Vide morbide (Melan)

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À la longue, tout s'aplatit, tout se dérange

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À la longue, tout s'aplatit, tout se dérange

Plus rien n'est rangé, et plus rien ne s'arrange

C'est trop fin pour être vu et entendu

Comme une plume qui s'envole après avoir lu


Dans la longueur de nos langueurs

On apprend que tout perd de son essence

Même nous, qui nous vidons de cette rancœur

Qui bousille nos mains et enivre nos sens


Vides. Nous sommes vides. Je suis vide.

La plume s'envole loin dans le ciel.

C'est comme si mon cœur se déchirait

Tout en douceur, sans dernier appel


Les souffles s'épuisent et se meurent sur les rochers

Ils se cassent et se brisent comme des corps désarticulés

Vague de sang salé à l'écume salement rougeâtre

Comme le feu qui dévore tout au fond de l'âtre


La légèreté nous prend tout et nous tue, et s'exténue

Elle-même de nous vider de notre propre poids

L'écume, c'est les restes de la mer qui se noie

Et nous, flasques, penchés sur des équations non-résolues


On regarde notre consistance foutre le camp d'un coup

Où sommes-nous ? Quand sommes-nous ? Qui sommes-nous ?

Le toucher a disparu, nos émotions sont perdues

Enchaînées à un cœur qui saigne d'être trop tendu


Bonjour le ciel et les nuages qui nous bouffent encore

Le festin d'une vie, les coupes de sang et rôtis de corps

Tablée joyeuse de plats trop légers et de flasques envoûtés

On dégouline par dessous les verres et les fourchettes dorées


Visages écarlates qui menacent tant d'exploser

Exploser de quoi ? On est vide, qui a existé ?

Inspiration maladive dans un air qui pue la révolte

Expiration tardive d'un air devenu désinvolte


Le piano, on l'a toujours dit, c'est beaucoup trop fin

En fait, non, on l'a jamais dit, mais tout a une fin

Et pas un début parce que ça rimait pas

Mais de toute façon, qu'est-ce qu'on s'en fout ?


C'est le paradis des arcs-en-ciel sans couleurs !!

Celui où tout le monde meurt et tout le monde pleure !

Parce qu'on se vide encore et encore sans pudeur,

Et que nos souffrances éthérées ne sont jamais à l'heure !


Tout s'est déchiré beaucoup trop leeen, teeee, meeeent,

C'était tellement ténu qu'on a rien senti,

Mais l'âme, elle a foutu le camp il y a bien longtemps

Et maintenant, on est vide, et on rejoue encore une partie.


On s'écrase sur les plages assassines où l'on s'écorche

On se relève et on explose les crânes qui restent encore.

C'est à celui qui trouvera le premier la lampe torche,

Parce que dans le noir, c'est la lumière le meilleur sort.


On sait pertinemment que personne n'arrivera jamais

Parce qu'il n'y a jamais eu de ligne d'arrivée

Et quand bien même elle existerait

On l'atteindrait qu'on nous annoncerait


Que le cadeau de la victoire c'est de finir comme la mer

Qui se noie elle-même et qui s'étouffe avec son sel

Sauf que nous on va s'étrangler avec notre air

Parce que c'est encore et toujours le Vide qui nous appelle.


Et l'écume, ce sera nos braises incandescentes

Et puis finalement, juste nos cendres vagabondantes

Dans le vent, légères, fines, flasques, ténues

Sans poids, ce vide contre lequel on s'est pourtant toujours battu.



Vide morbide, le vendredi 12 avril 2019

Stella Ewenn Asloïda

Oaristys ÉtoiléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant