Apprends-moi/fan-fiction camren

Partie 13

 Camila

A Cuba, tout le monde possède un bateau, m'a appris Clara. En découvrant le Gold Shark, le voilier familial des cabello-Jauregui, je suis soufflée. L'immense navire est d'une élégance rare et je dois bien reconnaître que là, je partage sans réserve les goûts de mon père. Il est féru de navigation et pilote l'engin lui-même, avec le sérieux dont il ne semble jamais se départir.

Sur le pont, étendue sur une chaise longue, je lis un livre sur la vie dans les grands fonds océaniques, un de mes sujets préférés. L'océan, le clapotis des vagues et le vent léger m'apaisent, et je savoure cet instant de calme relatif, un des premiers depuis longtemps.

Après nous avoir trouvées collés l'une contre l'autre dans l'escalier, Lauren et moi, enfin, surtout moi collée contre sa fille, Clara a été particulièrement dur avec sa fille. Elle lui a resservi le même couplet que j'ai déjà eu l'occasion d'entendre plusieurs fois déjà, lui reprochant d'être égoïste, de faire n'importe quoi, de se mettre en danger de façon inconsidérée sans jamais penser aux conséquences. Elle a terminé la tirade de la mère fâchée en allant jusqu'à se demander ce qu'elle avait fait au ciel pour mériter une fille pareille.

Quelque chose m'échappe. La violence des paroles de Clara est démesurée. Certes, Lauren a fait le mur, mais on ne peut pas lui reprocher d'être irresponsable, loin de là : elle était parfaitement sobre ! Elle a même fait attention à ce que je porte un casque, ridicule certes, et à ce que je revienne en un seul morceau. Et puis, pourquoi Clara s'entête-t-elle à lui parler comme à une adolescente, alors qu'elle est adulte ? Je ne comprends même pas pourquoi elle lui a interdit de sortir.

Lauren n'a pas bronchée, mais j'ai vu une étrange flamme danser dans son regard. Je sens bien que quelque chose la ronge, et je me demande bien ce qu'elle cache. Mais ce n'est certainement pas Lauren qui va me faire des confidences...

Moi en revanche, j'ai fait des belles confidences. Et rien que d'y songer, j'ai envie de me jeter par-dessus bord. Je ne me souviens pas des mots exacts que j'aie prononcés dans l'escalier, mais je sais que j'ai avoué mon trouble. Lauren n'a pas répondu, et c'est sans doute mieux comme ça. Que dire face à des aveux aussi stupides que déplacés ?

A l'évidence, elle voit en moi ce que je lui ai donné à voir : le spectacle grotesque d'une gamine qui a voulu jouer les intéressantes et qui s'est pris les pieds dans le tapis. Et encore, j'ai eu de la chance que Clara ne m'ait pas entendue, sinon je ne serais certainement pas sur ce bateau à me demander ce que sa fille pense de moi, à l'heure qu'il est.

En tout cas, depuis cette soirée, Lauren se tient loin de moi. Ce n'est pas plus mal : ça m'évitera de me consumer de honte en croisant son regard. Et puis, elle oubliera peut-être ce qui s'est passé.

Il est probable qu'elle s'en souvienne toute sa vie ! Et ce sera la seule chose dont elle se souviendra me concernant.

J'en ai pris pour mon grade, moi aussi. Mon père n'a pas été tendre... Il m'a rappelé sur un ton suffisamment glacial pour faire cesser le réchauffement climatique à la surface du globe que j'étais sous leur responsabilité, à Clara et lui. Et si je voulais le rester en clair, si je ne voulais pas me retrouver dehors, je devais me plier à leurs règles et à leur façon de vivre, sans restriction. On ne sort pas en douce et on n'enfreint pas la loi en buvant avant d'avoir l'âge légal ! Il n'a rien ajouté à propos des piercings et des tatouages, mais je suis sûre qu'il était à deux doigts de les ajouter à sa liste.

Le lendemain matin, Clara s'est montrée moins dure avec moi, mais tout aussi ferme : elle comprend que j'aie besoin de décompresser, de me changer les idées, et elle souhaite me voir profiter des vacances, mais elle a insisté sur le fait que je devais faire un effort pour m'intégrer. Et je ne crois pas que tomber dans les bras de sa fille soit considéré comme une façon recevable de resserrer les liens familiaux.