Chapitre 6

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Bien sûr tout ça n'est rien pour certaines personnes, pour des gens comme Lucas et Nathan qui ont déjà eu beaucoup de relations mais pour moi ce moment c'était quelques choses. Comment ne rien ressentir ? C'était absolument le moment le plus intense de toute ma vie. Mais je ne ressens rien pour lui, voilà une chose dont je suis sûre. Je passe un doigt sur mes lèvres en fronçant les sourcils. Je ne suis pas gay. J'ai juste été curieux ? Oui c'est ça. Juste curieux alors j'ai répondu à son baiser la première fois mais ça ne voulait rien dire. Toute ma vie ne repose pas sur quelques microsecondes pendant lesquelles je l'aurais embrassé en retour. Non. Je ne suis pas gay.

Je regarde le plafond. Cette fois ce n'est pas celui de la chambre de Lou mais celui du salon. J'ai préféré dormir ici plutôt qu'en haut. J'ai peur que Lucas m'en veuille, j'ai peur de l'avoir vexé.

Il est cinq heures du matin, cela fait une heure que je réfléchie à ça. Je ne veux surtout pas le perdre. Il est l'un de mes meilleurs amis et compte énormément pour moi. Je ne veux pas être la cause de ma propre destruction. Et s'il ne voulait plus être mon ami ? Et si petit à petit j'étais effacé du groupe ? Après tout je me suis toujours senti un peu de trop alors ce n'est pas infaisable. Sans moi ils restent les mêmes. Je ne sers pas à grand-chose sur cette terre peuplée de petits gens super intéressants et utiles.

Les cours dans trois heures ça va être la joie incarnée...

Je savais que cette journée n'allait pas être parfaite, aucune ne l'est, et surtout pas celle-ci.

Mon rêve serait de m'enterrer profondément, très profondément. Je voudrais être loin de tout ça. Loin de ma famille qui va finir par me rendre fou tellement je dois cacher ma personnalité pour leur plaire. Loin de ma propre personnalité d'insociable professionnel. Loin de mes envies folles d'exploser et de tout envoyer en l'air. Loin de mes problèmes ici avec Lucas. Loin du bonheur évident de mon frère Mike qui semble un peu plus grandissant chaque jour. C'est cool pour lui bien sûr mais ça ne fait que me rappeler que moi j'ai rien de tout ce qu'il a.

Je ne suis pas parfait. Je suis timide, pessimiste, sensible, insolent et j'ai un humour douteux, très douteux, qui n'est d'ailleurs compris par personne. Je me sens seul. Mes démons m'envahissent lorsque je ne suis pas avec mes amis. Comment pourrais-je faire si je ne les avais plus ? Serait-il si compliqué qu'un jour je sois heureux ? Juste un jour entier. Ce jour-là, même le soir lorsque je serais dans mon lit je voudrais garder mon sourire. Je voudrais un seul jour ressentir ce qu'on appelle si communément le bonheur.

Mon téléphone sonne tout à coup et je décroche. C'est Lucie.

- Roméo ?

Elle chuchote.

- Oui c'est moi. Qu'est-ce qu'il y a ?

- J'ai... Je euh... J'ai besoin de toi. Il y a des gars qui me suivent depuis tout à l'heure. Roméo j'ai peur. Je suis au niveau du supermarché à côté de chez Lou. Venez me chercher.

J'entends sa voix tressauter, elle pleure.

- On arrive Lucie, reste où tu es.

Je cours le plus vite possible à l'étage et réveille tout le monde.

- RÉVEILLEZ-VOUS ! LUCIE A BESOIN DE NOUS, ON Y VA.

Nathan et Lou qui étaient dans le même lit se réveillent d'un sursaut alors que Lucas est déjà sur pied. Nous descendons tous rapidement les escaliers, enfilons nos chaussures à une vitesse folle et je cours le plus vite possible vers le supermarché. Elle est en danger. Elle a besoin de moi. Elle m'a appelé, moi.

Pour une fois je me sens utile.

Je cours à en perdre mon souffle. Lorsqu'enfin j'arrive devant ce supermarché je la cherche partout mais rien ne bouge ici. J'attrape mon téléphone et avant même que mon portable commence à appeler Lucie, j'entends un cri strident qui m'arrache le cœur.

Lucie.

Mes amis sur mes talons, je m'élance vers le parking arrière du supermarché, là où nous étions plus tôt dans la soirée, là où j'ai pu faire la plupart de mes conneries. Elle est là-bas, j'en ai aucuns doutes.

- LUCIE !!! LUCIE ??! J'ARRIVE !

Je me déchire les poumons. Passé le bâtiment massif je l'aperçois, je les aperçois. Une bande de gars se tiennent devant elle, ils l'entourent. Elle au sol, écroulée, alors qu'eux la frappent.

- ARRÊTEZ !!

Je cours jusqu'à eux comme un con. Ils sont trois. Où sont encore passés mes amis sérieux ?! Sans que je n'aie eu moi-même le temps de réfléchir à une tactique, j'écrase mon poing sur le premier venu. Mince et fin comme je suis mon coup n'a pas beaucoup d'effet pour un balaise comme lui... Je n'attends pas qu'il réagisse et lui en remets le plus possible avant qu'il ne m'attrape par la taille et me jette par terre.

- Qu'est-ce que tu veux tapette ?

Je passe ma main sur mon nez ensanglanté et me relève d'un bond.

- Ne la touchez pas.

- Ah oui ? Et tu es qui au juste ?

Il s'approche de moi et je m'apprête à tout moment à devoir rejouer des poings.

- Je suis son frère connard.

Avant que mon poing n'atteigne sa mâchoire, il s'écroule sur le sol et je découvre derrière lui ma meilleure amie avec une poêle à la main.

Elle me fait un clin d'œil et se jette sur un autre avec l'aide de Nathan. Lucas s'occupe du dernier. Enfin ils sont arrivés. Lucas est assez fort pour s'en sortir seul face à ce gars alors je me jette aux côtés de Lucie.

- Roméo...

Elle gémit de douleurs, je ne l'ai jamais vu dans cet état. Son visage est baigné de larmes, son corps est parsemé d'hématomes, ses lèvres sont en sang, et son chemisier est arraché.

Je retire rapidement mon t-shirt pour lui donner n'ayant pas eu le temps de mettre de veste. Je lui enfile doucement et la prends dans mes bras. Ma tête sur la sienne, je la rassure. Lorsqu'elle se décolle de moi, les gars en ont fini avec les trois voyous.

- On a appelé la police, ils devraient arriver.

Je hoche la tête et reprends dans mes bras ma sœur qui tremble comme jamais elle n'avait encore tremblé. La voir comme ça me détruit. Elle semble anéantie, comme vidée d'énergie, vidée de toute sa joie de vivre.

La police ne tarde pas à arriver et embarque les trois individus. Par chance elle ne contrôle pas notre taux d'alcoolémie et de drogue dans le sang.

Une ambulance arrive aussi et nous accompagnons Lucie. J'appelle aussi mes parents pour qu'ils viennent au plus vite.

J'ai l'impression de vivre la scène avec un deuxième point de vue. Un point de vue qui ne ressent rien et ne fais qu'observer. J'ai souvent cette impression, l'impression d'être l'observateur de ce monde bâtit dans le chao.

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Rebonjourrrrr! Voilà un autre petit chapitre. Qu'en pensez-vous?

Bonne semaine à vous!

- A

CharlieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant