Rencontre (XII)

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Nous étions au mois de mai. J'avais passé les vacances d'avril à réviser mes partiels de fin d'année. Contrairement à celles du premier semestre, mes révisions s'étaient déroulées sainement. J'allais toujours aussi souvent chez Yugyeom et quand je n'y étais pas, Eunha venait me tenir compagnie. Ça faisait toute la différence.

Elle débarquait avec un sac de courses, elle remplissait mon frigo et elle se déshabillait toujours pour enfiler un de mes t-shirts. Les premières fois, elle s'était changée dans la salle de bain. Mais un jour, -j'étais couché sur mon lit, le nez dans mes fiches bristol- elle avait choisi de déboutonner son jean et de le faire glisser juste devant moi.

Face à ma moue de poisson mort, elle avait ri et haussé les épaules. "C'est ridicule que j'aille me cacher alors que tu m'as déjà vue toute nue. Et puis, c'est comme si j'étais en maillot de bain."

Elle n'avait pas tort. J'avais retracé des yeux les courbes de ses seins et de ses hanches, pour finir sur le point d'ombre de son nombril. Bon sang, ce que je pouvais l'aimer !

Et je n'avais plus le droit de la toucher.

Enfin, si, mais plus comme avant. Plus le droit de poser ma bouche sur la sienne. Plus le droit d'embrasser ses deux petits seins ou de mordre ses fesses, plus le droit d'effleurer ses cuisses et d'en goûter l'intérieur. Plus le droit de me fondre en elle et de la laisser m'enserrer jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce qu'elle crie mon nom. Plus le droit de m'étendre avec elle et de lui tenir la main en cherchant mon souffle.

Elle me manquait.

Quand elle était là, elle me laissait travailler, elle était sage. Elle lisait et elle faisait à manger. Nous ne parlions presque pas. Lorsque je poussais mes livres pour faire une pause, elle venait s'installer contre moi et je la tenais dans mes bras. Je la voyais regarder mes lèvres et il m'arrivait de m'enhardir assez pour caresser sa nuque ou sa jambe. Elle frémissait. Elle se retenait. Moi aussi.

Je l'aidais à protéger sa relation avec Taehyung. Elle n'en démordait pas et je trouvais ça insensé. "Je veux que ça marche. Je veux me prouver que j'en suis capable. Je ne veux pas le blesser, tu vois." Je voyais très bien. Elle me blessait moi. 

Elle en était désolé, c'était ça le comble. Moi, comme elle disait, j'étais habitué, tandis que Taehyung était incapable de la partager. "Ça lui ferait trop mal. Il n'est pas comme toi."

Je n'étais pas comme ça non plus. J'étais simplement devenu ce qu'elle attendait de moi. Je l'avais rencontré si jeune ; avais-je eu le choix ? Comment ne pas plier à ses exigences, ou résister à ses caprices ? Qu'aurais-je eu à lui opposer ? 

Une nuit, pendant que je rentrais d'une énième soirée de la MDL, j'avais envoyé le sms fatidique.

 "J'ai envie de toi."

Constatant l'absence de réponse et l'alcool aidant, j'avais recommencé au bout de quelques minutes. Peut-être que le cirque habituel d'Hoseok et Yoongi-hyung m'avait chauffé plus que d'habitude ce soir-là.

"Noona, je deviens dingue. Quand t'es venue sur mes genoux mercredi, j'ai cru que j'allais te renverser sur le lit et merde pour Taehyung. J'ai horriblement envie de craquer. J'ai horriblement envie de te faire l'amour."

Elle m'avait appelé. Nous avions discuté sur le chemin, puis longtemps après que j'ai regagné mon appartement.

Nous n'étions heureux ni l'un ni l'autre. Pourtant, nous voulions continuer de nous voir. Sans nos visites régulières, nous allions dépérir comme au début de l'hiver. Si nous ne pouvions espérer mieux que ces petits rendez-vous platoniques, il fallait nous en contenter. On s'était dit je t'aime. Elle avait failli pleurer. De soulagement ou de tristesse, je n'avais pas bien compris. Elle était seule chez elle et j'étais seul chez moi. Nous ne devions pas nous rejoindre, sous peine de faire ce qu'elle appelait "une bêtise".

Quand la nuit tombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant