Je l'attends. Assise sur ce banc dont le bois est gravé de centaines de messages d'amoureux du genre « J + L = forever », je patiente. La nuit est fraîche pour un début d'été. J'aurai dû prendre une veste, mais je suis sortie sur un coup de tête. Je n'y ai pas pensé.
Mes pas m'ont menée jusqu'ici, sans difficulté. J'ai retrouvé le chemin, la bonne allée, comme si tout ça datait d'hier. Ou peut-être était-ce mon cœur qui me guidait ? Ce cœur qui n'oublie rien, le bon comme le mauvais. Un cœur a sa propre mémoire, non ?
En me rendant ici, je réalisais que c'était probablement ma dernière chance. Mon dernier espoir. Si je dois le retrouver, ce sera ici. Dans ce parc, sur ce banc, à quelques mètres à peine de l'endroit où je l'ai vu pour la première fois.
Je trépigne et redoute, tout à la fois. S'il vient, à la joie de le voir se mêlera l'appréhension des mots qu'il va formuler. Oui, je sais déjà ce qu'il va me dire. Il ne me prendra pas par surprise ou en traître. Le contrat était clair. N'empêche. J'ai mal. Une douleur intense enserre ma poitrine.
Une brise se lève drainant avec elle une odeur appétissante de pizza. Mon estomac gargouille, j'ai oublié de manger. De toute la journée. Quand je me suis levée et qu'il n'était pas à mes côtés, j'ai su. Une boule s'est alors formée dans ma gorge et je n'ai rien pu avaler. Après avoir tourné et viré à l'appartement, sans parvenir à réfléchir convenablement, j'avais eu l'illumination. Il serait au parc !
J'avais imaginé qu'il serait allongé dans l'herbe, avec son sourire espiègle rivé aux lèvres. J'avais presque couru en arrivant au grand chêne, et puis je m'étais ravisée. Ce serait lui faire trop d'honneur, il m'avait quand même fait mariner douze heures, sans me donner la moindre nouvelle, le moindre indice. Quand j'avais découvert qu'il ne se trouvait ni sur la pelouse, ni à l'aire de jeu et nulle part autour du banc, mes jambes avaient un peu flanché.
Alors, je me suis assise et depuis je scrute les ténèbres au-delà du halo lumineux du réverbère. Je tends l'oreille, à l'affut du moindre bruit. J'ai froid.
Pas âme qui vive. A cette heure, rien d'étonnant. Le vent forcit, me rabattant les cheveux sur le visage. Je les laisse, comme ça, s'il surgit maintenant, il ne verra pas mes larmes.
Je l'attends. Viendra-t-il ?
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Look beyond
Short StoryUne nuit de juillet. Un parc désert. Joséphine ne devrait pas se trouver là, et pourtant elle est venue. Pour l'attendre. Lui parler, peut-être, et lui demander de se projeter... De voir plus loin que les barrières qu'il imagine. L'amour de Joséphin...