Welcome to Oblivion

Vendredi 14h49

« Tu es pas obligé de rester. » Lançais-je à destination d'Eliott toujours assis sur la chaise à côté de moi. Il ne répond pas et se contente de me lancer un de ces regards qui ne veut rien dire et tout dire en même temps. Je déteste quand il fait ça. « T'as pas cours de toute manière ? » il rate déjà bien assez les cours à cause de ces épisodes alors si en plus il en rate à cause de moi ... « Mon prof est pas là. » je ne suis pas sûr qu'il dise la vérité je tente d'enchainer. « Et pour... » il me coupe instantanément. « Cherche pas, je reste ici, au moins jusqu'à l'arrivé de Catherine. » Je me tends de nouveau à l'écoute de ce prénom. J'avais presque oublié qu'ils l'avaient appelé. Elle va encore me soûler, elle est persuadée que je mens pour mes angoisses, comme tout le monde d'ailleurs ...

Le silence revient pour quelques minutes et l'infirmière entre alors dans la pièce. « Ta mère est là. » lance-t-elle toute guillerette, ce qui a le don de lui faire perdre le peu de sympathie que je lui avais trouvé plus tôt. « C'est pas ma mère. » lançais-je pile au moment où ma geôlière entre dans la pièce à son tour. « Je suis sa tutrice. » Répond-t-elle à l'infirmière. « Il s'est passé quoi encore ? » lance-t-elle dans ma direction. J'entend déjà l'agacement dans sa voix. « Rien. » répondis-je. Ça ne sert à rien d'essayer de lui expliquer, non seulement elle ne comprend pas mais elle ne fait pas d'effort alors à quoi bon ... « Elle a fait une petite crise d'angoisse en sport, rien de bien grave. » lance l'infirmière qui tente de calmer le jeu. « Encore ? Camille tu peux pas continuer comme ça éternellement. » je m'apprête à répliquer, sous l'effet de la colère, comme si je le faisais exprès, moi aussi je m'en passerais bien ! Mais Eliott me prend de court. « Ça serait pas arrivé si elle avait pu esquiver le cours de sport. » je lui lance un regard, il semble lui aussi plutôt en colère. Mais Catherine ne se laisse pas faire. « Elle ne va pas pouvoir esquiver les autres toute sa vie, faut qu'elle apprenne à faire avec. » une fois encore ma très chère tutrice montre à quel point elle ne comprend rien. Je me contente de me retourner, c'est perdu d'avance avec elle, je lâche prise encore une fois, j'abandonne, je n'ai pas d'autre choix de toute manière ... Mais Eliott lui ne lâche pas. « Mais putin tu le savais que ça serait pas simple quand elle est venu chez toi, tu pourrais au moins la soutenir un peu. » Je reste de dos ne voulant pas me mêler à cette discussion qui n'aboutira pas de toute manière. « La soutenir ? Mais je ne fais que ça, mais ce n'est jamais assez. » Je sens alors des larmes qui coulent sur mes joues. Elle pense me soutenir ? M'imposer son mode de vie, ces choix et me forcer à faire des choses que je ne veux pas c'est ça qu'elle appelle me soutenir ? Les deux continuent de se prendre la tête mais moi je ne suis même plus là, je me suis enfermé dans ma bulle, je ne veux pas les entendre. Je ne veux pas être là.

Finalement je sens une main qui me tire le bras. « Allez ça suffit on s'en va. » je comprends très vite qu'il s'agit de Catherine. Je suis relevé de force et mon frère enchaine. « Camille ça va aller ? » me demande-t-il compatissant. Je n'ai pas le temps de répondre que c'est l'autre qui le fait pour moi. « Mais oui, c'est une grande fille. Allez dépêche-toi. » Je m'exécute tel un zombie. Je ne dis plus un mot, je ne relève même pas les yeux, je suis ma geôlière vue que de toute manière je n'ai pas le choix. « Si ya quoi que ce soit tu m'appelle d'accord ! » c'est la dernière phrase que j'entend d'Eliott et me voilà sortie de la pièce et bientôt du lycée. Assise dans la voiture je me ferme une fois de plus. Je ne sais pas si Catherine parle à côté de moi et ça n'a pas d'importance, je reste dans ma bulle, là où personne ne peut m'atteindre.