Chapitre 9

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Assise sur une couchette inconfortable, Clarke avait relevé ses genoux contre sa poitrine. Elle avait été jetée dans cette cellule voilà trois jours, et elle n'avait aucune nouvelle de l'extérieur.

Avec un soupir, la jeune femme se déplia. Elle regarda ses mains pensivement, puis leva son visage vers le néon, et son regard dévia sur la caméra de surveillance à qui elle tira la langue.

La serrure lourde porte métallique résonna soudain et le panneau pivota. Clarke se redressa aussitôt.

— Griffin, dit une femme garde. Suis-moi.
— Pourquoi ?
— Ta mère veut te voir.

Clarke déglutit. Elle se leva, chancela légèrement, puis la femme garde lui colla des menottes magnétiques aux poignets avant de la pousser devant elle sans douceur.

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Les deux femmes parcoururent les quelques mètres du couloir principal, au premier étage du quartier carcéral, déployé sur quatre niveaux en fonction des crimes de chacun.

— Entre et assied-toi, grogna la femme garde en poussant soudain la jeune femme sur sa droite.

Clarke trébucha et pénétra dans une pièce spartiate avec une table et deux chaises. Elle s'assit sur les chaises et ses menottes s'aimantèrent aussitôt sur la table avec un bruit sourd.

La femme garde sortit alors en fermant la porte et revint quelques secondes plus tard, précédée par Abby Griffin qui se jeta aussitôt sur sa fille... pour la gifler.

Clarke tourna la tête, accusant le coup, et Abby sembla immédiatement regretter son geste.

— Pardon, mon cœur, dit-elle alors en la prenant dans ses bras. Pardon, je suis désolée...

Clarke baissa le nez et secoua la tête.

— J'imagine que je la méritais, dit-elle. Qu'est-ce que tu fais ici ?
— Je... Chérie, ton père va être jugé demain et...

Clarke serra les mâchoires et renifla. Elle hocha la tête lentement.

— Je pourrais lui dire au revoir ? demanda-t-elle.
— Oui, bien sûr que oui, je...

Abby avala sa salive. Clarke la regarda et pour la première fois depuis bien longtemps, elle la trouva vieillie. Elle avait des cernes sombres sous les yeux, le coin droit de sa bouche tressautait, comme un tic nerveux, et elle semblait s'être peignée très rapidement ce matin-là.

— Maman, je suis désolée, dit alors Clarke. Comment... Comment ça se passe dehors ?
— Comme Thelonius l'avait prédit si ton père avait révélé ce qu'il savait, répondit Abby. C'est la panique. Tout le monde veut des réponses par rapport à ce que tu as dit et qui a déjà été relayé dans toutes les stations. Le Conseil t'en veut énormément, Clarke, ils voulaient avancer ton procès pour haute trahison, mais Thelonius leur a rappelé les lois de l'Arche.

Clarke serra les lèvres. Abby s'assit alors sur la chaise en face de la sienne et posa ses mains sur ses siennes.

— Chérie, je vais intercéder auprès de Thelonius pour qu'il te mette dans la navette qui va être envoyée sur la Terre, dit-elle alors. Le Conseil a décidé qu'il était temps que nous sachions si la Terre est à nouveau viable ou pas, et une navette va être envoyée avec des volontaires. Tu seras volontaire.

Clarke sentit le sang se retirer de son visage.

— Quoi ? Non ! Non, maman, je ne veux pas y aller !
— Tu iras, tu n'as pas ton mot à dire.

Abby se releva alors, raide, et quitta la pièce sans un mot de plus. Clarke l'appela, mais quand la porte se rouvrit, ce fut la femme garde qui apparut, et Clarke se tut aussitôt. La femme la ramena ensuite dans sa cellule, mais Clarke n'était pas d'accord. Elle mit à crier et à protester en tapant contre sa porte, en bourrant le mur de coups de pieds, tant et si bien qu'une vingtaine de minutes plus tard, la porte se rouvrit sur deux hommes qui la saisirent sans ménagement par les bras.

— Lâchez-moi ! hurla-t-elle en se débattant.
— Tu nous gonfles avec tes piaillements de crécerelle ! siffla l'un des hommes. Quelques nuits en isolement ne te feront que du bien !

Clarke se débattit de plus belle, mais les deux gardes avaient de la poigne et ils la trainèrent à l'autre bout de l'étage. Là, ils la jetèrent sans ménagement dans une cellule ronde et sombre, éclairée seulement d'une lueur blafarde venant d'un hublot.

Clarke trébucha et tomba sur les genoux en se blessant les paumes. Elle se releva alors et se jeta sur la porte qui se referma au même moment.

— Personne ne pourra t'entendre, ici ! cria l'un des gardes. On va enfin avoir la paix !

Clarke tapa la porte mais ses coups restèrent sourds. Elle comprit rapidement que la porte était blindée et insonorisée, et elle se sentit alors terriblement seule et triste. Le visage de Bellamy s'imposa dans son esprit et sa gorge se serra.

— Bellamy...

Elle se laissa glisser sur le sol, s'allongea sur le flanc, une main sous la tête, et soupira. Son regard rencontra alors ce qui éclairait sa cellule : la Terre, bien visible dans le hublot rond. Clarke se releva alors s'approcha. Le hublot était bien plus haut qu'elle, même en sautant elle ne pouvait pas s'accrocher au rebord. Elle se contenta donc de regarder sa prochaine destination, à en croire sa mère, en laissant couler des larmes amères sur son visage.

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Le lendemain, Clarke fut extraite sans douceur de sa cellule, à midi, et ce fut sous escorte qu'elle rejoignit sa mère et son père devant les sas d'expulsion des déchets. La jeune femme sauta immédiatement dans les bras de son père qui la serra contre lui en s'excusant. Il lui pardonna également d'avoir été stupide, puis un médecin les sépara et tira Jake en arrière alors qu'il embrassait Abby une dernière fois. Lorsque le sas se referma sur Jake, Clarke se glissa dans les bras de sa mère, et l'homme les regarda avec un sourire en leur faisant un signe de la main. Le second sas dans son dos fut alors ouvert, et tout l'air et le contenu de la zone furent évacués dans l'espace. Abby tourna la tête, mais Clarke regarda son père s'éloigner de l'Arche en flottant, les bras devant lui. La mort survenait en quelques minutes dans l'espace à cause du froid, il n'allait probablement pas souffrir, mais Clarke serra les mâchoires en réalisant que depuis un siècle, des milliers de personnes avaient été expulsées de cette manière par des Conseillers peu regardant sur la préciosité de la vie humaine.

— Allez, dit soudain un garde. On y va, Griffin.

Clarke le regarda et Abby l'enlaça alors. Elle l'embrassa sur les cheveux puis la laissa partir en serrant une chaine à son cou, où elle avait passé l'alliance de Jake.

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