vendredi 26 octobre

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cours précédent: influence de Rousseau sur la sociologie, on en est au 3eme temps de cette réflexion: même si rousseau a l'air plus psychologue que sociologue, sa réflexion anticipe beaucoup de thèmes de sociologie, notamment sur le caractère contingent des choses (ce qui s'oppose à la nécessité). C'est à dire que les affaires humaines sont; mais pourraient ne pas être, les hommes font l'histoire mais ne la maitrisent pas. En sociologie comme en psychologie, c'est ce caractère fatalement non désiré de nos vies.

Nos actions ne sont pas évidentes, tout comme la création des sociétés ne l'est pas. Même quand on sait qu'il faut construire une action collective, qu'on y a parfaitement intérêt, il reste difficile de s'y mettre. La reflexion de rousseau touche la domination, les inégalités sociales, la mise en scène de soi (postures). On en arrive à l'idée que le paraître finit par se transformer en être, alors qu'il n'était qu'un avoir. La société transforme donc l'avoir en être. On commence à regarder les autres puis soi même, se comparer, voir apparaître des luttes de distinction. Rousseau anticipe les travaux de Pierre Bourdieu, notemment sur la lutte des classes, qui se prolonge sur un registre symbolique, quotidiennement, dans un jeu plus feutré, plus euphémisé: très souvent, c'est sur le symbolique que se passent des combats aux buts très matériels, très concrets.
En démocratie, c'est le peuple qui gouverne et en aristocratie, c'est l'élite qui gouverne. Dans une société, les dominants sont souvent distants de la réalité et de la nécessité. Leur légitimité a gouverner ne doit pas tenir du fait qu'ils disposent de davantage de ressources matérielles que les autres. Ces inégalités vont vite apparaître comme insupportables à ceux qui n'étaient pas nobles de naissance et qui voit tous les privilèges de ceux qui se sont "simplement donnés la peine de naître".

On passe d'une société ou notre place vient de notre naissance, à une société où notre place vient de notre mérite personnel. Ceci se joue sur des critères d'ordre symbolique. Bourdieu va distinguer analytiquement plusieurs ressources possibles, qu'il va appeler capitaux.

-le premier est hérité, matériel.
-le deuxième est le capital social, les relations dont on dispose.
-le troisième est le capital culturel. D'abord au sens des qualifications dont on dispose en niveau d'études et formation, puis au sens de la connaissance de certains codes, usages, savoir faire pour réussir dans telle ou telle situation.

Pour croitre et ne pas disparaître, il faut former une dernière forme de capital: le capital symbolique, qui combiner tous les autres. Cela renvoie à la qualité de notre personne, qui va rendre incontestable aux yeux des autres ce qui paraitrait hérité (ainsi un fils de riche intelligent, fortune et cultivé ne paraîtra moins légitime qu'un autre s'il n'a pas une bonne morale). Les débats sont si importants car on renvoie souvent les gouts de quelqu'un à sa personnalité, en oubliant que cela vient de sa socialisation. On hiérarchise alors souvent quelqu'un à cause d'un de ses gouts. Mais les hiérarchies sociales, pour paraître légitimes, se présentent souvent comme naturelles, mais c'est pour que l'ordre social se reproduisent à l'avantage des dominants, il faut donc transformer ce qu'on a (relation, argent,...) en symbolique (ce qu'on est). Grace à ses avoirs, à ce que l'on possède, on peut paraître (grossièrement ou subtilement). Le but est de faire passer son paraître pour son être. La société démocratique est donc toujours traversée par des luttes de distinctions symboliques (le classeur est classé par ses classants)

La question de la frustration. Rousseau dit: l'appropriation foncière est un point de rupture dans l histoire de l'humanité, car elle va la diviser entre propriétaires et non propriétaires. Il va alors fixer: "Le premier, qui ayant enclos un terrain, s'avisa de dire, ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile." (discours sur l'origine et les fondements de l inégalité parmi les hommes, 1755)
C'est ce qui va corrompre les hommes. Mais comment en est on venu à l'idée de propriété ? Cela vient peut être de la perfectibilité de l'homme, qui fait la division du travail, et la propriété. Rousseau ne mets pas en cause que le travail donne un droit sur les terres que l'on à labouré jusqu'au moment de la récolte. Mais cela se reproduit d'année en année, et c'est cette possession continue qui va se transformer en propriété foncière, et c'est ce qui est à la source des inégalités. On va se dire qu'un meilleur cultivateur mets moins de temps et donc a besoin de plus de terre, cette surproductivité de ceux qui ont l'air plus talentueux va faire qu'ils vont accumuler des biens et des terres. Rousseau ne nie pas ce droit, mais il regrette ses conséquences. Cet accaparement va jeter dans la pauvreté ceux qui n'ont pas eu de terrain, et qui vont mettre à disposition leur force pour ceux qui ont des terres et besoin de bras. Ils en sont obligés pour vivre, et ont le terrible sentiment d'être des hommes de trop dans ce monde, sur numéraires, exclus. Depuis 80 pour Marx, c'est cette question d'exclusion qui mine l'homme. "Les surnuméraires que la faiblesse ou l'indolence avaient empéché d'en acquérir à leur tour, devenus pauvres sans avoir rien perdu, parce que, tout changeant autour d'eux, eux seuls n'avaient point changé, furent obligés de recevoir ou ravir leur subsistance de la main des riches". Rousseau, 1755. Cela devient une inégalité politique et morale, car les propriétaires ont le pouvoir sur les choses, et vite le pouvoir sur les autres: ils sont en situations de commander des non propriétaires qui vont leur obéir. Les propriétaires finissent par vivre du travail des autres et non de leur talent productif, qui les légitimait avant. Au fur et a mesure, on ne voit plus leur talent, ils ne font qu'employer les autres. Quand les propriétaires ont vu qu'ils pouvaient faire travailler les autres et s'enrichir, ils n'ont plus voulut revenir en arrière. A l'origine, l'inégalité de possession venait de l'inégalité des talents. L'amour propre au sens d'un certain narcissisme va déceler l'indice du mérite dans la propriété, et va croire qu'un riche l'est car il est habile. Dans notre société, l'abondance de biens devient signe de talent, et on croit aujourd'hui que la richesse prouve l'habileté, le talent.

On pensait que les riches n'allaient pas s'enrichir d'avantage que nécessaire, mais si: ils vont se mettre à gâcher, pour prouver leur richesse, leur supériorité, et la pauvreté va devenir une humiliation. On va se battre pour des biens qui renvoient à l'image que l'on veut donner de soi: la consommation ostentatoire, la consommation des marques: qui renvoie à notre image, et qui est trop cher pour ce que c'est (chaussures à 200 euros, pull à 80). Alors que les riches consomment à outrance, les plus pauvres vont devoir voler, simplement pour assurer leur survie.

(RAPPEL: L'HOMME EST BON MAIS LA SOCIETE LE CORROMPT)

Il n'y a alors plus de pitié entre riches et pauvres.

Les riches, se voyant menacés dans leurs possessions par les rapineries des pauvres, vont leur proposer un contrat garantissant la paix et la sécurité. Mais ce contrat proposé est frauduleux, puisqu'il mets l'accent sur la paix mais vise surtout à transformer des inégalités de fait, constituées au fil du temps, en inégalités de consentement: la sécurité des pauvres est garantie en échange de la légitimité des richesses. La loi va permettre aux riches d'opprimer d'avantage les pauvres, les sur numéraires. Rousseau apparaît aussi critique du monde moderne.

La socialisation était la solution pour pacifier les relations entre les hommes, mais Rousseau ne voyait pas cet intérêt lorsque nous étions peu sur terre et qu'il y avait suffisamment de ressources. Cela vient donc surement plutôt du besoin de survivre à une catastrophe, ou autre. La société était donc contingente, et on peut la regarder d'un point de vue plus critique. Chez Voltaire ou les lumières, on voyait la nécessité de la civilisation dans le progrès des arts et sciences, que l'on voyait parallèle à un progrès moral. En réalité, ces progrès artistiques et scientifiques sont arrivés avec une régression morale, un culte des apparences qui a fait perdre à l'homme son innocence, la simplicité de son bonheur. C'est ce culte des apparences de la société qui a fait perdre la nature de l'homme. Rousseau s'interroge donc sur le bien de ses progrès, qui fascinait les philosophes de l'époque. Mais ce progrès va se retourner sur ses propres principes, car c'est aussi le luxe, le superflus pour des hommes qui ne vivent que dans les apparences. Le culte du luxe, c'est l'amplification du malheur des démunis. Le progrès peut corrompre les murs, et surtout il ne profite pas aux pauvres. On avait l'idée qu'à la manière dont une société traitait ses marges, marginaux, (pauvres, fou, prisonniers...) , on pouvait se faire une idée de la société dans son ensemble, et l'humanité en générale. Il faut abandonner cette idée d'un progrès morale solidaire aux progrès scientifique. "Nous sommes de plus en plus savants, mais note âme est de plus en plus difforme". Mais le progrès est irréversible par ce qu'il nous apporte. "Mais il vient un temps où le mal est tel que les causes même qui l'ont fait naitre sont nécessaires pour l'empêcher d'augmenter; c'est le fer qu'il faut laisser dans la plaie, de peur que le blessé n'expire en l'arrachant": métaphore du progrès qu'on ne peut pas abandonner d'un coup. Il ne faut pas revenir en arrière, mais créer un progrès plus juste.

LA CRITIQUE EST D'AUTANT PLUS CONVAINCANTE LORSQUE L'ON Y APPORTE UNE ALTERNATIVE. La critique, ce n'est pas dénigrer pour dénigrer, mais trouver des conditions dans lesquelles ce que l'on critique pourrait s'améliorer. Le socialisme semblait être une bonne alternative au système de l'époque, la critique a donc perdu en importance. La critique des discriminations l'a fait renaître. Une fois que l'on retirera les discriminations à l'embauche, tout le monde n'aura tout de même pas d'emploi.

Pour Rousseau, la vérité s'éprouve avant de se prouver. Il est pour la religion naturelle, un groupe irénique (vulgairement: bisounours), qui sous estimerait les conflits et tensions. La religion naturelle était à la recherche de solutions pour régler le conflit protestant/catholique. Ce groupe irénique va être à la recherche du plus petit dénominateur commun entre protestants et catholiques. Ces guerres de religion du XVIeme siècle étaient d'une violence inconcevable, de peurs constantes. C'était une période de réformes, de fondamentalisme: de changements pour un retour à l'ordre primitif d'une religion de laquelle on se serait trop éloigné. Cela a produit le protestantisme et des guerres si violentes qu'on appela cette période Réforme. Les conflits étaient tels qu'on se demanda si les religions n'étaient pas facteurs de discorde supérieures à celles financières. Religion vient il de "ce qui nous lie", ou "observer scrupuleusement" ? Durkheim, fils de rabin sur 8 générations puis athé, voyait l'idée de Dieu comme un culte de la société à elle même.

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