❶ Walls Could Talk

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Eleanor enfila son uniforme et se regarda dans le miroir, satisfaite. Elle sortit sans un bruit des vestiaires, encore vide dû à l'heure matinale. Il lui restait une dizaine de minutes avant qu'elle soit obligée de réveiller les nouvelles recrues.

Elle profita des quelques minutes de répit qui s'offraient à elle pour se diriger vers son casier et en sortir un sac à dos noir. Elle l'ouvrit pour prendre une bouteille d'eau et une boîte remplie de médicaments en tout genre. La jeune femme compta soigneusement les pilules avant de les avaler avec une gorgée d'eau. Elle grimaça en sentant leur goût amer sur sa langue. Même après trois années, elle détestait toujours autant les prendre.

Eleanor rangea rapidement ses affaires et referma son casier, avant de se diriger vers son dortoir. Elle entra et remarqua sans surprise que personne n'était réveillé. Les soldats avaient encore du mal à s'habituer au réveil matinal, même après plusieurs semaines. Eleanor sourit. Elle ne pouvait pas leur en vouloir, il lui avait fallu plusieurs années pour que le rythme militaire lui rentre dans la peau, et encore plus pour être complètement opérationnelle lorsqu'on la réveillait aussi tôt.

Elle attrapa une barre de fer qui était accrochée à l'entrée, et tapa plusieurs fois sur le mur, provoquant quelques cris de surprise. Elle regarda les autres recrues se réveiller en sursaut, effrayés par le raclement métallique de la barre qu'elle traînait sur le béton. Elle continua son chemin dans le dortoir, tâchant de réveiller le plus de personnes possibles. Ceux qui restaient endormis, ce n'était pas son problème. Son supérieur les réveillerait sûrement à coups de revolver. Lorsqu'elle était plus jeune, ce son la terrifiait. Maintenant, il était anodin, comme le bruit de ses bottines qui claquaient contre le béton.

Sa tâche achevée, la jeune femme sortit du dortoir pour se diriger vers la cantine. Elle avait déjà mangé, mais elle devait retrouver son supérieur. Si elle se réveillait à trois heures tous les matins, ce n'était pas le cas d'Ernest Zola. Il avait beau être le colonel le plus respecté de la base, il approchait la soixantaine et n'était plus au meilleur de sa forme. Cela ne l'empêchait cependant pas de pouvoir mettre une dérouillée au premier soldat qui l'énervait.

Eleanor le retrouva assis à une table remplie d'officiers qui revenaient tout juste de leurs dernière mission. D'autres soldats se tenaient debout autour de la table, et la jeune femme dû user de ses coudes pour qu'on la laisse passer. Elle sentit une main glisser le long de sa jambe et elle foudroya du regard un soldat au sourire goguenard.

Cela ne l'empêcha pas de rejoindre son supérieur. Eleanor se racla la gorge et attendit patiemment qu'Ernest la remarque. Plusieurs officiers lui lancèrent des regards noirs, se demandant sûrement comme un soldat, une femme de surcroît, pouvait oser les déranger. Mais elle ne fit pas un compte avec leurs airs meurtriers et bientôt, tous les regards se concentrèrent de nouveau sur Ernest. Il avait une prestance et un charme qui attirait toute l'attention, et tout l'auditoire semblait captivé par le monologue de l'officier. Seule Eleanor s'ennuyait, imperturbable face au discours de son supérieur.

Celui-ci finit par se rendre compte de sa présence, et c'est avec un grand sourire qu'il se leva et salua l'ensemble des soldats. Il fit ensuite signe à sa subordonnée de le suivre et elle obtempéra en silence. Après être sorti de la cantine et s'être assuré qu'ils étaient seuls, il lui fit :

- Vous avez ce que je vous ai demandé ?
- Je mérite une augmentation pour tout ce que vous me faites faire, grogna Eleanor en tapotant sa poche. Vous comptez virer le soldat à qui je l'ai prise ? Non sérieusement, pour voir si je dois le tuer ou si vous vous en occuper.
- Mademoiselle sort ses griffes ? se moqua le colonel en ébouriffant ses cheveux bruns.
- J'ai moyennement apprécié qu'il me touche, grimaça l'agent en repensant au visage satisfait du soldat qu'elle avait rencontré quelques minutes auparavant.
- Je m'occuperai personnellement de son cas.

Un faible sourire éclaira le visage d'Eleanor et c'est un peu moins tendue qu'elle entra dans le bureau d'Ernest. Celui-ci ferma aussitôt la porte à double-tour. Il se retourna et soupira :

- Les murs ont des oreilles, et je déteste ça.
- Vous n'êtes pas le seul, le railla Eleanor. Tenez.

Elle sortit une clé USB de sa poche et la tendit à son supérieur. Il l'attrapa et se dirigea vers son bureau. La pièce était petite, mais elle ne comportait qu'un bureau, une chaise, et une bibliothèque. Eleanor adorait cet endroit. Quand elle était petite, elle s'y cachait toujours. Maintenant, elle avait grandi. Cette pièce n'était plus son repère, et cette époque lui manquait.

- Rapport, demanda Ernest en s'asseyant à son bureau.
- L'opération a été un succès mon colonel, lança sa subordonnée d'une voix monotone. L'algorithme sera prêt à temps. Cependant... Black Widow a aussi récupérer ces informations. Puisqu'elle travaille pour le SHIELD, il y a donc de fortes chances que...
- Ne t'inquiète pas pour le SHIELD trésor, je m'en occupe.

Eleanor tressaillit mais ne se laissa pas démonter pour autant.

- Vous pensez que l'opération Insight sera un succès ? J'ai entendu dire que le capitaine Rogers avait émis un avis négatif sur l'opération et...
- Steve Rogers n'est pas à la tête du SHIELD Eleanor, s'agaça Ernest en tapotant le bout de la table. Ce n'est pas à lui que revient le bon déroulement de cette mission.
- Je tenais juste à m'en assurer mon colonel.

Eleanor laissa son regard planer dans la pièce quand il s'arrêta sur un cadre photo rangé sur la bibliothèque. Le colonel Zola était beaucoup plus jeune, avec ses cheveux bruns parfaitement plaqué sur son crâne, et son visage rieur. Il serrait la main d'un homme habillé d'un costume noir. Une jeune femme se tenait à côté de lui, ravissante dans sa robe de mariée. Eleanor sentit son cœur se serrer.

- C'étaient de bonnes personnes, souffla Ernest d'une voix douce en interceptant le regard de la jeune femme.
- Vous me l'avez souvent dit.

Ernest se tut, attendant que la jeune femme revienne à elle.

- Pourquoi les gens pensent-ils que la liberté est plus importante que la sécurité ? demanda Eleanor, le regard toujours posé sur la photographie.

Ernest se leva et posa une main réconfortante sur l'épaule de la jeune femme.

- Parce qu'ils n'ont pas perdu ce que tu as perdu. Parce qu'ils n'ont pas encore conscience qu'ils sont en danger. Mais avec toi, avec Hydra... Ils vont très vite le comprendre. Je te le promets.

Eleanor hocha la tête avant de regarder son supérieur.

- Je peux m'en aller ? demanda-t-elle en montrant la porte du doigt.
- Juste un instant, j'ai quelque chose pour toi.

Ernest alla ouvrir un des tiroirs de son bureau pour en sortir un épais dossier cartonné.

- J'aurai besoin que tu lises ça, et que tu t'imprègnes du dossier.
- En quel honneur ?

Eleanor attrapa le dossier, tentant de cacher son étonnement. Elle l'ouvrit et fronça les sourcils en voyant l'intitulé du dossier.

- Le soldat de l'hiver ? Il s'agit d'un vieux dossier non ?
- Lis-le, lui conseilla Ernest. Nous avons besoin de toi sur cette affaire.

Eleanor hocha lentement la tête, peu rassurée. Elle avait un très mauvais pressentiment. Et pour ce genre de sensation, elle ne se trompait jamais.

Opération HéraclèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant