9- Mentor

1 1 0
                                    

Deux ans s'étaient écoulés depuis l'installation des Sidélions sur leur nouvelle planète modestement baptisée Delia4, sans grand bouleversement. Le peuple qui n'avait toujours pas de nouvel empereur se suffisait à lui-même du mieux qu'il pouvait, mais il était fréquent d'assister à des scènes d'anarchie totale dues à l'absence d'organisation. La mort de Cyrion avait ébranlé tout le monde, mais elle avait aussi permis à ses fils de se rapprocher d'une certaine façon. Naci, Syrcon et Tran avaient continué de vivre dans le château de leurs parents au milieu de gouvernantes et domestiques en tout genre qui restaient par bonté de cœur puisqu'ils n'étaient plus payés. C'est dans ce même château qu'ils sont entrés pour la première fois en contact avec une étrange entité, le Seigneur Céladon. Il s'agissait en réalité d'une énergie à l'état pure, sans enveloppe corporelle propre qui leur est apparue alors qu'ils jouaient dans un des nombreux passages secrets du château, sous la forme d'une sorte de halo très légèrement coloré. Il ne parlait pas, puisque ce n'était qu'une énergie. Pourtant, à sa vue les trois enfants s'arrêtèrent de jouer et se sentirent simultanément investis d'une mission. Le seigneur Céladon était venu leur confier celle de reconquérir la Terre. Ce sujet était régulièrement évoqué dans la société Sidélionne à ce moment-là puisque Delia4 était une planète suffisante mais pas confortable. Les Sidélions n'ayant jamais cessé d'aimer leur planète originelle, la Terre, nombreux étaient ceux qui souhaitaient y retourner. Seulement voilà, il y avait un caillou coincé sous celle-ci qui empêchait les Sidélions d'ouvrir la porte qui les mènerait à leur planète idéale. Un caillou ou plutôt un énorme rocher, une véritable falaise : les Terriens. Leur présence n'était pas le principal problème puisque les Sidélions n'avaient pas énormément de scrupules à voler des planètes déjà occupées ; le principal problème était ce qu'ils avaient fait subir à la Terre. A l'époque où les Sidélions y avaient vécu, la Terre était une planète idyllique. Tous les livres en faisaient le même portrait ; celui d'une planète luxuriante à la faune extraordinairement développée, aussi accueillante que surprenante. Des plaines s'étendaient à perte de vue, des plaines dans lesquelles les animaux venaient brouter sans crainte malgré la présence des Sidélions. Il y avait aussi des forêts sans limites, composées de rangées d'arbres alignés parfois au centimètre près, où la nature semblait plus organisée que n'importe quelle civilisation. L'eau qui coulait dans les ruisseaux était plus claire et plus pure que nulle part ailleurs, si bien que celle-ci était jalousement protégée par toutes les espèces qui y voyaient le plus grand des trésors. Mais désormais, les Sidélions ne reconnaissaient plus la Terre que les livres décrivaient. Des kilomètres de bétons sur lesquels se succédaient des milliers de voitures qui crachaient une fumée noire puante avaient remplacé les vastes prairies d'antan. Là où s'alignaient auparavant toutes sortes d'espèces d'arbres, on trouvait désormais des immeubles tous plus grands les uns que les autres. Et que dire de la biodiversité... les ¾ des animaux représentés dans les livres avaient disparu. Ce dilemme divisait donc la société Sidélionne, avec d'un côté ceux qui souhaitaient tout de même reconquérir la Terre et de l'autre ceux qui considéraient qu'une pomme est bonne à jeter lorsqu'elle est pourrie. Pour éviter une polémique supplémentaire, les trois frères décidèrent de tenter un pari fou : reconquérir la Terre sans en parler à personne.

Le sauvetage d'un peupleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant