Chapitre 5 : Lui

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Il fait froid. Le vent.

Il fait humide. La  pluie.

Il fait lourd. Désespoir.

Il fait calme. Fierté.

Le billot est en place. Les sombrages se sont mêlés aux bandits. Les impériaux nous huent avec les habitants. Le prêtre recite le serment d’un air solennel, leur souhaitant d’entrer en Sovngard sans vraiment le penser. Sa mine est joviale. Il est du côté de Cyrodiil. Le bourreau se tient bien droit. J’ai l’impression de voir un sourire se dessiner sous sa cagoule.

J’ai perdu de vue mes amis et je n’ai plus de nouvelle de mon elfe noir. Mon père m’a frappée à mon réveil. Une claque si puissante que mon oreille en siffle encore. Après la gifle, j’ai reçu un coup de poing de la part de chacun des condamnés présents dans la cellule. Ulfric m’a annoncé que c'était le prix de l’ingratitude dont j’avais fait part. Je l’ai mérité. J’ai hâte qu’il meurt.

Le général est d’ailleurs en grande conversation avec lui, mais je n’ai pas envie d’écouter. Résignation, j’accepte la mort et m’y prépare. C'est ça, mourir comme un Nordique. C'est attendre son sort patiemment.

-Assez parlé !

Le silence s’impose. Tous les regards se tournent vers un des fils de Bordeciel, un brun en armure de maille. Il s’est avancé et se pose désormais à genoux devant le billot. Je tourne la tête pour ne pas voir la sienne tomber. On entends le son caractéristique de l’acier claquant contre la pierre, et là je sais qu’il est mort. Sur le visage d’un de ses confrères, celui à ma droite, un sourire apparaît. Il est mort dignement. Soudain craque la tempête. Je recule d’un pas, un mauvais pressentiment. Le même pressentiment qui me suit après chaque cauchemar.

-Maintenant la nordique. Ordonne fermement le capitaine

Des têtes se tournent vers moi. Je regarde partout autour de moi. La panique d’être la seule fille présente ici.

-J’ai dit : Au billot

J’inspire un grand coup et rejoins la place sous une cinquantaine d’yeux, certains compatissants, d’autres ravis. Le bourreau m’attrape la nuque d’une main ferme pour me forcer à m’abaisser. Je ferme les yeux et…

Et rien. Sa hache ne m’abattra jamais. J’ai entendu un rugissement, senti la terre trembler et j’ai roulé par terre. J’avais l’avantage de ma position. Le bourreau l’avait moins. Lorsque, malgré le déséquilibre, je parvient à me relever, je vois que ce salaud a eu sa lame entre les deux yeux. Malgré la situation, je souris. Puis j’aperçois la cause du désordre, là-haut, sur la plus haute tour d’Helgen. Par Talos… Je me rue vers la porte ouverte la plus proche, comme le font les prisonniers. Dans ma précipitation je percute un archer qui visait le cataclysme géant, comme tous ceux de la légion.

Vite. Pour ma vie, je m’engouffre dans l’un des donjons. Je me laisse choir sur une des marches, et je craque, posant ma tête entre mes mains.

C'était lui.

C'était comme dans mes rêves.

C'était le dovah légendaire.

C'état Alduin.

Je sens une main se poser sur mes épaules et je me crispe. Doucement, je lève mes yeux humides vers mon père. C'est comme lorsque j’étais enfant. Seulement, le lien ne dure pas bien longtemps. Il se tourne vers l’un de ses soldats, le blond qui avait sourit tout à l'heure, je remarque. Il lui donne trois ordres qui claquent à mes oreilles comme un coup de fouet.

-Ralof ! Prends la gamine, sors là d’Helgen et conduit la à Vendeaume

Je n’ai pas la force de riposter encore. Je me contente de lui lancer un regard assassin et je me relève pour suivre le Nordique. Lui a l’air gentil. Il me tend la main - que je refuse- et sourit. Nous nous engageons dans les escaliers qui mènent vers le haut de la tour.

Le dénommé Ralof me repousse en arrière avant que nous ne soyons arrivés à l’étage. J’ouvre la bouche pour protester quand soudain, le mur explose et un torrent de flammes a raison du pauvre homme qui se trouvait là. On attend de très longues secondes que le roi-dragon s’en aille, puis nous achevons la montée.

-Merci… dis-je en baissant la tête. Il sourit

-De rien il s’approche de l’ouverture et reprend. Il va falloir sauter beauté, on a pas le choix ! Tu vois l’auberge, en face? Allez vas-y ! Je te rejoins

Je ferme les yeux quelques instants pour me donner du courage. Lui ne me presse pas. Il respecte ma peur. Lorsque je les rouvre, je me décide enfin. Je prends de l’élan, cours et saute !

Le bâtiment qu’il m’avait indiqué était en flammes. Dans le toit de chaume, il y avait une large ouverture. J’ai atterrit sur les planches qui constituaient le sol d’une chambre. Je m’assois donc quelques instants sur le lit pour reprendre mon souffle, mais la fumée m’en empêche, alors je continue ma route, passant la porte puis les escaliers à toute vitesse. Sortie de l’auberge, je me cache avec quelques hommes derrière une petite maison de bois. Ce sont des civils, et un soldat qui se tournent vers moi.

-Encore en vie ?! Restez derrière moi ou ça ne durera pas.

Et il partit en courant. Moi, j’obéis. Je le suis.

J’ai peur. Vraiment très peur.

Skyrim - La fille du Sang de SerpentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant