Chapitre cinq

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L'entretien du jardin de Perséphone prit plus de temps que Zora n'aurait pu l'imaginer. Il fallut arracher les plantes mortes, cueillir les fruits mûrs, arroser des centaines de plants et retourner la terre. Toujours fascinée par cette nature artificiel qui pourtant paraissait si réel sous ses doigts.

Mais si Perséphone n'avait qu'à poser ses deux mains sur le sol pour que les fleurs cèdent à ses envies, Zora, elle, due utiliser des outils lourds et encombrants.

Elle accepta avec plaisir la pause que la déesse lui accorda.

— Pose tes mains, ici, lui demanda Perséphone.

Zora obéi et Perséphone posa les siennes par dessus.

— Le dieu des Enfers n'a pas seulement le contrôle des âmes, il a aussi le contrôle de ce qui se trouve sous le sol comme les métaux et les pierres précieuses.

Zora acquiesça sans savoir où voulait en venir la déesse.

— Ferme les yeux et sens le sol sous tes mains.

Zora s'exécuta mais rien ne vint. Malgré toute la concentration qu'elle y mettait, elle ne sentait rien d'autre qu'une vive douleur dans ses jambes à force de rester à genoux. Elle soupira avec ardeur et Perséphone se redressa.

— Ça viendra, dit une voix masculine.

Zora ouvrit les yeux. Elle n'avait pas entendu Hadès arriver. Une cape noire ornait sa sombre toge. Il ressemblait à une ombre ce qui était sûrement le but recherché. Le dieu des Enfers aimait rester discret.

La jeune fille ne fit pas part de sa frustration. Elle n'était ni du genre à demander de l'aide, ni à abandonner.

— Quelque chose ne va pas ? s'enquit Perséphone qui avait décelé dans les traits de son mari une inquiétude à peine voilée.

Un échange silencieux passa entre les deux divinités et Zora fit semblant de s'intéresser de près à un narcisse blanc. Après un instant, Hadès se tourna vers Zora.

— Zora, j'aimerais que tu viennes marcher avec moi un moment.

La jeune fille frotta ses mains pleines de terre sur sa tunique toute neuve et lui emboîta le pas.

Elle n'avait pas tellement eu l'occasion de visiter le royaume depuis son arrivée car tout ce qui l'entourait l'effrayait (mais cela, elle ne l'aurait avoué qu'à demi-mots). De l'ambiance austère au manque de clarté qui façonnait des ombres plus terrifiantes qu'elles ne l'étaient, des âmes-fantômes aux regards vides aux plaintes gémissantes qui ne cessaient jamais vraiment, tout lui donnait la chair de poule.

C'est pourquoi lorsqu'elle aperçut ce qui se dressait devant elle, une bouffée de soulagement s'empara d'elle. Les Enfers n'étaient donc pas seulement synonymes de courants d'air glacé et de nature morte.

Les Champs Élysées regorgeaient d'herbe verte et d'oiseaux chantants. Le soleil brillait dans cette unique partie des Enfers et les héros et héroïnes d'autrefois y reposaient en paix loin du sang et des cris de leur vie passé. Le parfum des fleurs embaumaie l'atmosphère, de hauts mûriers ombrageaient de leur ramure les âmes en quête de repos et les poètes d'autrefois déclamaient des vers à longueur de temps.

— J'ai pensé que cet endroit te ferait du bien.

Zora ne sut quoi répondre, la gorge serrée elle hocha simplement la tête.

— Perséphone avait aussi l'habitude de venir ici autrefois pour se vider l'esprit. C'était bien avant la naissance de son si précieux jardin.

Le regard de Zora se posa sur chaque parcelle de pâture, sur chaque sourire. Mais alors que son arrivée aux Enfers ne lui avait procuré qu'effroi et dégoût, les Champs Elysées lui apportaient un réconfort opportun. Des visages amicaux la saluèrent et elle aperçut même un groupe d'Amazones s'entraînant à se battre.

La chute de l'OlympeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant