8. Adaline

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Les cendres rouges et incandescentes de ta cigarette brûlent ma peau d'une douleur passionnelle
Presque froide.
Alors je regarde tes doigts relier ce feu de glace à tes lèvres sanguinaires.
Puis tes yeux,
Recueil d'une folie masquée presque inconnue par son possesseur,
Me transpercent d'une obscurité profonde
Accroissant le mystère que tes douces lèvres avaient déposé
En libérant cette fumée volatile
Qui compressa mes poumons.

Tes jambes croisées, à nues
Et pourtant si peu dévoilées,
Allongées sur ce fauteuil matelassé
Rougi par le néon rouge pendant au dessus de la chimère qui abrite ton épaule
Dévorant ton crâne de multiples pensées que tu cherches à repousser,
En vain.
Laissant sur ton corps des traces immuables d'un passé endolori
Le passage d'un être qui n'était pas le tien
D'un combat acharné entre l'irréel et la raison

Des lignes rouges elles aussi.

Dont mon esprit aventureux ose s'imaginer leur formation
Je les vois s'ouvrir légèrement pour laisser place à une liqueur charnelle
Tu la repousses du bout des doigts avant de reprendre ton briquet
Et de rallumer la flamme éteinte par mes pensées mal placées.

Adaline, que tu es belle dans ta douleur.
Tu sembles si peu souffrir dans ton fauteuil
Et pourtant, on aime tellement s'imaginer
Quelles sont les origines de cette autodestruction
Mais le monde t'a oublié Adaline,
Tu es perdue.

C'est en te voyant que je comprends alors ce que les gens disent de toi à présent
De cette apparence si dégradée,
Les os saillants, la peau meurtrie, le maquillage noir peuplant tes joues
Sous le ravage des larmes.
Tes cheveux coupés, ou plutôt arrachés
Par ces nuits envahies de tes monstruosités.

Pourquoi amènes-tu tant de violence Adaline ?
Tu réveilles à chaque regard un fragment enterré, qui entaille les parois internes de nos corps avant d'en ressortir et de poignarder ton thorax, transperçant tes poumons cendrés.
Tu es si morbide Adaline, le meurtre demeure en chacun de tes gestes,
Rouge est la couleur de la victime,
Tu es cette victime,
Ta victime.
Et ta simple présence déclenche un désir lacéré
Assassin.

Ta laideur me fascine, elle en est presque sublime.
Tu sembles t'abandonner à qui veut de toi
Mais en réalité je te connais Adaline.
Tu les prends, les cajoles, et les étouffe sous ton anomie.
Sous ta maladie.
Sous ce faux nom et cette vie que tu as créé.

La maladie t'a dominé Adaline, tu te hais tellement que tu te fais aimer des autres.
Et tu adores ça.
Être aimée sans rien ressentir.
Être admirée pour ta capacité à mourir longuement,
Presque avec délicatesse,
douceur et discrétion.

Mais tu es un Ravage.

Pourquoi me brûles-tu Adaline ?
Personne ne pourra jamais te sauver de cette identité que tu t'es créée.
Cette couleur t'a emporté dans un monde plus profond que les enfers,
Tu as construit ta propre mort
Et la pleures à chaque instant,
Détruisant la folie que tu entretiens par ton attitude macabre,
Et cette flamme que tu aimes faire glisser le long de ta peau.

Cesse de regarder les autres Adaline,
et reviens moi,
reviens,
Théia.

Nuits d'hiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant