1 : Miloslav

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Je t'ai connu, Miloslav, à l'une des innombrables facultés de Bruxelles. Dans ce grand établissement, tu n'étais pas un élève et à vrai dire, je n'avais aucune idée de ta fonctionnalité ; tu étais tantôt en train de passer des coups de balais dans quelques salles, ou en plein cours d'art, et encore aux chevilles du professeur de sociologie. Du coup, j'ignorais ton statut et je n'étais pas obnubilée par la découverte de ta véritable activité.

Mais mon amie Rosa, une jolie vietnamienne de vingt-quatre ans, voulait à tout prix savoir qui tu étais ; elle avait en fait un faible pour toi. Pourtant sa timidité était grande et elle n'osait t'approcher. C'était donc moi qui me suit chargée de te parler et de te demander ton numéro de téléphone. Tu étais si flatté ! - notons le fait que de jolies jeunes filles venaient assez rarement à ta rencontre. Vous avez bien sûr discuté, mais soit, tu préférais écrire avec moi. Rosa en était assez jalouse, mais s'est finalement désintéressée de toi, elle s'est ensuite mise en couple avec le délégué des élèves. Ils étaient mignons à croquer.

Nous avons continué de nous côtoyer. Parfois, on s'invitait dans les restaurants bruxellois, on s'organisait pour jouer à des jeux vidéos. Tu m'as ensuite dit que tu avais fini les études et que tu envisageais d'être sculpteur, car tu adorais cela. Du coup, tu passais des journées avec ton oncle - le prof de sociologie - ou tu allais au rangement ne serait-ce que pour prouver au directeur que ta présence n'était point vaine. Tu vivais avec ce dernier pourtant, les vacances, tu les passais chez ton grand-père.

Et puis un jour, tu as changé de style. C'était le bal de fin d'année. D'habitude, lors des fêtes, tu portais un simple jean, une chemise à couleur unique et un gilet. Quelques fois un béret venait orner ta chevelure jaune or, mais c'était tout.

Mais ce jour-là, tu avais porté un costume. Des souliers. Et tu avais attaché tes cheveux en une queue de cheval.

Quelle élégance ! Je m'étais même trouvée laide à tes côtés. Puis nous avions dansé, dansé, et quelqu'un nous a lancé :

Hey, le couple mille couleurs ! Ça s'amourache, hein ?

Mais ce n'était pas une insulte, non. Nous étions réellement un mélange d'origines.

Et nous nous sommes aussi rendus compte d'une chose...



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