Masques. . .

Tête à Tête

Après ces enlaçades chargées d'émotions, il fallut se séparer et préparer le dîner..
Côme avait insisté pour m'aider ce jour-là et.. je n'avais pas eu la force de refuser, face à sa détermination.
Tout cela s'était fait dans le silence le plus plat possible..
Pendant ce temps, je le voyais être plongé dans ses pensées, les sourcils froncés. Et il était si absorbé, que je n'osais rien lui demander.

J'eus bien raison car, de toute manière, le sujet fut abordé au repas. . :

Lors du Dîner,

- Est-ce que.. ça va ? M'interrogea Côme alors que je commençais mon plat.

- Euh.. Fis-je en regardant timidement à droite et à gauche. O-oui.. Bredouillé-je avec surprise. Pourquoi ?

Mais avant même qu'il ne réponde, je frottai mes yeux en lui demandant :

- Ils sont encore rougis, c'est ça ?

Je m'arrêtai en m'écriant :

- Nan!..

Je le regardai droit dans les yeux :

- Sois honnête, je ne souris pas assez, n'est-ce pas ?

- Non, s'enquit-il en me souriant évasivement, ce n'est pas ça.. enfin.. je..

Il s'arrêta et mit sa main dans ses cheveux en baissant la tête.

Il semblait tiraillé dans ses pensées.. tiraillé entre continuer à porter son masque et.. au contraire, l'abandonner un instant pour ne laisser parler que son cœur..

Mais n'est-ce pas moi que je suis en train de décrire là ? M'interrogé-je pensivement. Côme a sûrement plusieurs facettes et j'en ai d'ailleurs découvert certaines, soit.. Cependant, est-il lui aussi réellement tiraillé entre porter et retirer son masque ? N'est-il pas convaincu que l'avoir est la meilleure solution comme finalement tout le monde ? Est-ce que..

Je suis sortie de mes pensées par le geste brusque de Côme qui s'était redressé.

- Est-ce que c'est bon ? Commence-t-il maladroitement. Tu manges assez? S'inquiète-t-il, beaucoup moins sûr de lui. Je veux dire.. diviser tes repas en deux rien que pour moi me gêne.. M'avoue-t-il enfin en regardant son assiette, le feu aux joues.

- Oh, fis-je pensivement, ne t'en fais pas pour ça ! Lui assuré-je. Je ne les divise pas, à vrai dire, je ne l'ai jamais fait.. Lui avoué-je à mon tour distraitement. Grand frère est là si rarement à l'heure des repas..que même si on mange à trois..je sais qu'il s'absentera bien plusieurs fois plus tard, ce qui n'est donc pas dérangeant.. Expliqué-je en clignant des yeux distraitement.

- Je vois. Susurra-t-il, sûrement gêné.

Il toussa nerveusement en me voyant baisser les yeux. Je me remis à manger pour ne pas l'inquiéter.

- Tout à l'heure, tu m'as dit.. Commença Côme avec appréhension.

- Oui ? L'encouragé-je en levant mes yeux vers lui avec curiosité.

- .. que.. tu devais sortir ce soir..avec ton frère..hum.. Bredouille-t-il en détournant les yeux à son tour.

- En effet.. Murmuré-je alors que la déception et la tristesse refaisaient de nouveau surface en moi.

- Pourquoi pas.. ? Reprend-il avec appréhension.

Je l'observai de nouveau, les yeux pleins de nostalgie.

Je crois qu'il s'en rendit compte. En même temps, je n'avais plus la force de faire semblant.. pas après ma première dispute avec Grand-frère. .  Pensé-je tristement.

- Hum..je.. Bafouille-il, anxieux. Ça te dirait de..faire un p'tit tour..ce soir..? Me demande-t-il enfin.

Mes sourcils se haussèrent et j'ouvris grand mes yeux en le regardant.

- Sortir ? Mais où ? M'étonné-je. C'est totalement inattendu, continué-je en sentant de la joie monter en moi, mais je..

Mon faible sourire s'effaça et je baissai des yeux ternes vers mon assiette..

- Je n'ai pas le droit.. Murmuré-je dans un souffle.

- Ce ne sera pas long..! S'empresse-t-il de répondre à la vue de ma réaction. Je.. Essaie-t-il de nouveau.

Cependant, il semble perdre ses mots malgré le fait qu'il se creusait la tête. Finalement, il parut abandonner et s'écria :

- Et puis ça te changera d'air ! Enfin, je veux dire.. Se reprend-il en baissant d'un ton après m'avoir vue sursauter. .. surtout si tu devais le faire à l'origine.. Termine-t-il tout bas, conscient qu'il me demandait de faire l'exact opposé de ce qui m'était autorisée.

À ce moment, une pensée surprenante me traversa l'esprit :

Malgré cet interdit, me dis-je, s'il me le demandait quand même.. c'est que cela devait en valoir la peine.. ?

C'est vrai, quoi.

Pourquoi douter ?

Cet homme est capable de se faire du mal pour mon simple bien-être ? Il est capable de franchir les interdits pour moi aussi, alors.. pourquoi douter ?

Je haussai les épaules.

De toute façon, ce n'est pas comme si Grand frère serait là pour le vérifier. Me dis-je avec un ton insouciant comme cela ne m'était jamais arrivée de toute ma vie. Et puis.. ce n'est pas comme s'il se souciait de moi.

Cette pensée me pinça le cœur mais je la balayai vite de la main pour ne pas de nouveau de sombrer.

Oui, faisons comme cela. Me décidé-je enfin.

- D'accord. Répondis-je enfin, et ce, après de longues minutes de méditation.

Ses épaules s'affaissèrent de soulagement.

- Je suis rassuré..! Murmura-t-il en souriant. Bon..

Il releva ses yeux vers moi d'un geste vif, comme regoûtant à la vie grâce à ma simple réponse.

- On part juste après dîner ? Me propose-t-il.

- D'accord. Lui répondis-je en lui offrant un petit sourire.

- Le temps de s'habiller chaudement, dix minutes devraient s'écouler.. Déclare-t-il plus pour lui-même. Hum..

Il sembla réfléchir.

- Ouais.. On sera à l'heure si on se presse un peu.. Continue-t-il tout bas.

- À l'heure pour quoi ? M'enquis-je, curieuse, laissant pour une fois mes interrogations sur Grand frère et moi de côté.

Là, Côme m'offrit un immense sourire.. ce qui me perturba fortement.

Mais le pire, c'est qu'il ne me répondit pas..!..

- D'accord.. Murmuré-je en faisant la moue.

Ça y est! Je boudais de nouveau !

Il rit, amusé, face à cela et se leva pour m'ébouriffer gentiment les cheveux sous mes petits rires.

- Ce ne sera pas long, ne t'en fais pas.. Me promet-il avant de se rasseoir à ma place et agrandir son sourire.

- Tu n'es pas possible.. Lui dis-je en souriant doucement à mon tour.

Côme ne répondit pas de nouveau et ses yeux se plissèrent de joie.

Et c'est dans cette agréable atmosphère, pleine de bonne humeur et de douceur, que je me rendis compte que cette fois-ci, aucune mais vraiment aucune voix.. ne m'avait importunée..