Elle avait cette façon d'aimer la vie que personne ne pouvait copier. À elle seule elle s'était créée un monde pour s'y réfugier. Un univers fleuri, argenté, parsemé de milles mélodies chantant ses émotions. Il y avait toujours dans son regard une lueur de première fois, une fascination pour tout objet, quel qu'il soit. Peu importe sa valeur, elle apprenait à l'aimer, à la fois à sa manière et à celle de l'objet. Comme si elle l'écoutait. Il lui murmurait ses pensées et alors peu à peu se tissait un lien invisible entre eux, leur lien. Avec elle l'imaginaire semblait possible, elle avait repoussé les limites de l'esprit pour me laisser croire au rêve. Alors que j'avais toujours réfuté ces futilités elle avait ouvert une porte sur son monde et je ne pus m'empêcher d'en tomber amoureux. Son amour pour chaque chose était immense. Mais je crois que c'est de là que venait le problème. Elle aimait chaque chose avec la même intensité, vivant ou mort, sa place était la même dans son cœur.Je crois qu'elle n'a jamais su aimer les humains, et c'est d'ailleurs ce qui l'a toujours rongé. Je le voyais, il y avait une part de tristesse en elle, d'incompréhension. Une porte obscure mais cachée entre les feuillages de son univers, cherchant à nous protéger de ses monstres. Gardant toujours tout pour elle, à chaque instant.
Mais malgré tout j'ai tenté, j'ai tenté de la faire changer. J'ai tenté de la faire m'aimer. Mais c'était comme si son but n'était pas de nous aimer, mais de nous apprendre à aimer.
Un être céleste qui nous redonne vie, qui nous pousse à croire, à nouveau. Quelque chose d'irréel, mais pourtant si attractif, un impossible que l'on cherche à atteindre, se demandant toujours quelle est sa logique alors qu'il est certain qu'elle n'en possède aucune.
Elle était de ces personnes que l'on croit irréelle tant leur beauté est inimaginable. De ces personnes dont on devrait se méfier, tant leur apparence sont délicieuses, mais dont notre cœur s'y fige à jamais, incapable de la laisser, au risque de se perdre dans ce monde qu'elle semble avoir créé.
Elle nous envoûte et nous emmène où le vent la portera, sachant pertinemment qu'on la suivra à jamais, bien qu'elle s'en moque. Elle avait conscience de ses nombreux admirateurs, et elle en riait, d'une douce voix, résonnant encore et à jamais dans mon esprit, ce rire qui hante mes rêves les plus lointains, me berçant d'un souvenir effacé. Il y avait une certaine mélancolie, une certaine tristesse, mais surtout de l'indifférence, mais cette dernière n'était pas sincère. Elle servait de voile pour se cacher derrière sa peur de ne pas pouvoir s'attacher correctement. Alors elle jouait, racontant qu'aucun Homme ne lui avait volé son cœur, et que personne n'atteindrait jamais son amour. Mais ce qu'elle déclarait comme étant une vertu était en réalité un vice. Sa seule impossibilité. Elle n'était pas indifférente face à nos avances, elle ne savait juste pas les maîtriser, comme si elle avait malappris l'amour que l'on porte à un humain. Elle semblait le fuir, de peur de mal s'y prendre. Et je crois que c'est le seul doute que je ne j'ai jamais vu à travers son regard. Car elle est de ces gens qui n'ont aucune limite - ou presque.
Rien ne semblait jamais l'effrayer, elle ère et vogue entre les arbres, les ruelles ou les habitations sans une seule once de peur. Comme si sa douceur pouvait chasser tout mal, on pouvait même croire que d'un simple regard elle aurait pu ôter l'envie de meurtre à un assassin, ou encore, l'envie de mourir à un dépressif. Peut-être qu'elle n'avait peur de rien simplement parce qu'elle ne connaissait pas l'inconnu. Sans mystère il n'y a pas de frissons, pas de crainte, pas d'angoisse. Non, ça ne peut être cela, elle, elle savait, je ne sais pas quoi, je ne sais pas comment, mais elle savait une chose que nous autres êtres humains n'avions jamais réussi à percer. Et là était sa force.
Elle semblait toujours apaisée, par le monde, par tous ces cœurs qui battaient encore chaque jour, comme si elle puisait sa force dans la nature, le monde était presque une addiction pour elle. Elle se devait de le protéger, de l'aimer, de le cajoler. C'était son but, son devoir, sa raison d'être. Elle vivait non pas pour elle, mais pour les autres, à travers le monde, à travers chaque chose, elle était là.
Existait-elle ? Je ne sais pas. Était-elle humaine ? Je ne peux y répondre non plus. Est-ce que je l'aimais ? Oh, ça oui, tellement. Tout d'abord, j'ai aimé sa beauté. Ses longs cheveux blonds descendant jusqu'au bas du dos. Et ses grands yeux bleus, dont brillait toujours une lueur, un astre céleste. Elle avait des lèvres fines, roses, elles semblaient si douces, s'ouvrant doucement pour laisser l'air s'échapper de ses poumons. Je pouvais presque le jalouser d'être aussi proche d'elle, de pouvoir voyager dans ce corps que j'idolâtrais tellement. Et il y avait son cou, long et fin, sa taille légèrement marquée, ses jambes maigres. Oui elle était maigre, certains diraient trop, moi je pense que ça allait avec son invisibilité. Beaucoup sont passés à côté d'elle sans même la remarquer, trop pressés par leur avenir alors que l'instant les regardait de ses deux bleus saphir. Elle portait toujours des vêtements légers, volant au vent, un tissu fin, généralement long, qui se laissait emporter par le vent au fur et à mesure de ses pas, fragiles. Alors il glissait de long de sa peau et on pouvait la voir sourire à son contact, car ce souffle la rendait vivante, puissante, indestructible. Et elle aimait s'aimer. Car c'est aussi de cet amour qu'émanait sa passion pour ce qui l'entoure.
Elle était mystère, et elle a volé mon regard d'un simple mouvement de lèvres signant "il est merveilleux n'est-ce pas ?". Je n'ai pas compris sur l'instant, trop absorbé par ses formes qui éveillaient mes hormones naissantes de l'adolescence. Mais à force de l'observer j'ai compris qu'elle parlait du vent qui la faisait presque voler. A l'époque je n'aurais pu croire que l'on puisse ressentir tant d'amour pour quelque chose d'aussi futile qu'un élément. Pour moi, ils étaient, tout simplement, je les pensais trop habituels pour attirer quelconque attention, et pourtant elle, arrivait à les ressentir. Alors que nous avions oublié toutes ces petites choses, ces sentiments que l'on ressent à la découverte, elle les aimait des années durant, profitant de leur magie à chaque instant.
Je n'ai plus vu le monde comme une chose quotidienne, une sorte de maison familiale où abrite la vie, mais comme un recueil d'émotions. Un livre regroupant chacun de nos besoins, nos envies, une œuvre dans laquelle chaque vie donne un peu de soi afin d'en créer la beauté. Et alors c'est dans ce bouquin que nous puisons ce que nous ne pouvons créer, pour tenir, rester, garder à jamais espoir. Et c'est lorsque j'ai compris ce mécanisme que j'ai réalisé qu'elle ne pouvait être réelle, parce qu'elle se bâtissait entièrement de ce livre. Elle ne pouvait pas ne rien produire c'était impossible. Alors j'ai osé m'imaginer qu'elle était peut-être une preuve de l'existence de dieu, d'une vie extra-terrestre, ou simplement une trace des anciennes mythologies. Je ne sais qu'elle créature elle était réellement, mais je l'admirais. Même si elle était vide et qu'elle se servait du monde pour exister, sans elle je n'aurais jamais réappris à le regarder. Et sans elle je n'aurais jamais vécu, j'aurais simplement été.
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Nuits d'hiver
ŞiirNuits de rêves. Nuits de peine. Nuits d'amour. Nuits de haine. Nuits de flou. Nuits d'hiver