Les minutes s'écroulaient lentement et les arbres laissaient s'en aller leurs pétales clairs à travers la prairie campagnarde. Les nuages fondaient dans le ciel grisâtre pour disparaître avec la brise crépusculaire. La tête de la jeune femme était plaquée contre la vitre du train, son reflet pouvait laisser apparaître un visage entouré par des cernes noirâtres. Ses cheveux sombres étaient attachés en un chignon défait qu'elle avait machinalement fait en réfléchissant à sa vie sous le bruit ferroviaire du train fonçant à travers le pays.
À quoi pouvait-elle penser ? À la tournure insensée qu'avait prise son existence ce soir-là, au vecteur des choses, et au destin qui la fuyait. Son esprit fatigué n'était rempli que par des pensées maussades à la longueur de journées, des questions ubiquistes, et puis lui.
Les banquettes annonçaient différentes couleurs aux venus variées des passants. Les sièges autour d'elle se vidaient peu à peu et les wagons frissonnaient à chaque passage. Ses yeux papillonnaient de désarroi et les poils sur ses bras se dressaient à en former une barrière indestructible. Ses doigts crispés s'enfonçaient dans son vieux jean et transperçaient sa chaire moite pendant que le théâtre de la vie jouait farouchement de ses figurants. Son souffle s'accélérait, son cœur palpitait et le sang bouillonnait dans ses veines. Elle tremblait de peur. Elle avait besoin de lui pour combler ce vide, sauf qu'il n'était plus là.
Ses frémissements impossibles à contrôler élevaient des bouillonnements dans l'entièreté de son cadavre dénué de sens. Il n'y avait aucun doute là-dessus, elle se sentait mourir à petit feu sous l'écho sourd du véhicule en route. C'était simplement la banalité du monde, l'ordinaire d'un tas de personnes, et sans ce grain indispensable qui alimentait quotidiennement son être, elle en était terriblement angoissée.

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Océane
Short StoryLa romance tragique d'un homme amoureux en quête d'indulgence et d'une femme vouée à sa perte portant le nom maudit de l'océan.