La petite fille se leva dans un froissement de draps. Mystérieusement, elle se levait toujours tôt. Peut-être était-elle réglée sur le fuseau horaire de son pays natal...
Ses boucles brunes totalement indisciplinées gisaient sur ses fines épaules comme les bras de milliers d'étoiles de mer. Numéro Huit attrapa un élastique qui trainait sur sa table de chevet avant de nouer ses cheveux en une queue basse, qui avait le mérite de dégager son visage. Elle se leva, tâchant d'être la plus silencieuse possible. La porte grinça doucement lorsqu'elle se glissa hors de sa chambre. Dans son pyjama bleu clair, orné du parapluie de l'Académie, Huit avait l'air d'avoir été envoyée dans un pensionnat sévère qui exigeait l'uniforme, même la nuit. Et, d'une triste façon, c'était exact. Ses pieds nus frottaient le sol en un bruit qui pouvait se confondre avec les sifflements du vent dans les fenêtres. La petite fille alla là où elle allait toujours, avant que l'aube ne rosisse le ciel. Elle se plantait devant Grace, leur nouvelle nourrice. Devant sa peau diaphane, ses boucles dorées et ses yeux bleus limpides, Huit avait l'impression de contempler une reine d'un royaume perdu. Tout les matins depuis son arrivée, la brunette s'asseyait devant elle et imaginait la vie de la reine Grace. La miraculée avait remarqué que Un était aussi blond que Grace et avait fait de lui le fils de la reine, le petit prince de ses histoires. Et lorsque Grace s'éveillait de son sommeil, elle prenait Huit sur ses genoux et lui demandait toujours,
— Alors petite conteuse, qu'a fait la reine aujourd'hui ?
Et elle répondait toujours, avec son babillage de petite fille adorable. Elle était jeune, à peine cinq ans à vrai dire, mais son imagination valait, du moins pour Grace, un écrivain. Devant ce spectacle, sa nourrice ne pouvait s'empêcher de sourire, un joli sourire qui mettait toujours du baume au coeur de Huit.
Mais ce jour là était différent. À peine s'avançait-elle dans le couloir mal éclairé qu'elle percuta quelqu'un de plein fouet. Surpris, ils tombèrent dans un méli-mélo de bras et de jambes. Son assaillant avait poussé un petit cri et Huit reconnu la voix de son frère Six. Elle se mit à pouffer, relevant sa tête, elle était coincée sous les jambes de Six et elle rit doucement,
— Six ! Relève toi ! Tu es trop lourd !
Le petit garçon se dégagea et les deux enfants se relevèrent mutuellement. Six épousseta son pyjama avant de regarder la brunette.
— Qu'est-ce que tu fais déjà debout ? lui demanda t'il, sans se douter que sa soeur était bien plus matinale que lui.
— J'avais voir Grace et inventer une histoire, puisque tout le monde dort, avoua t'elle, se balançant d'avant en arrière, mais puisque tu es là, on va pouvoir jouer !
Il plissa les yeux un instant, tentant de déchiffrer les mystérieuses paroles de Huit avant de réaliser que même le Monocle dormait. Un sourire en coin releva le coin de sa bouche auquel lui répondit celui de la brunette, comme un écho. Ils sursautèrent en entendant quelqu'un éternuer. Cela venait de la chambre de Quatre. Huit posa son doigt sur sa bouche, malicieuse, et attrapa la main du garçon avait de détaler. Ils se rendirent dans l'immense salon et Six proposa,
— Cache-cache ?
— Oh oui ! Qui compte ? battit-elle joyeusement des mains.
Elle s'attendait à ce que Six, tout timide qu'il était, lui laisse galamment le choix. Mais il s'enfuit en courant devant la française, bouche-bée. Au bout de quelques secondes, elle se reprit, se retourna, cacha ses yeux bruns dans ses petites mains et commença le décompte. Arrivée à quarante elle carillonna, oubliant totalement qu'elle devait être discrète,
— Caché ou pas, j'arrive Six !
La petite fille fila vers la porte la plus proche, délaissant le salon. Tout en haut de la bibliothèque, Six sourit. Il n'y avait aucune échelle permettant d'y accéder. Le petit garçon avait utilisé son don pour y monter, et ce qui le rendait encore plus fier, c'était le fait qu'il n'avait pas crié. Oh, certes la douleur ne s'était pas fait prié pour envahir son corps, mais cette fois, il avait réussi à la juguler, la contrôler. Huit ne l'avait pas entendu, et elle n'était pas prête de le trouver ici. Alors, très discrètement, il se pencha, ouvrit avec peine la porte de la bibliothèque et ramena le premier livre qu'il trouva sur sa poitrine. Roméo et Juliette, de William Shakespeare. Il l'ouvrit délicatement et commença sa lecture. Du haut de ses cinq ans, Six était tout à fait apte à lire ce livre. Leur père, Sir Reginald Hargreeves, avait tenu à ce que ses enfants soient le plus cultivé possible. Ils savaient tous compter et lire depuis leurs quatre ans. Et Six, en plus d'être remarquablement précoce, s'était découvert une passion pour la lecture.
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Numéro 8 "Spectre" •TUA•
Fiksi Penggemar1 octobre 1989. 43 naissances miraculeuses. 8 adoptions par Sir Reginald Hargreeves. "- Spectre ! Hurla le Monocle La jeune fille plaqua ses mains sur ses oreilles. Elle ne pouvait plus supporter ce nom, son cœur menaçait de se déchirer, ses yeux...