Chapitre 6

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Je rentrais chez moi, légère. J'étais contente d'avoir accompli ma tâche, d'avoir sauvé ma sœur. Même si Camille allait traverser une passe difficile après sa rupture, j'allais la soutenir et elle s'en sortirait.

Une fois arrivée chez moi, je n'eus même pas le courage de me doucher. Je me laissais lourdement tomber dans mon lit et m'endormis d'un seul coup. Alors que je dormais d'un sommeil profond, je fus réveillée par une sonnerie stridente. Excédée, je m'apprêtais à m'énerver sèchement contre celui ou celle qui osait m'appeler à une heure pareille, mais lorsque je décrochai, j'eus la surprise d'entendre la voix d'Augustin.

« Sale petite pute, tu vas bientôt recevoir un appel de Camille te disant que tu t'étais complètement trompée et que Laetitia est ma cousine. Heureuse, ma Camille te dira que tout est arrangé entre nous, et tu ne pourras plus rien faire pour nous séparer. Je ne peux pas te jurer que tout ceci n'est pas une mascarade, mais tu ne peux pas le prouver non plus. Et puis maintenant tu as perdu sa confiance, tes petites manigances se sont retournées contre toi. »

BIP BIP BIP

Ce coup de téléphone triomphant et accusateur me laissa pantelante, la bouche sèche, je me laissai tomber sur le sol, mon portable glissa de mes mains et pour la deuxième fois depuis le début de cette histoire délirante je me mis à pleurer.

La tête dans les mains, je ne vis pas tout de suite la silhouette massive qui avait envahi ma chambre. Au moment où brusquement je relevai la tête, je le vis. Il était devant moi, immense, imposant, effrayant même. Il portait toujours son masque ensanglanté et sa cape sombre. Je sursautai et tentai de me réfugier dans un coin de ma chambre. Voyant que je reculais, il s'approcha et s'assit sur le lit, près, trop près de moi.

« Tu essaies encore de m'éviter » tonna-t-il.

Il me prit fermement le poignet : « mais tu ne peux pas m'éviter, personne ne le peut, je suis là dans chacun de tes gestes, chacune de tes pensées, chacune de tes actions, chacun de tes mots, je te suis partout et jamais tu ne pourras m'échapper ! »

Il partit dans un rire à vous glacer le sang, un rire qui ressemblait plus à un cri strident. Puis il disparut, d'un coup. Je restais hébétée durant un court instant quand une douleur vive au poignet me rappela à la réalité. En l'observant j'y vis des marques rouges, et à certains endroits la peau pelait, comme brûlée par sa main.

Je courus mettre ma main sous un robinet d'eau froide mais cela n'y changea rien, ma blessure me faisait toujours aussi mal. En essayant d'attraper les Dolipranes dans l'armoire à pharmacie située au-dessus de la baignoire, je fis tomber un flacon en verre. Alors que j'essayai de ramasser les débris, ma mère arriva et catastrophée me demanda pourquoi je n'étais pas couchée à une heure pareille. J'essayais tant bien que mal de cacher mon poignet meurtri mais elle l'aperçut et un interrogatoire pointilleux commença.

« Où t'es-tu fait ça ?

Comment ?

Tu t'es brûlée ?

Chez ta sœur ?

Fais un peu attention à toi pour une fois !

Et puis faut pas se coucher si tard c'est pas bon pour ta santé !

T'as bu de l'alcool ce soir, tu sembles bizarre ? T'as pas fumé j'espère !?... »

Je l'interrompis bien vite en prétextant un gros mal de tête et une intense fatigue, ce à quoi ma mère me répondit :

« Et bien aussi, si tu te couchais pas si tard, et puis faut pas boire autant ! »

Bref, elle avait décidé de me pourrir la vie comme d'habitude.

Cette avalanche de remarques me donnait l'impression que je la décevais, que je n'étais pas à la hauteur de ses attentes, que je n'étais pas la fille parfaite qu'elle aurait voulu avoir. En fait j'avais l'impression qu'elle ne m'aimait pas parce qu'elle ne me témoignait jamais son amour, elle n'était pas très affectueuse, et c'était sûrement d'elle que me venait mon caractère peu démonstratif. Toutes les deux nous étions pudiques en matière de sentiments, ce qui ne facilitait pas notre relation.

Le Dérapage Où les histoires vivent. Découvrez maintenant