L'oiseau voletait à tire d'ailes dans le printemps naissant. Sous un jeune soleil de début de matinée, il volait vers où ses ailes voulaient bien le porter. Il avait faim et là-bas, dans son nid, ses oisillons criaient famine. Il se laissa porter par un courant d'air chaud, ses petits yeux perçants fouillant le sol à la recherche d'un quelconque insecte à se mettre sous le bec.
Soudain, il l'aperçut. Un tout petit vers qui pointait sa tête -ou sa queue- hors de son trou. Il plongea en piqué sur sa proie.
*
Zouiiik...Tchack. Dans le mile ! Sa première proie vivante ! Et dire qu'elle s'était levée aux aurores en espérant qu'il y aurait plus de petits animaux de sortie dans ces sous-bois ! Mauvais calcul. En réalité, il lui avait fallut attendre jusqu'à huit heures pour apercevoir son premier animal. Et une heure plus tard, sa première -et dernière - proie de la matinée : cet oiseau.
Sa flèche lui avait transpercé l'abdomen d'un bruit mat, se figeant dans sa chair aussi facilement qu'elle fendait l'air.
Presque aussitôt, un bruit de chute sur les feuilles mortes lui apprit qu'il était retombé à quelques pas de là, dans un proche bosquet. Elle saisit entre ses mains le petit corps encore chaud mais sans vie de l'ovipare et en dégagea la flèche d'un coup sec, notant au passage que son empannage de plumes d'aigle était abimé. Encore une flèche qui ne volerait plus jamais droit ! Elle la jeta donc à terre, n'ayant que faire d'une flèche inutilisable. L'oiseau la rejoignit bientôt, les gardiennes de l'orphelinat n'en voudraient jamais dans leur établissement. À cette soudaine pensée, elle tressaillit et jeta aussitôt un coup d'œil à sa montre : neuf heures et quart. Aïe. Si elle avait voulu rentrer discrètement sans se faire remarquer, c'était foutu.
Pour bien faire, il lui aurait fallu rentrer au moins deux heures plus tôt. À cette heure-ci, elle était normalement attablée devant le petit-déjeuner dominical, en écoutant Mlle Martyse se plaindre. D'elle, généralement. La jeune fille soupira : avec son retard, elle était justement en train de donner de l'eau à son moulin. Mlle Martyse ne manquait en effet jamais une occasion de déplorer son manque d'éducation et la clémence de la directrice, qui la gardait dans son établissement. En effet, à quinze ans, elle était la seule préadolescente de l'orphelinat, conçu pour les bébés et les très jeunes enfants. Mais, par une malencontreuse erreur administrative, la jeune fille était officiellement non-adoptable. Aussi, lorsqu'elle avait dépassé l'âge limite pour rester à l'orphelinat, embarrassés, ils l'avaient tout de même gardée - une charité regrettable, d'après Mlle Martyse.
En réalité, il y avait bien longtemps qu'elle savait que quelqu'un versait une pension pour son entretien -ce qu'elle avait appris en fouillant dans les dossiers du bureau de la directrice. Mais malgré toute son implication, elle n'avait jamais pu trouver trace de l'identité de ce mystérieux donateur. Donateur qui, au passage, s'avérait plus que généreux.
Punition pour punition, la jeune brune décida de flâner dans les bois quelques instants encore. Les rayons d'or du soleil matinal rendaient les sous-bois émeraude féériques, comme dans les contes de légende. L'herbe se couchait sans bruit sous ses pas, tandis qu'elle prenait conscience de toute la vie qui l'entourait. Les feuilles bruissaient au dessus de sa tête, la faune furetait dans les fourrés et les oiseaux pépiaient dans les cimes lointaines. Elle s'assit sur une vieille souche qu'elle identifia immédiatement comme celle d'un chêne, et caressa du bout de ses longs doigts effilés les fragiles feuilles d'un proche châtaignier aux branches ployantes. Les yeux fermés, sa poitrine se soulevait régulièrement au rythme de ses profondes inspirations. Dans cette forêt à l'atmosphère ouatée, nul vrombissement de voiture, nul klaxon ne venait rompre l'harmonie auditive de la nature.
Soudain, elle sursauta. Un aboiement venait de briser en éclat la quiétude des lieux. Elle fronça les sourcils et sonda les sous-bois du regard, soudainement tendue, focalisée sous les bruits de la futaie. Qui donc pouvait bien s'aventurer dans sa forêt ? Il ne fallait surtout pas qu'on la surprenne ici, ou sinon elle pouvait dire définitivement adieu à ses petites sorties en solitaire.
Sachant que s'ils la prenaient en chasse, les chiens n'auraient aucun mal à la rattraper, la jeune fille se hissa lestement dans le châtaignier touffu dont elle caressait le feuillage encore quelques instants auparavant. Des hommes en tenue couleur treillis et accompagnés de lévriers à poils ras pénétrèrent dans son champs de vision, arborant de gros fusils en bandoulière.
Se mordillant la lèvre inférieure, elle se maudit intérieurement. Mais bien sûr grosse nouille ! 25 avril. La date est écrite en énorme sur ton calendrier depuis des semaines. Des semaines ! 25 avril : ouverture de la chasse.
Elle gigota afin de se caler sur sa branche. Maintenant, elle allait devoir rester perchée dans cet arbre jusqu'à ce qu'ils partent. Et s'abstenir du moindre mouvement. Pour peu que ces gars soient un peu sensibles de la cachettes, ils pourraient bien lui tirer dessus au moindre mouvement de branchages ! La moue boudeuse et le front plissé de contrariété, elle s'apprêta donc à poireauter dans son abri provisoire jusqu'à l'heure du déjeuner, ou du moins jusqu'à ce que ces abrutis dégagent. L'absence de petit-déjeuner commençait à se faire cruellement sentir et son estomac gargouilla. Elle laissait son regard errer mollement sur les branches, quand une idée subite lui traversa l'esprit. Non loin de là, un petit bouleau paraissait lui tendre ses branches en secours. Les chasseurs lui tournaient le dos. Sans plus réfléchir, elle en profita. D'un bond elle fut dans l'accueillant feuillu, puis sonda la forêt du regard dans l'espoir d'apercevoir un autre perchoir aussi tentant. A un mètre de là se dressait un orme solitaire, ses bras bourgeonnants tendus vers le ciel. Oui, cela devait être jouable. Plus difficile, certes, mais jouable. Elle me mis debout en équilibre sur une fine branche qui ploya légèrement sous son poids. Un bref coup d'œil vers le sol lui appris que les hommes attachaient leurs chiens, sûrement avec l'intention de faire une pause bien méritée. Parfait. Ses pieds se tendirent et elle sautais, s'arc-boutant dans les airs. Ses mains effleurèrent l'écorce rugueuse et s'y agrippèrent. D'un brusque rétablissement, elle s'assit à califourchon sur cet abri provisoire, s'autorisant un petit soupir victorieux. C'est alors qu'un puissant cri de surprise retentit.
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Premier chapitre !!
Pour être honnête, à l'origine, l'histoire était écrite à la première personne. Mais en la reprenant, il m'a semblé plus intéressant de la reprendre à la 3ème personne, dites-moi ce que vous en pensez !
Il faut dire aussi que quand j'ai écrit la première version de ce chapitre, je devais avoir environ 12 ans (ce qui était aussi l'âge de l'héroïne à l'origine d'ailleurs), je m'identifie moins à elle désormais, et je trouve intéressant d'avoir plus de recul sur mes personnages.
Sinon j'ai conscience que la personnalité du personnage ne transparait que très peu, mais n'ayez crainte, ça arrive ! Ce que je voulais surtout dans une premier temps, c'était créer une atmosphère.
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Elfes
ParanormalJe n'ai jamais été intégrée nulle part. Ou peut-être que je ne me suis intégrée nulle part. Quoi qu'il en soit, le jour où j'ai découvert un monde au-delà du nulle part, j'ai naïvement cru que ce serait plus facile. J'ai naïvement cru que j'apparten...