Skyrim - La fille du Sang de Serpent

CHAPITRE 3 : Changement de programme

Il ne leur a pas fallu longtemps pour comprendre que je n’étais pas qu’une victime du grand chef khajiit. Là, ma situation a changé du tout au tout. Les soldats ont fait une halte pour la nuit, permettant aux chevaux de se reposer et à une petite équipe de retrouver le dunmer. Le rougegarde, lui, a prit grand plaisir à me lacérer les poignets de sa corde afin que je suive le convoi comme tous les autres. Je me suis un peu débattu mais il faut avouer qu’il a de la force. Je l’ai regardé s’éloigner avant de rejoindre mon père de cœur

“Haron ! Tout va bien ? Tu as l’air si fatigué ! C'est du sang sur ta fourrure ? C'est une cicatrice sous ton œil ? Oh tu as une griffe cassée !”

Son regard, triste et éteint, possède toujours l’autorité de me faire fermer la bouche et baisser les yeux. Je sens une main puissante sur mon épaule. Une main rouge. J’en approche mes doigts fins pour la serrer alors que son propriétaire s’assoit derrière moi. Je me laisse tomber dans ses bras.

“Que s’est-il passé au campement ? Demandais-je à mi-voix

-La légion impériale nous a attaqué, ils étaient accompagnés d’un réputé mercenaire rougegarde. En échange d’un traitement de faveur comparable à celui d’un natif de Bordeciel, il a promis de les aider à nettoyer la châtellerie du Haut-Roi… Pour honorer sa mémoire. Comme il avait déjà fait ses preuves ils lui ont fait confiance. Il n’a fait qu’une bouchée de nous, résume l’Orc dans mon oreille”

Alors comme ça l’Empire lui-même nous avait chassé. J’avais un peu de mal à croire qu’il ne s’agissait que d’une opération de Solitude.

“-Et où est-ce qu’on nous emmène ?

-Aucune idée mon chaton… reprends le chef, coupant mon ami, tout ce que je sais, c'est que ce n’est pas loin du Sovngarde…

-HARON ! Ne l’écoute pas petite. Ce sera sûrement une prison à Cyrodiil ou dans une cité impériale. On sera jugé, pas tué”

Je ferme les yeux. Cette histoire me plaît de moins en moins. Sûrement à cause de mon odeur ou de ma grimace, le khajiit exerce une légère pression rassurante dans ma main. Désormais, je réalise que j’ai ma réponse. Je n’ai pas été enlevée par ces gros nounours. J’ai été sauvée. Ils m’ont élevée comme si j’étais leur propre enfant. Je souris, et son regard éteint semble s’éclairer légèrement, il souffle d’une voix douce et mielleuse

“Ne t’inquiètes pas Mélodie. Lilchor s’est enfui, et il est loin d’être égoïste ! Il va venir nous chercher, ou au moins toi. Nous savons tous combien il t’aime. Allez, dors, prends des forces, le voyage de demain sera long.

-Je peux pas dormir en sachant que vous deux, ou que mon elfe préféré, êtes en danger de mort. Brahed, je sais que tu veux me rassurer mais ne te voile pas la face. Aux yeux de la légion impériale vous êtes des criminels… Surtout que… Ne l’oublions pas, tu es un orsmer, Haron est un homme chat, Lilchor un elfe noir, et j’en passe, je suis une nordique, mon père est Ulfric Sombrage ! Ils ne nous donneront pas un procès équitable. Je ne suis même pas sûre qu’ils nous donneront une sépulture digne. Je ne suis pas sûre qu’ils nous donneront une mort digne de Sovngarde… Je n’ai même pas eu une vie qui valait la peine d’être vécue… J’ai 16 ans, je suis une bâtarde, rendue esclave par un khajiit, rejetée par son géniteur, élevée par des bandits, et mon univers se limitait à un camp et un tunnel…

-Arrête ça tout de suite ! S’énerve Brahed alors que je sens ses muscles se tendre. Parce que si tu continue de déprimer je coupe ta jolie petite tête avant même que tu ne la pose sur le billot ! C'est ton enfoiré de khajiit le dépressif ! Pas toi ! Toi tu es la têtue, l’optimiste, la princesse qui crie à travers la grotte jusqu'à ce qu’on la foute dehors ! Tu es celle qui m’a empêché huit fois en neuf ans de me casser ! Celle qui a rendu obéissant ce ptit con arrogant d’elfe noir ! Celle qui nous a appris, à nous tous, que derrière cette masse de fourrure et de muscle devant toi, il y avait un cœur ! Je t’interdis de dire que ta vie ne vaut rien ! Elle avait de la valeur pour beaucoup de gens, qu’ils soient nordiques ou khajiit, et ce même si ils ne sont pas tous totalement innocents.”

Je ris légèrement et me laisse aller contre son torse, bercée par sa respiration calme et profonde. Quelques minutes plus tard, je perçois un léger ronflement-ronronnement. Mes paupières se ferment lentement, et je m’endors moi aussi. D’ailleurs, un orc, c'est quand même plus confortable qu’un tapis sur un sol de pierre et de poussière.