Chapitre 10

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1er jour.

La lumière du jour éclairait la chambre par la grande fenêtre dont les rideaux n'avaient pas été tirés la veille. La petite boule grise au bout du lit bougea, faisant frétiller ses moustaches. Stellio s'étira de tout son long petit corps avant de faire un tour sur lui-même. Ce n'était pas un rêve. La journée d'hier n'était pas un vague souvenir. C'était la réalité. Il avait été assez stupide pour accompagner Malo. Delmar assez fourbe pour accepter et le transformer en ça. Un rat. Une vermine pour les hommes. Mais quelle idée avait-il eue ? Il ne pouvait pas laisser son ami partir seul. Son prince était bien trop buté pour s'en sortir sans s'attirer des ennuis. Et puis, il fallait quelqu'un pour se rappeler le pacte.

Du haut de ses trente centimètres, il observa la chambre. Le lit était agréable et moelleux, et au-delà, l'espace était immense. Les humains avaient apparemment besoin de toute cette organisation pour vivre. Il se tourna ensuite vers le haut du lit, là où Malo s'était endormi. Le prince n'y était plus. Il le chercha dans la pièce et le trouva installé sur le bord de fenêtre. Dévalant le drap, il fit claquer ses petites pattes sur le sol carrelé avant d'atteindre son ami. Malo avait installé une couette et des coussins dans le renfoncement du petit balcon et dormait, la tête appuyée contre la balustrade. Stellio escalada le monticule pour se poser sur ses genoux. De là, la vue sur l'océan était magnifique. On sentait les embruns et l'iode portés par le vent. Stellio resta là, sans bouger, à observer et écouter le chant des mouettes.

La porte s'ouvrit de l'autre côté de la pièce et Stellio se raidit. Il baissa sa garde lorsqu'il reconnut la gentille Anaïs. Cette femme était douce et ne semblait leur vouloir aucun mal. Lorsqu'elle pénétra les lieux et vit le lit complètement vide, elle posa son regard sur la fenêtre. Elle s'avança alors doucement puis s'agenouilla devant eux.

— Alors petit rat, ton maître n'aime pas les lits ?

Stellio pencha la tête sur le côté, ses moustaches frétillantes. Anaïs lui sourit avant de tendre ses petits doigts fins et délicats vers lui. Il enfonça sa tête dans ses épaules mais la caresse fut douce alors il se relâcha.

— Tu es mignon finalement.

Stellio couina puis Anaïs se recula et posa sa main sur l'épaule de Malo.

Le prince se réveilla lentement, cligna plusieurs fois des yeux et son ami pu voir passer dans ses yeux qu'ils se disaient exactement la même chose que lui : tout ça était réel.

— Le petit-déjeuner va être servi d'ici peu. En tant qu'invité du Prince, votre présence est requise.

Malo se redressa, faisant craquer les os de son dos et de sa nuque. Anaïs recula et retourna vers la porte où elle laissa entrer deux femmes de chambre avec un broc d'eau et des serviettes.

— Voilà de quoi vous débarbouiller.

Elle ouvrit ensuite la grande penderie et en sortit une tenue qu'elle mit sur le lit complètement défait. Elle ne posa aucune question et chassa les deux femmes une fois leur travail effectué. Les ragots allaient fleurir dans les couloirs ce matin. L'étranger qui ne dormait pas dans son lit. Elle prévint Malo qu'elle reviendrait le chercher pour le mener à la salle du repas et s'éclipsa. Le prince souffla et prit le temps d'observer l'océan. Toujours aucun chant. Était-il trop loin pour l'entendre ? Il se rendit jusqu'au broc et observa l'eau sans savoir vraiment quoi en faire. Plongeant ses doigts dans le liquide frais, il s'aspergea finalement le visage pour se réveiller. Cela lui fit du bien. Il enfila ensuite les vêtements toujours un peu longs, avant de tendre la main à Stellio pour qu'il grimpe. Une fois juste devant son visage, il lui sourit tristement avant de former silencieusement le mot « désolé ». Stellio couina puis escalada son bras pour se poser sur son épaule. Pas de regret. Ils avaient un monde à découvrir.

Pour une vie sur terre...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant