De Carrozzu à la station d'Ascu Stagnu (1ère partie)

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La terrasse du refuge de Carrozzu était encore vide. Morgan observa les alentours tandis qu'il appliquait de la glace sur sa cheville douloureuse. Il remarqua alors une petite pancarte sur la porte d'entrée du refuge qui le fit sourire : « Il n'est pas obligatoire d'être fou pour travailler ici mais ça aide... »

Lena le rejoignit ensuite avec de la pommade, un antidouleur et de quoi faire un bandage solide.

— Ça va, tu t'en sors bien. Si elle était cassée, tu serais incapable de marcher. Comme nous sommes arrivés tôt, tu vas pouvoir te reposer et surtout ne pas bouger.

— Et je fais comment pour me laver ?

— Et bien tu te passeras de douche pour aujourd'hui.

Rafael arriva à son tour et prononça d'un air moqueur :

— C'est quand même dommage. Je t'aurais bien conseillé de faire trempette dans les vasques de la Spasimata mais il vaut mieux rester prudent.

— Pourquoi tu me regardes comme ça ?

— La Passerelle de la Spasimata est l'un des hauts lieux du GR20. Au départ parce que c'est magnifique. Ensuite, l'endroit a gagné en notoriété grâce au film « Les Randonneurs ». Et enfin, maintenant, il attire les pervers en tous genres parce que plusieurs mecs y ont déjà aperçu des femmes se baignant topless dans la rivière.

— Oh, je vois. Et bien désolé mais je ne suis pas un voyeur.

Lena intervint, mécontente :

— Ça suffit vous deux ! Raf, occupe-toi de nos affaires et installe-les sur nos matelas.

L'arrivée d'un groupe de randonneurs fit heureusement diversion. Morgan remarqua tout de suite à la tête de leur guide que la journée n'avait sans doute pas été une partie de plaisir. L'homme salua Lena et s'assit sur un banc en bois en soupirant :

— Ah les touristes, je vous jure ! Le jour où ils comprendront que le GR20 n'est pas une simple balade en forêt...

— Tu comptes faire demi-tour Nicolas ?

— Pas le choix ! L'une des deux femmes a des ampoules et l'un des gars a pété la semelle de sa chaussure. J'ai eu beau les avertir qu'ils n'avaient pas le bon matos, ils n'ont rien voulu entendre.

Le groupe en question s'installe sur la terrasse à son tour. Morgan les observa avec attention : ils semblaient exténués. Il songea fièrement que lui, au moins, n'avait pas cette tête à la fin des étapes.

Mouais mais tu n'en as encore fait que deux.

Un des hommes montra la gourde que tenait encore le guide dans sa main et murmura à l'oreille de l'un de ses compagnons :

— Ah ben elle doit être potable l'eau de la fontaine alors, si le mec la boit".

L'autre se dirigea vers la table où se trouvaient Lena, Morgan, Rafael et Nicolas et il interpella ce dernier :

— Excusez-moi, elle est potable l'eau ?

— Non, je la bois pour avoir la chiasse après. Ça permet de se lester des kilos en trop.

Morgan se mordit les lèvres pour ne pas éclater de rire. Le randonneur, ne sachant quoi répondre, se tourna vers ses amis, l'air ahuri. Bon joueur, Nicolas leur indiqua qu'il blaguait et qu'ils pouvaient se ravitailler sans soucis à la fontaine.

Jusqu'au repas du soir, Morgan observa les arrivées à intervalle régulier de nombreux touristes. Il fut étonné de constater que ces derniers provenaient des quatre coins du monde. Certains distraits, qui avaient oublié de réserver leur nuit au refuge, furent contraints de louer une tente pour dormir aux alentours.

Un pinzutu dans le maquisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant