Lundi 7h47

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Une boule au ventre, assise dans la voiture, je reste silencieuse. Mon chauffeur ne parle pas et c'est très bien comme ça. J'aimerais pouvoir revenir en arrière, ne pas quitter la maison ce matin, mais le choix je ne l'ai pas eu, je ne l'ai jamais eu de toute manière. Ma vie est dictée par les autres, mes parents, mon frère puis un juge et une famille d'accueil, non le choix je ne l'ai jamais eu.

Lorsque le véhicule ralenti, mon cœur lui s'accélère, on est arrivé. Mon chauffeur m'adresse alors quelques mots « Je repasse te chercher à 4h, passe une bonne journée. » Je ne réponds pas, je me contente de sortir de la voiture. Le vent n'est pas froid, pourtant j'ai l'impression de geler instantanément. Je reste immobile, incapable de faire quoi que ce soit. La fenêtre de la voiture s'ouvre alors et mon chauffeur reprend. « Tu sais que tu dois y aller, je ne pars pas tant que tu n'as pas passé la grille. » Je ne me retourne pas, je me contente d'avancer, lever un pied relève presque de l'exploit, et réussir à marcher en devient miraculeux. Je ne regarde personne, je ne veux pas les voir, j'ai beau savoir que le monde existe, je préfère le nier. Je mets mes écouteurs, et lance la musique fort, très fort, sûrement trop fort mais peu importe.

Je connais cet endroit, j'y suis venu une semaine plus tôt pour finaliser mon inscription. Je ne voulais pas venir ici, mais encore une fois je n'ai pas eu le choix. « Ça va te faire du bien de voir du monde. » voilà la connerie qu'on m'a sortie. « Et puis tu ne seras pas seul, ton frère y est aussi. » voilà sûrement la raison numéro 1 qui me fait détester ce lycée, savoir qu'il est là lui aussi. Mon bras se met alors à me démanger, c'est psychologique, quand je pense à lui, mon tatouage me gratte, me brûle, ce renard sur mon bras est l'ultime souvenir de notre relation passé. Un temps bien lointain, tellement lointain que parfois je me dis que ça n'est jamais arrivé, pas dans ce monde ci en tout cas...

Je traverse la cour, je traverse le couloir, j'entend la sonnerie au moment où j'arrive devant la classe. Je ferme les yeux, retire les écouteurs, inspire un grand coup et entre. Je donne simplement un bout de papier au professeur, elle est au courant de mon arrivé, je ne dis pas un mot, elle m'indique où m'asseoir et je m'exécute, machinalement. Rien ne sert de lutter, j'ai déjà essayé et ça ne fonctionne pas alors je fais ce qu'on me dit, je reste silencieuse et j'obéis. Je me retrouve à côté d'un inconnu, je n'ai pas même pas écouté son nom, il me salue mais je ne le regarde pas. Je ne regarde personne, je sors un cahier et me focalise dessus. J'oublie le monde et je fais tout pour que le monde m'oublie. Je sens son regard sur moi. Il doit se demander ce que je fais là, mais je n'ai pas envie de lui répondre, il n'existe pas dans mon monde, ni lui ni personne.

Welcome to OblivionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant