➰Chapitre 28➰

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•Jour 15•

Je croque une dernière fois dans ma pomme, geste qui clôture mon petit-déjeuner. Tout comme hier soir, mon père et moi mangeons en tête à tête tandis que Virginie et Manon prennent les repas de leur côté. Loin de lui l'idée d'éviter ma soeur depuis qu'il a appris qu'elle n'était pas sa fille biologique, il ne supporte simplement plus de croiser le regard de sa mère. Mais naturellement, il accepte que cette dernière ne veuille pas passer la fin de ses vacances seule et prenne donc la petite sous son aile.
Pourquoi ne reste-t-elle avec son amant, maintenant que l'histoire a éclaté au grand jour ? Il est vrai que la question m'a effleuré l'esprit. Peut-être a-t-elle la décence de ne pas s'afficher avec lui devant mon père. Ou alors William a tout simplement déjà quitté l'hôtel.
En tout cas, notre famille, ou du moins ce qu'il en reste, est maintenant bel et bien morcelée.

Je me demande ce que pense Manon de toute cette situation. Même du haut de ses cinq ans, elle doit se rendre compte que quelque chose ne va pas. A moins que ce ne soit déjà fait, elle finira par questionner un de ses parents. Je serais alors curieuse de savoir ce que celui-ci lui répondra. De toutes façons, ils seront bientôt contraints de lui en toucher quelques mots, surtout en vue de la séparation imminente.

Voilà ce que m'a annoncé mon père hier soir. Dès que nous serons à Bruxelles, Virginie quittera l'appartement pour aller s'installer autre part. Je n'ai pas osé lui demander en quoi avait consisté leur discussion –enfin si on peut la considérer comme telle– mais il m'a quand même appris qu'après avoir tenté de nier, son ex-compagne avait fini par reconnaitre les faits dont l'accusait mon enregistrement.

La colère retombée, Papa semble ce matin affligé par une immense tristesse. Je me rappelle d'ailleurs que celle-ci est la quatrième étape du deuil amoureux.
De profonds cernes témoignent également de l'affreuse nuit qu'il vient de passer dans le petit lit de ma soeur.
De mon côté, j'essaye tant bien que mal de le distraire, de lui changer les idées pour lui faire penser à autre chose. Mais je m'aperçois rapidement qu'aussi charitables soient-elles, mes tentatives sont vaines. Ce même air absent et abattu ne quitte plus son regard.

Nous quittons l'hôtel à quatorze heures. Et malgré mon envie d'être auprès de mon père dans ces moments difficiles, je veux profiter du peu de temps qu'il me reste ici pour dire au revoir à Derek et à sa soeur.

-Papa, ça te dérange si je passe la fin de la matinée avec mes amis ? J'ai pas envie de te laisser seul mais c'est la dernière occasion que j'aurai de les voir avant un certain temps sûrement...

Mon interlocuteur semble soudainement sortir de sa léthargie. Il écarquille légèrement les yeux, comme s'il venait de se remémorer ma présence.

-Oh vas-y, ne t'inquiète pas pour moi, me rassure-t-il d'une voix faible. Je dois encore terminer ma valise et aller régler quelques trucs à la réception.

Un gentil sourire gravé sur les lèvres, je me lève et quitte la table.

Splach splach splach

Assise au bord de la piscine et appuyée sur mes paumes, je fais doucement battre mes jambes dans l'eau. Je profite de la sensation agréable que me procure cette dernière en éclaboussant mes cuisses quand une main vient se poser sur la mienne. Je reconnais immédiatement ce contact chaud et rassurant qui fait frissonner tout mon corps. Derek prend place à mes côtés sans pour autant arrêter ses caresses sur mes doigts endoloris.

-Alors, comment va ton père ? s'inquiète-t-il.

-Je dirais qu'il tient le choc même s'il doit s'agir d'une des épreuves les plus douloureuses de sa vie, lui expliqué-je.

Et après ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant