Sélène - IX

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Le Passereau se penche comme pour voir si le monde est encore beau vu d'en haut. Il ouvre subitement la bouche, emplit de joie. Son coeur se gonfle et ses battement vifs reprennent joyeusement dans sa poitrine.

Sélène se mit brutalement à gémir :

« — Ton ardeur m'insupporte. »

Alors, le passereau s'envole, sans crier gare, marmonnant ses frayeurs.

« — Non ! Attend ! »

Les yeux de Sélène se voilent, et fatalement la mort s'approche d'elle afin de la consoler.

« — Les Alcyons sont là, tout proche... Ils viennent me taquiner, me calciner de leurs ailes noires. Chronos s'aventure dans mon âme, suivit de Cerbère. Maudits soient-ils, eux et leurs illusions silencieuses. »

Sélène s'allonge doucement et la peur s'engouffre dans le coeur d'Hélène.

« — Mon âme souffre de tendresses incomprises. Il meurt, je le sens qui se vide. L'horloge que fait tourner ces trois ingrates me tourmente... La rage, la colère. Un désespoir m'étreint Oisillon... Qui suis-je ? Une pauvre plainte lascive et solennelle. Un suffoquement se régit dans ma gorge, je le sens. Dis-moi pourquoi... Parle-moi ou je deviendrais folle. »

Les bras ballants, elle respire lentement.

« — Oui, envole-toi... »

Elle se redresse.

« — T'étais-tu déjà envolé si loin de moi ? »

Elle regarde vers le ciel, la tête en arrière, un sanglot étouffé se brise dans sa gorge.

« — Tu es loin maintenant, je ne devrais plus penser à toi. Tu n'es plus qu'un misérable brouillard, une cavité qui s'ouvre en me déchirant toute entière. Tu t'assembles à la grotte dont parle Baudelaire dans ce vieux poème - un souvenir de ma jeunesse, petit Oiseaux. Pardonne-moi s'il te plaît, mon esprit s'abîme. J'aurais voulu avoir le cran de te garder. »

Éclosion pyromane.

Sélène s'essuie rageusement les yeux. La mort n'efface pas  la souffrance. Son âme restera dans les tourments abyssales auquel elle s'abandonne en visionnant ses réminiscences cruelles et en y laissant mourir son existence.

« — Folle assidue, parle moi de toi, de moi, de mon existence assidue. La mort est proche, conséquence de ma lassitude, je ferme la porte de mon existence. Je te laisse. Vit. Pour moi, au moins encore une fois. »

Elle s'éteignit alors comme le tableau de Millais, simplement endormie sous les regards de la Nature, baignée sur ses pensées, tel un esprit maladif et seul.

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