Chapitre 1 : Ô rage

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Ce soir-là je rentrai encore une fois épuisée. Les élèves me tuaient, presque littéralement. Je travaillais dans une école primaire. Les collègues me trouvaient chanceuse d'avoir des CM2.
- Ils sont autonomes et puis ça avance plus vite, tu peux aller plus loin dans les réflexions sur tel ou tel sujet. M'avait encore dit Clothilde ce matin.

Ce qu'elles oubliaient de voir, c'est que j'avais cinq élèves à profil particulier avec des PAI, trois qui ne savaient toujours pas lire et ce n'était pas les mêmes. Deux élèves qui ne supportaient pas la différence des autres et qui menaient la vie dure à la classe. Alors non, je n'étais pas épanouie je passais une partie de mon temps à calmer le jeu, une autre à  préparer des cours différenciés et un autre à courir dans tous les sens pour telle ou telle réunion avec le médecin scolaire, l'assistance sociale ou encore les parents. Je ne prenais pas mon pied, j'avais à peine l'impression d'être prof la moitié du temps.

Donc lorsque je passais la porte et que je trouvais mon compagnon depuis bientôt sept ans sur le canapé avec sa valise à m'attendre, je n'ai pas réagi tout de suite. Je passai près de lui, déposai un baiser machinal et filai me changer. Je ne compris pas vraiment quand il me dit qu'il était pressé et que ma douche devrait attendre. C'est donc en soutif et jeans qu'il me fit asseoir sur notre lit.
- Il faut que je te parle Betty.
- Hum oui je t'écoute qu'y a-t-il ? Tu pars en voyage d'affaires encore ?
Depuis qu'il avait eu une promotion, il devait régulièrement partir pour plusieurs jours, parfois c'était à cheval sur un weekend pour économiser du temps de transport, m'avait-il expliqué lorsque j'avais râlé la première fois.
- Il n'y a jamais eu de voyage d'affaires.
Bam ! Première claque mentale.
- Comment ?
- Je ne suis jamais parti en voyage d'affaires. Je vois quelqu'un d'autre depuis quelques temps déjà. Je passe mon temps avec elle.
Bam! Bam ! Double claque. Je dois avoir le teint livide et les yeux écarquillés. Lui imperturbable continua de m'achever.
- Je te quitte, ça n'a plus de sens nous deux. Je te laisse la maison pour ce mois-ci mais il faudra que tu partes. Je compte la vendre. Daphné a déjà une maison.
Daphné. Ce devait être le nom de "l'autre".
- Tu veux dire quelque chose avant que je ne parte ?
J'étais estomaquée. Les mots se bousculaient et aucun ne voulait sortir.
- ...
- Je ne te ferai pas de reproche et ne te sens pas coupable. C'est comme ça.
Parce qu'en plus ce serait de ma faute ? Mais quel connard ! Je me levai, raide et le regard perdu. Et comme par réflexe je le giflai. Une bonne claque pour exprimer toute ma colère, toutes les insultes qui voltigeaient dans mon esprit. Il fut surpris de mon geste. Il posa sa main sur sa joue et me fusilla du regard.
- Tu as toujours eu un souci de communication. J'ai encore moins de scrupules à te virer de ma vie. T'as quinze jours pour te casser d'ici. Répliqua-t-il hargneux.
Il fit demi tour, j'entendis les roues de sa valise s'éloigner et la porte claquer finalement.
Je restais ainsi encore de longues minutes, une heure peut-être. Ce fut un frisson sur la peau qui me ramena à la réalité. J'étais à moitié nue, j'avais froid, la nuit approchait et les rayons du soleil ne réchauffaient plus la pièce. Je me glissai alors sous la couette, me roulai en boule et laissais couler les larmes sur mes joues. Le peu d'équilibre qui me maintenait à flot venait de s'éloigner avec une valise à roulettes. Je n'avais plus de maison et j'étais épuisée par mon travail. Je ne savais même pas comment j'allais pouvoir faire cours le lendemain. Je décidai de lâcher prise. Je n'avais pas l'énergie pour préparer des cours et encore moins l'esprit disponible. Je finis par sombrer dans un sommeil lourd et comateux dans lequel je fis des rêves ou plutôt des cauchemars improbables où Samuel arrivait en classe devant mes élèves et me chassait de ma classe sous les rires et huées des enfants. Je n'arrivais pas à parler, à me défendre. Ce cauchemar perdura jusqu'à ce que mon réveil sonne. Je tentais alors de dénouer les sentiments liés à la réalité et ceux de mes mauvais rêves. Une douleur sourde me martelait le crâne. Une nausée subite me prit. J'hésitais entre rester prostrée ou affronter la vie qui continuait malgré ma rupture. Je me souvins alors des trentes têtes blondes qui comptaient sur moi. J'inspirai et expirai avec force et me resignais à me mettre en branle. J'évitai de me regarder dans le miroir avant d'entrer dans la douche. Ce sera bien assez affreux même après m'être lavée. Pas la peine de se faire peur avant.
L'eau chaude détendit mes muscles et le bref sentiment de bien-être me fit prendre la résolution de laisser mes problèmes personnels pour la journée. Je verrais ce soir, d'autant que c'était le week-end et que je pourrais affronter les choses plus efficacement à ce moment-là.

Début d'une nouvelle histoire. Je pense qu'elle ne sera pas très longue, un petit scénario mignon et sexy. Juste pour le plaisir.

Oui je sais j'avais dit que je n'écrirais pas avant les vacances scolaires...😌

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