Je pense que ce fût le réveil le plus gênant de toute ma vie, quand mes yeux se sont ouverts, il était en train de se laver dans la rivière. Heureusement, le niveau de l'eau était à hauteur de son bassin et il n'était pas de face. Je remarquai sur son dos, une énorme cicatrice bleue. Sa musculature m'impressionnait, ses bras semblables à ceux bûcheron dégageaient une force incroyable, des épaules carrées, un cou fin mais musclé et des abdos bien marqués. Il était très grand pour son âge et avait développé une carrure hors de sa croissance. Je soupçonnais une rentrée très précoce dans les Mercenaires et un acharnement d'exercices. Plus je l'observais, plus je me décourageais. Je ne me sentais pas capable de subir toutes les épreuves qu'il a dû passer. Ou bien peut-être que je ne suis pas encore prête. Je dois arrêter de penser à cela. Je dois trouver un moyen de sortir discrètement ou bien de faire semblant de dormir profondément. J'ai le choix mais aucun des deux ne me plaît. Je peux et veut passer des heures à admirer son dos. Je me leva en silence et partis sur la pointe des pieds.
- Tu peux me passer le savon s'il te plait Kayo ?
- Comment as-tu su que j'étais levé ? Dis-je en rougissant.
J'allai le lui chercher.
- Je te l'ai déjà dit.
- Ah, tu ressens ma présence comme une source de chaleur.
- Tu ne me crois pas c'est ça ?
Répondre sera stupide vu le ton moqueur que j'avais pris.
- A vrai dire, j'ai du mal à croire à cette histoire de chaleur.
- C'est une technique de repérage que tu apprendras lors de ton apprentissage.
- En parlant de ça, je suis plus très sûre de vouloir le faire.
Il se tourna et ma tête se détourna.
- A part mes magnifiques abdominaux, tu ne verras rien d'autre. Dit-il en rigolant.
Il me prit le savon de mes mains et commença à se laver. Je le regardais.
- Pourquoi tu ne veux plus en faire partie ? Cela te fait peur ?
- Oui, un peu. Je ne sais pas si je serai capable de tout pouvoir supporter et surtout je ne sais pas si je vais savoir surmonter tous les obstacles.
- Les difficultés, il y en aura. Mais tu ne seras jamais seule à les affronter. Il y aura toujours quelqu'un avec toi.
- Je ne sais pas...Crois-tu que je sois assez forte ?
- Je ne peux pas juger tes capacités. Le mieux, c'est d'être imprévisible. Chaque personne à son talon d'Achille. A toi de trouver le tien et de faire au mieux pour le contrôler ou même, le cacher.
- Cela ne répond pas à ma question. J'aimerai tellement être comme toi.
- D'habitude, je le prendrai comme une flatterie mais bizarrement, pas cette fois. Chacun est comme il est, Kayo, reste qui tu es et tout ira bien. Tu trouveras te réponse plus tard. Mais personne, et j'insiste sur le mot personne, ne doit influencer ton choix.
Il prit une serviette qu'il enroula autour de sa taille, puis sorti de la rivière.
Il partit se changer pendant que moi, je me levai et pris mon arc. Je sortie du QG pour chercher un peu de fruits pour le déjeuner. Pendant que je cueillais, je découvris une seconde grotte mais, celle-ci était anormalement haute et large cependant, elle était bien cachée. Un léger souffle saccadé suivit d'un grognement en sortit. J'armai mon arc et me mit à marcher le plus discrètement possible. Mon pouls s'accéléra, je sentis qu'un danger me guetta. Plus j'avançais, plus je me sentais mal à l'aise. Ma curiosité, pourtant bien aiguisée, commençais à baisser à chaque mètre qui passais. Le grondement se fit de plus en plus fort. Soudain, un souffle chaud me caressa l'épaule. Je vis dans la pénombre deux petits yeux émeraude. Une flamme sortie de sa bouche. Terrifiée, je ne sus bouger et rester là, immobile. Je vis le feu se rapprocher et dans ma tête, je priais. Ma dernière heure avait sonné. On m'attrapa par la taille et me tira vers une fente de la grotte. Je voulus regarder le visage de mon sauveur mais l'obscurité de la grotte ne me dévoila aucun trait, même pas un petit indice. Je sentis seulement qu'il s'était un peu brûlé mais sans vraiment savoir l'endroit. La peur...la peur me faisait peur. Le voilà mon talon, la peur me tétanisait, me vidait de toutes mes ressources, me dénudait et me mettait ainsi à la merci de mon ennemi. Contrôler la peur n'est pas une mince affaire. Elle s'essaye à tous les obstacles et se défie à tous les rivaux. C'est un sentiment rasoir qui nous surprends parfois dans de délicates situations. Ne disons pas : « Un homme qui a pas peur est un homme libre ! » Je veux être libre, je veux avancer sans que l'appréhension vienne me nouer l'estomac, me brouiller les idées, paralyse mes membres et fasses trembler mes mains. La peur est un adversaire redoutable. La recette est simple, elle ne comporte que deux ingrédients : le temps et l'expérience. La durée de ma pensée dépassée le temps, et bien sûr, mon sauveur avait pris le temps de prendre la fuite. Je me retournais certes lasse mais cet évènement m'a appris à mieux me connaître. Je retourne au QG. Sans surprise, je retrouve Lund en train d'aiguiser sa lame. Il me regarde d'un air abattu qui présager une mauvaise nouvelle. Je l'observai avec des yeux d'incompréhension. Il ouvrit la bouche mais aucun son sorti. Il s'assied. L'inquiétude devait s'ancrer sur mon visage, il se rapprocha de moi et pris ma tête dans ses mains.