Six heures trente, mon réveil sonne. Je m'étire, caresse la tête d'Éliade, puis fonce sous la douche avant que la pièce soit inaccessible ; Léa va bientôt squatter les lieux. Après avoir enfilé un jean noir et un t-shirt de la même teinte, je descends prendre mon petit-déjeuner. Coralie s'est levée pour l'occasion et nous attend en bâillant devant une tasse de café, emmaillotée dans un peignoir blanc comme si elle sortait tout juste du spa.
— Bonjour, mon chéri, ça va ? Tu es prêt pour ton premier jour de lycée ?
— Bonjour, ça va, merci.
Voyant que je n'ai pas du tout envie de lui parler, elle n'insiste pas et disparaît dans le salon. Une fois mon café et mon croissant avalés, je promène Éliade pendant une vingtaine de minutes, puis quand il est l'heure pour moi de partir, je récupère mon sac de cours et laisse ma chienne dans l'appartement. Comme je le craignais, elle se met à pleurer, et c'est le cœur lourd que je referme la porte derrière moi.
— Vincent, attends-moi ! s'écrie Léa dans mon dos.
Moi qui espérais faire le trajet seul.
— Tu n'es vraiment pas très galant, me taquine-t-elle quand elle arrive à ma hauteur.
Aujourd'hui, elle est tout de blanc vêtue, jean, débardeur et veste, et je serais un menteur si j'affirmais qu'elle n'est pas mignonne. Je serais également un menteur si je disais qu'elle ne fait rien pour se montrer sympa avec moi. Pourtant, sa seule présence m'énerve.
— Tu es genre ma demi-sœur, Léa. Je n'ai aucune raison d'être galant avec toi.
Je me demande si elle comprendra un jour que je ne sortirai jamais avec elle.
— Et alors ? Ne me dis pas que je ne te plais pas ! Je vois bien comment tu me regardes.
Je m'arrête brusquement pour l'observer, espérant constater à son expression qu'elle plaisante. Mais en découvrant son visage parfaitement sérieux et la façon dont ses yeux noisette sont braqués sur moi, je m'aperçois que ce n'est pas le cas.
Je reprends ma marche sans prononcer un mot, n'ayant vraiment pas le courage de me disputer avec elle ce matin. Elle finira par se faire une raison, tôt ou tard.
— Vincent ?
— Quoi ? je rétorque un peu sèchement.
— Eh bien, tu ne m'as même pas répondu !
Je crois que je vais être forcé de revoir mes envies à la baisse. De toute évidence, cette conversation va bien avoir lieu maintenant, juste avant notre première journée de cours.
— Parce que c'est évident. Désolé, Léa, tu ne m'intéresses pas.
Ses joues ont pris une teinte vermeille et son visage se décompose. Je m'aperçois que je l'ai vexée et je m'en veux soudain de lui avoir fait de la peine. Pourtant j'aime mieux ça plutôt que de lui donner de faux espoirs, ce n'est pas mon genre d'agir de la sorte. Malheureusement, j'ai aussi tendance à être un peu trop franc et direct, c'est d'ailleurs l'un de mes plus gros défauts.
— Je te ferai changer d'avis, déclare-t-elle en reprenant contenance. Tu me verras autrement quand on sera en cours.
— Si tu le dis.
Nous continuons notre marche en silence et, moins de dix minutes plus tard, au détour d'une rue dont une auto-école fait l'angle, j'aperçois les grilles blanches du lycée Pontus de Tyard. Des élèves sont en train de fumer à l'entrée, devant le portail.
Afin d'éviter les regards, je rabats ma capuche sur ma tête. Ironique, de la part d'un gars qui se retrouvera bientôt placardé sur des affiches publicitaires partout en France. Cela dit, j'avais besoin de thunes pour payer mon permis, alors quand cet agent est venu m'interpeller sur la plage au printemps, j'ai choisi la facilité. Résultat, en juillet, j'ai fait un shooting pour une marque de parfum dont les adolescents sont la cible, et d'ici quelques semaines, je vais finir imprimé en papier glacé sur les pages des magazines et sur des affiches publicitaires dans la rue. Flippant.
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UNDISCLOSED DESIRES (Romance MM/GAY) ÉDITÉ
RomanceSuite à l'emménagement de son père avec sa nouvelle compagne, Vincent quitte Marseille pour Chalon sur Saône, en Bourgogne. Il laisse derrière lui son meilleur ami de toujours, Samir, et Sophie, son premier amour. Mais cette ville et cette dernière...