Le Monde des Femmes

Diktat 2 - La Femme n'est pas une Étoile

L'Archipel flottant de Goldstone
Palais de l'enclume

— Père, Me voilà ! affirma une jeune femme en pénétrant dans la salle d'audience. Un décor très large, très ouvert qui ravivait l'étincelle d'une technologie victorienne. Un regroupement de machines cylindriques, de par et d'autres, fumaient à plein régime, éjectant de la vapeur ardente dans la pièce.

Le roi, de petite taille, assez bouffi et joufflu, assis sur un fauteuil en acier doré, se redressa afin d'accueillir sa chère fille. Il était caractérisé par une longue chevelure clémentine, virant au gris dans certaines parcelles, mais aussi une moustache déconfite, assortie à ses rides malicieusement tracés par les années, lui procurant une belle tête de sage et de bienveillant.

— Brocéliande.. L'heure est grave...

— Je suis à votre entière disposition père ! Parlez librement ! déclara Brocéliande rigoureuse dans sa posture et sa concentration.

La demoiselle était aussi haute qu'un homme bien bâti, arborant une expression hargneuse débordant de détermination. Brocéliande possédait de courts cheveux denses et hautes, aussi soignés qu'élégamment agencés d'où se rejoignaient harmonieusement le blond et le noir.

Vêtue d'un magnifique pantalon marron retraçant minutieusement la courbe fine de ses cuisses, une chemise blanche dissimulée derrière un joli corset brun, Elle détenait une pupille droite d'un bleu profond, surmonté d'un monocle violet, et une pupille gauche écarlate qui appuyait l'originalité de sa personne.

Le roi, à l'allure ébranlée, soupira lourdement. Ce qu'il allait relater n'était guère joyeux, loin de là. D'une voix assurée, il entama un discours de lion, un ensemble de péripéties intrigant, tragique et bouleversant.

L'attention de Brocéliande était sans pareille. La mission qui allait lui être confiée la stimulait déjà. La perspective de cette dangereuse aventure l'excitait intérieurement, mais elle s'efforçait d'être intègre pour ne pas étaler cette faiblesse.

Une fois les préparatifs achevés, Brocéliande fendait le ciel, se hâtant de rejoindre ce nouveau monde qui l'attendait. Heureuse et trépidante, elle s'écrasa sauvagement dans la terre boueuse de Engeldorf.

Grandement sonnée suite à l'impact de la chute, elle frôla l'inconscience de quelques centimètres. En essayant de se redresser, elle sentit une étrange liqueur qui inondait ses vêtements. Soulevant sa tête avec vigueur, elle fit face à un étrange garçon, plus que surpris, qui lui urinait dessus.

Severian, largué devant la folie de ce scénario, était immobile, mais son robinet à eau, lui, continuait de purifier la visiteuse. Brocéliande, prise de court, n'en croyait pas ses yeux. Ce n'était pas de cette façon qu'elle imaginait son premier contact avec la découverte, genre vraiment pas. Pendant qu'elle cherchait encore une réaction appropriée, la fontaine ne tarissait pas.

Quelques minutes plus tard, après avoir donné tout ce qu'il pouvait, Severian remit le robinet fermé à sa place initiale, avant de faire quelques pas légers en arrière. Il se détourna mécaniquement de l'étrangère à qui les mots ne venaient toujours pas.

— C'est un rêve.. Oui.. C'est un rêve.. C'est mathématiquement impossible.. J'ai dû rêver.. Il n'y a pas d'autres explications, tentait de se rassurer Severian en hâtant sa démarche.

Il murmurait des phrases incompréhensibles pour chasser ce cauchemar de sa tête, ce à quoi il venait d'assister était insensé.

— Attendez ! affirma Brocéliande en lui rattrapant fermement les épaules, apposa l'étreinte de ses deux gantelets épais et circulaires, qui lui arrivaient jusqu'à la moitié de ses deux bras, stoppant la retraite du fugitif.

— J'ai besoin de ton aide.. Mon monde est en danger ! reprit-elle déterminée.

— Tu.. Tu es bien réel? questionna Severian incrédule.

— Bien évidemment pardi !.. Je me nomme Brocéliande Alcyone Rose-Epiphanie Edelweiss ! 4ème duchesse de Goldstone ! Enchantée de faire de ta connaissance ! dit-elle solennelle, en serrant la main de son précédent agresseur.

— En.. Enchanté..., répondit Severian qui, malgré lui, envoyait chier la logique. Oui, il ne pouvait faire autrement.. Le pauvre petit.