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À cette voix, mes yeux s'entrouvrirent de surprise. Le premier visage que je pus distinguer était Yves, se penchant sur moi puis sur Rebecca à mes côtés. Tentant de voir si elle allait bien, je tournai la tête vers elle. Je pus voir plus loin des pompiers commençant à s'affairer, et la femme que j'avais aidée en train de me fixer avec un sourire rassuré. Ah, c'était donc grâce à elle que les pompiers étaient arrivés si rapidement. Je l'aurais bien remerciée si j'avais eu la tête à ça. Une main me força à tourner la tête à nouveau sur la gauche, et je soufflai.

« Patxi ?
- Tu te souviens de moi, c'est déjà ça.
- Je ne me suis pas pris de coup sur la tête, monsieur le génie.
- Tes pupilles sont beaucoup trop dilatées pourtant. »

Je poussai un profond soupir, puis dans un élan je me redressai, finissant assise. Je papillonnai des yeux, avant de tourner la tête vers Patxi, un sourire vague aux lèvres. Je passai ma main dans mes cheveux, et Patxi se redressa pour se concentrer sur Rebecca à mes côtés. Cependant, elle fut rapidement prise en charge par des pompiers, il revint donc à moi, observé de près par Yves.

« Qu'est-ce que tu fais là ?
- Je travaillais à l'agence de tourisme juste à côté aujourd'hui, et j'ai entendu beaucoup de bruit... Quand je suis sorti, j'ai eu l'impression de voir un autre monde. Tout est sens dessus dessous... »

Je hochai silencieusement la tête. C'est vrai que la vision que j'avais actuellement était alors totalement différente que celle que j'avais jusqu'à présent, ce matin encore, de notre petite ville tranquille, sans encombres. Un bâtiment était écroulé, déclenchant par le biais du vent des incendies un peu partout. Je voyais des gens, courir dans tous les sens pour les plus chanceux, horrifiés. Et pour les moins chanceux, je les voyais allongés par terre. Je n'avais aucune idée s'il étaient encore en vie, mais les pompiers s'affairaient autour, séparés en plusieurs petites équipes. Je tournai la tête vers Rebecca. Des pompiers semblaient la prendre en charge, scandant d'un bout à l'autre du parking ; côtes fêlées, tibia fracturé, bassin écrasé... Mais elle allait sûrement s'en sortir.
Lorsqu'un jeune pompier passa à côté de nous, Patxi l'apostropha, se relevant.

« Cette jeune fille est blessée aux bras, il faudrait lui administrer des soins. »

L'homme me jeta un coup d'œil, détaillant mes bras ensanglantés et mes mains écorchées. Il fit un mouvement négatif de la tête. Je passai mes doigts sur mes joues, retirant la poussière et la sueur qui s'y mélangeaient.

« Nous ne pouvons nous occuper que des urgences. Désolé monsieur, mais la vie de cette jeune fille n'est pas en danger, essayez de nettoyer cela avec du désinfectant. Nous avons d'autres vies plus délicates à sauver.
- Mais enfin... ! Commença Yves, et je le sentais prêt à se monter en l'air.
- C'est bon, c'est pas grave, je vais prendre le bus et me soigner chez moi.
- Les bus sont déviés ou annulés et fouillés. Plus aucun moyen de transport, sauf personnel, ne peut sortir ou entrer dans la ville. Il va falloir trouver un autre moyen, demoiselle.
- C'est bon, je te ramène. »

Je levai la tête vers Patxi, qui fixait mes bras, un peu agacé. Je me levai, jetant un coup d'œil à Rebecca qui était emmenée en brancard jusqu'au camion. Je fis un rapide au revoir de la main à Yves, qui me fixait d'un regard inquiet, puis me tournai vers Patxi. Je voulais partir rapidement, afin de fuir cette vision, me soigner, rentrer voir mon père et éviter qu'Yves ne tente de me retenir. Patxi et moi traversâmes plusieurs parkings, et j'en profitai pour observer autour de moi. Effectivement, la ville semblait à feu et à sang ; des ruines couvraient le sol, envahi de gravats. Plusieurs structures étaient détruites, et des feux se propageaient sur le sol rapidement. Je pouvais voir de grandes colonnes de fumée striant le ciel, le métamorphosant en un puzzle ocre. Je pressai le pas, me rapprochant de Patxi, sentant une boule se former dans mon ventre. Il fallait que j'envoie un message à Léo. Je savais Aly et Kristy en sécurité au village, mais je n'avais pas de nouvelles de mon ami depuis hier soir. Il vivait dans cette ville, il devait donc forcément être au courant de ce qui était en train de se passer.
Patxi ouvrit le coffre de sa voiture, puis me le désigna du doigt. Je le détaillai en silence. Il était remarquablement propre, ce qui ne me surprenait qu'à peine maintenant que je connaissais Patxi. Il était plus que maniaque. Tout était curé, son sac était rangé dans un coin, et le tapis de sol était épousseté. La carrosserie était magnifique.

Paris DévastéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant