Paris, Orphelinat St-Sulpice, 1888.
— « Répète morveux ! », notre gouvernante le corrigea.
Elle venait de le frapper avec sa cravache. Cette femme me dégoûtait toujours autant, ivre comme elle était. Je comprenais mieux pourquoi elle n'avait pas d'enfant.
— « Tu sais quoi ? Puisque je peux me passer d'alcool, tu peux te passer de manger aujourd'hui ! Si j'ai le malheur de te voir te plaindre de la faim ou de la soif, ou pire te voir fouiner dans la cuisine, tu n'imagines même pas l'horreur que je te ferai subir ! »
— « Oui, Madame Blachère. »
La réponse était prononcée en sanglots, avec une trace rouge sur la joue. Pauvre Noé.
— « Vous autres au p'tit dèj' ! Sinon ce sera la même, bande de feignasses ! »
— « Lana ! Faut qu'on y aille ! Lilian et moi attendons ! Et je garde un mauvais souvenir de « Betty », sa cravache qu'elle avait pris le temps de nommer, alors si tu pouvais te dépêcher ! »
— « J'arrive Cerise ! »
Cerise n'était pas ma meilleure amie pour rien. Une petite rouquine malicieuse toujours prête à aider ! Tandis que Lilian avait un an de plus que nous, bien qu'il soit toujours un gamin !
— « Alana, tu m'écoutes ? »
— « Désolé, Lil j'étais perdue dans mes pensées. »
— « A quoi tu pensais ? »
— « A vous, le fait qu'on soit amis. »
— « Comme c'est mignon ! », répondit-il ironiquement.
— « Oh ça va ! »
On éclata de rire puis on finit de manger notre porridge.
— « Salut, le crasseux ! »
— « Encore toi ? Laisse-moi tranquille, Canaille », vociféra Lilian, prêt à déverser tout son venin sur le nouvel arrivant.
— « Oh ! C'est qu'il a les chocottes le crasseux ! »
Oliver Wood, ou comme on aimait le surnommer Canaille était un être des plus vicieux. Il détestait la plupart des pensionnaires, en particulier Lilian, et leur cherchait des ennuis. Jamais séparé de ces complices Alistair, Adriel et Alexandro Thomas, les Triplés.
Il avait le même âge que Lilian, c'est-à-dire environ seize ans, mais était bien plus stupide. Ce petit sacripant adorait m'appeler « Princesse ». Bien évidemment, je détestais ce sobriquet. Et puis il ne se gênait pas non plus pour me faire un clin d'œil lorsqu'il utilisait ce dit surnom.
— « Laisse-le, Oliver ! »
— « Oh ! Princesse, je ne t'avais pas vue ! Les gars, on y va ! Au plaisir de te revoir ! », dit-il en m'offrant un baise-main.
Après qu'il se soit éloigné, j'essuyai ma main sur ma robe comme si Oliver était porteur de la peste. Lilian sourit avec toutes ces dents.
— « J'aimerai avoir le droit de te prendre comme un bouclier contre cet imbécile ! »
— Jamais de la vie ! Il pourrait tenter de m'embrasser ! Je ne suis pas désespérée, et n'ai pas très envie de devenir aussi ignoble, je suis persuadée que c'est contagieux. »
On partit d'un rire franc, débarrassa et partit à nos cours respectifs. Je me retrouvai avec Mademoiselle Dulsé, elle nous enseignait les bonnes manières pour devenir des femmes accomplies de la société. Je l'aimais beaucoup et c'était réciproque, nous étions toutes heureuses de l'avoir et sérieuses lors de notre apprentissage.
Les garçons, eux, avaient Monsieur Dubois, il leur apprenait les ficelles des métiers de l'artisanat tels que ramoneur...etc. Je savais que Lilian avait pour but de devenir cordonnier, comme son père. J'espérais qu'il y parviendrait. Il ne me racontait pas souvent ses journées de classe mais il avait sans doute ses raisons. Après les cours, on s'occupa du ménage de l'orphelinat jusqu'à 22h, quelle besogne ! Enfin, exténués, on alla au lit pour nous réveiller à l'aube comme chaque matin.
Mais avant de dormir, en compagnie de Lilian et Cerise, on alla voir Mistigri, mon petit chaton tigré pour lui donner à manger et jouer avec lui. Je l'ai recueilli quand j'avais cinq ans, il était tout petit et tellement mignon, alors je l'ai adopté en cachette. Il était 23h quand on alla se coucher sans faire de bruit, Cerise et moi dans le dortoir des filles et Lilian dans celui des garçons, mais nous ne savions pas que dans le noir Oliver nous observait, avec un regard tellement haineux envers Lilian que si ses yeux étaient des armes, ce dernier serait déjà mort, gisant sur le sol.
— « Qu'est-ce qu'elle lui trouve... Qu'est-ce qu'elle lui trouve... », marmonnait-il rageusement.
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N.D.A: Et voilà ce premier chapitre ! Un peu court peut-être, mais voilà les débuts de cette histoire ! :-) J'espère que ça vous plaira ! :-)
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La Lune est le rêve du Soleil
Historical FictionToujours ce même rêve, qui se répète chaque nuit. Ce rêve qui a deux faces, un merveilleux, doux, tendre...Et un maudit, cruel et exécrable. Cette seconde parcelle prend le dessus toutes les nuits, où devrais-je dire, toutes les fois où les ténèbres...