien faire pour changer ce fait. La victime est encore en vie, il y a eu plus de peur que...

—Qui a annulé l'enquête ? Demanda Amir en le coupant.

L'homme se tut, fuyant son regard et suant à grosses gouttes. Il tenta de jeter un regard implorant vers ses coéquipiers mais Amir resserra sa prise. Rapprochant son visage de celui de l'inspecteur Hopkins, il fronça les sourcils en le fixant plus durement. Ses poings le démangeaient tellement qu'il s'étonnait de voir qu'il n'avait pas encore cassé la mâchoire de chacun de ces trois imbéciles qui étaient en face de lui. Trois policiers, pensa-t-il ironiquement. Trois lâches dans tous les sens du terme.
Il pensa à la raison de sa présence dans ce commissariat.

Tayla.

Il faisait ça pour Tayla.
A chaque fois qu'il pensait à la jeune femme allongée sur le lit, il avait envie d'étrangler ces trois hommes qui osaient prétendre travailler pour que la nation américaine soit tranquille. Ils s'amusaient alors qu'un bandit était libre sur leur territoire, semant la terreur. Alors que Tayla souffrait.
Combien de personnes cet homme avait attaqué depuis la nuit où il avait blessé mortellement Tayla ? Elle aurait pu mourir.

Il se rappela ce moment où il lui avait dit qu'il fallait l'épouser. Son regard s'était voilé de tristesse, ses yeux s'étaient embués de larmes. Mais elle était restée forte, avait essuyé d'un revers de la main les larmes qui ruisselaient sur ses joues et avait prononcé en haussant vaguement les épaules :<<C'est toi qui vois >>; et cela, avec une froideur à la limite de l'acceptable. Cela l'avait intrigué de la voir passer si rapidement d'un état de désespoir à l'indifférence totale. Mais maintenant il savait pourquoi. Tayla était avocate. Et elle aimait ses enfants.
Elle n'avait accepté qu'à cause des enfants, sans penser à elle.
Il avait besoin d'une femme qui aimerait leurs enfants, mais il n'avait pas pensé qu'il l'aurait dans ces circonstances.

Tayla avait donné la priorité au bonheur des enfants sur le sien, et tout ça à cause de lui.
Voilà pourquoi il avait envie de se donner un direct.
Voilà pourquoi il avait envie de la laisser vivre en paix avec ses enfants.
Mais il était un roi. Yasmina et Khalid étaient ses enfants, ses héritiers. Son statut ne lui permettait donc pas de faire comme s'ils n'existaient pas.
Dans tous les scénarios, ses enfants devraient vivre avec lui.

Un lâche, voilà ce qu'il était, se dit-il intérieurement.
Un lâche qui avait eu recours au chantage pour avoir la femme qui hantait ses rêves. La femme qu'il désirait comme un fou.

Cinq ans plus tôt, il avait pensé que lui faire l'amour une seule fois aurait suffi à satisfaire son désir d'elle. Et pourtant, ils avaient fait l'amour trois fois au cours d'une seule nuit mais il s'était réveillé avec une plus forte envie de la posséder. C'est alors qu'il avait remarqué qu'elle était partie. Partie alors qu'il dormait.
Et lorsque son détective lui avait annoncé n'avoir trouvé aucune femme du nom de Tavia Stacks dans tout l'État de New-York, une frustration et une rage indescriptibles s'étaient emparées de lui. Elle lui avait menti sur toute la ligne.

Il avait été bafoué.
Quand il pensa qu'elle avait peut-être feint le désir, feint de prendre plaisir à leurs ébats.
Tayla était une avocate, et elle excellait dans l'art de tromper.

À contrecœur, il chassa ses pensées et se reconcentra sur l'inspecteur.
—Vous allez répondre ? Demanda-t-il.

L'homme se taisait toujours.

—Qui a annulé l'enquête? Aboya-t-il.

De nouveau, ses compagnons sursautèrent tandis qu'il tremblait.

—Le...Le commissaire... Finley, Monsieur, réussit à bégayer l'homme. On a un cas plus grave sur les bras et...

—Laissez-moi vous dire quelque chose, le coupa-t-il les dents serrées. Vous avez exactement trois jours pour retrouver cet homme sinon vous regretterez d'être venu au monde.

Amir lâcha brutalement le petit homme qui se serait retrouvé face contre le bureau s'il n'avait pas appuyé ses deux mains sur ce dernier. L'inspecteur s'essuya le front avec son avant-bras.
Amir attrapa sa veste, se dirigea prestement vers la porte du bureau et l'ouvrit. Avant de sortir, il se tourna vers eux.

—C'est valable pour vous deux aussi, ajouta-t-il en désignant les deux autres agents avant de claquer violemment la porte.

Peut-être que contrairement à lui, Tayla ne désirait pas faire l'amour avec lui. Alors il n'allait pas la forcer. Mais il se sentait responsable de ce qui lui était arrivé et allait arranger cela.
Tayla vivrait comme bon lui semble mais il allait d'abord faire en sorte qu'elle oublie cette nuit où elle avait été agressée... Ou qu'elle n'en garde qu'un mauvais souvenir.

Il allait essayer d'arranger les choses. Coûte que coûte.

Elle serait son épouse et la mère de ses enfants, mais jamais sa femme, se promit-il.
Même s'il sentait que ça n'allait pas être facile.

***

Tayla tourna la tête quand la porte s'ouvrit.
C'était Amir.
Le moment tant redouté était arrivé, pensa-t-elle. Elle regarda l'homme qui allait bientôt devenir son époux et son cœur se serra douloureusement.
Il lui avait demandé... Non. Il lui avait imposé ce mariage. Elle avait contrarié ses plans et il avait cherché un moyen pour arranger tout ça sans laisser ses enfants.

—C'est l'heure de partir, dit-il de cette voix grave qui la troublait tant en se dirigeant vers elle.

Il prit le sac que lui avait apporté Briannah et sortit sans lui jeter un autre regard.
En pensant à Briannah, Tayla sentit naître en elle une pointe de culpabilité. Sans elle, elle aurait crevé dans le parking où elle avait été agressée.

Les amis! Pensa-t-elle.
Elle n'en avait qu'une. Malgré la façon dont elle avait réagi, Briannah l'avait aidée. Elle l'avait emmenée à l'hôpital et était restée des nuits à son chevet alors qu'elle tardait à reprendre connaissance.

Et même après ça, quand Tayla lui avait appris qu'elle allait se lier à Amir et que, par conséquent, elle allait vivre à Zubran, elle s'était occupée de rendre les clés de son appartement et ceux du local qu'elle louait pour le bar.
Tout ça allait lui manquer. Tout quitter d'un coup la rendrait sûrement nostalgique...

Tayla ne pouvait cependant pas en vouloir à Briannah d'avoir appelé Amir. Son cas avait été critique, le médecin avait même dit que c'était un miracle qu'elle soit en vie.
Si elle était morte, les enfants auraient été seuls au monde. Elle n'éprouvait que de la reconnaissance envers Briannah malgré la situation délicate dans laquelle le coup de fil que cette dernière avait passé à Amir l'avait mise.

Lentement, elle se dirigea vers la porte. Enfin, après avoir passé deux semaines dont cinq jours sans connaissance dans cet hôpital, elle partait.
Son cœur ne bondit pourtant pas de joie. Elle quittait cet endroit déstabilisant certes, mais elle se dirigeait vers l'enfer.

L'enfer aux côtés d'un homme qui la méprisait.
Mais qui allait devenir son mari.

Scandale au RoyaumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant