Nous ignorions dans quelle direction partir. Au vu du carnage qui avait eu lieu chez nous voisins, partir côté route semblait plus risqué que de s'enfuir côté jardins.
Nous avons donc commencé à voyager dans le fond des jardins, escaladant les clôtures lorsque cela s'avérait nécessaire. Nous n'osions plus visiter les autres maisons. Tout était sombre. Personne ne semblait s'être rendu compte de quoique ce soit, ce qui expliquait le fait qu'aucune lumière ne soit allumée.
Néanmoins, bien que je sache l'obscurité de la nuit propice à la discrétion, je croyais que nous nous étions montrés bien trop bruyants pour pouvoir passer inaperçu. Cela n'avait rien de rassurant.
Je serrais Hazel dans mes bras alors qu'Asphodèle prit ma main, ou plus exactement mon poing fermé, qui contenait les aiguilles. C'était la première fois depuis longtemps qu'il agissait ainsi, et le simple fait qu'il reprenne cette habitude qu'il s'était forcé à quitter suffisait à rendre la boule dans ma gorge plus grosse.
Asphodèle avait toujours été le plus brave d'entre nous, malgré tous ses défauts. Le voir dans cet état de panique ne faisait qu'accentuer la dure réalité qui nous entourait tous les trois à l'instant même.
Il y avait une menace. Inconnue. Probablement à visage humain, mais également monstrueuse. Cette menace nous avait délogée de notre propre maison. Cette menace nous avait attaqué. Elle ne nous avait pas encore blessé, mais si nous étions malchanceux, cela ne saurait tarder. Cette menace nous mettait en danger, et en temps qu'aînée, en plus d'être la seule de la fratrie à pouvoir me défendre, je portais les vies de mes petits-frères sur mes épaules. Je devais les sauver, les protéger contre cette menace.
J'inspirais à fond et inspirais pour tenter de faire disparaitre le nœud dans ma gorge et mon anxiété avant de continuer de marcher jusqu'à une nouvelle clôture.
Je me raidis en entendant des bruits de pas. Je n'osais pas me retourner, je n'osais plus respirer. J'avais l'impression d'être une proie. Doucement, je fis descendre un Hazel tremblant de mes bras et donna sa main à Asphodèle, forçant doucement ce dernier à me lâcher. Je pris une aiguille dans mon poing et la levais au-dessus de ma tête au moment où je me tournais.
Sous la lumière de la lune, je reconnus le sweat blanc de l'homme qui avait tenté de rentrer chez nous quelques heures plus tôt. Il avait encore une fois la tête baissée, et leva les yeux vers moi en remarquant que je le dévisageais.
La simple vue de son visage me fit reculer d'un pas, et le cri d'horreur que je menaçais de pousser mourut dans ma gorge alors qu'Hazel hurlait sa terreur. Je les entendis courir derrière moi, escaladant au mieux la clôture qui les séparait d'une chance de s'enfuir, alors que mes yeux restaient fixés sur ceux, malades, grands ouverts et cerclés de noir de cette face livide, barrée d'un grand sourire sanglant. La lame argentée du couteau qu'il tenait à la main ressortait sous la pâleur blafarde de la lune.
Mes mains tremblaient tellement que j'avais l'impression d'échapper mon aiguille à chaque instant, si bien que lorsque je finis par la lancer, je peinais à croire qu'elle ait atteint sa cible.
Au moment où cet homme allait m'attaquer, il reçut l'aiguille qui le propulsa au sol. Je profitais de cet instant de répit pour monter à mon tour la barrière et rejoindre mes frères, qui courraient le plus loin possible de l'endroit où se trouvait notre assaillant. Je pris leurs mains et nous avons couru aussi vite que nous le pouvions, jusqu'au moment où nous finîmes par déboucher sur la route.
Elle s'étendait à perte de vue, et, comme toute autre route de campagne, était encadrée par de grandes étendues de verdure qui nous paraissaient noires. L'horizon était incapable de nous garantir la moindre ville qui aurait pu nous aider à nous dissimuler.
Nous aurions tout aussi bien pu rebrousser chemin pour nous cacher dans une autre maison, mais nous ne voulions pas que la situation que nous avions vécu au sein de notre propre maison ne se répète. De plus, nous ignorons combien de temps nous aurions à tenir. L'aube me semblait une bien trop banale porte de sortie à cet enfer, qu'il valait mieux que nous quittions nous-même, le plus vite possible, par nos propres moyens.
Pour éviter de devenir trop visibles sur la route, et, par conséquent, vulnérables, nous avons décidé de marcher dans l'herbe, quittes à mettre les pieds dans un fossé. J'ai failli tomber à cause d'un de ces trucs, ce qui eut pour effet de faire ricaner Asphodèle. Je ne dis rien, son gloussement se rapprochant plus d'un rire nerveux que d'un vrai rire, et qu'il devait en avoir bien besoin pour arriver à se libérer de la peur qui devait l'habiter, lui aussi.
Je serrais Hazel dans mes bras et sentis mon épaule se mouiller des larmes qui devaient couler silencieusement sur ses joues. J'essayais de le calmer en murmurant doucement des encouragements à son oreille. Je devais m'estimer heureuse qu'il ne soit pas en train de sangloter bruyamment, sans quoi nous aurions pu dire adieu au peu de discrétion que nous avions.
Nous marchions en silence, pendant un long moment. Je n'entendais plus que nos respirations, le bruit de nos pas, les rares sons de la nuit me faisant sursauter et me mettant sur mes gardes. Je me retournais régulièrement, vérifiant que nous n'étions pas suivis, et à chaque fois l'angoisse qui enserrait mon cœur descendait d'un cran.
La situation me semblait de plus en plus irréelle. Je me demandais si Cthulhu allait bien, s'il avait réussi à s'enfuir, lui aussi. Je me maudits de ne pas avoir pensé à prendre mon portable.
Mais la situation ne resta pas aussi calme longtemps. Des bruits de pas se firent entendre derrière moi, rapides, et lorsque je me retournais, je commençais à accélérer en tirant Asphodèle vers moi, changeant de direction pour tenter de semer ces nouveaux assaillants, dont je n'avais pu qu'apercevoir les silhouettes et qui se rapprochaient rapidement de nous.
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Tout ira bien... (Fanfiction Creepypastas)
Fanfiction-On va devoir se serrer les coudes, les garçons, question de vie ou de mort. Ce qui signifie que le premier qui engueule l'autre parce qu'il ne fait pas ce qu'il veut risque de s'en prendre une sans sommation, c'est compris ? -Compte sur moi, sourit...