13. Sirius

118 12 9
                                    




La mort a toujours été sa plus vieille amie. Depuis sa naissance, elle l'accompagnait comme une grande sœur malicieuse, lui soufflant dans le cou pour jouer. La première fois qu'il la vit réellement, il avait trois ans. Il était au manoir des Black, une vieille demeure sombre et cachée. Sa magie n'était pas encore apparue, mais ses parents voulurent tout de même le tester. Sur le sol du salon, ils avaient attaché un monsieur. Aux yeux de Sirius, il paraissait très âgé à cause de ses cheveux blancs, mais il ne devait pas avoir plus de quarante ans. Les parents de l'enfant lui demandèrent de se débarrasser de l'homme et le petit ne comprit pas. Il essaya de le faire se lever, mais l'homme ne pouvait pas, il était attaché. Alors le petit Sirius était allé chercher un couteau dans la cuisine, sous le regard intéressé de ses parents. Il avait tenté de couper les liens, mais ces cordes magiques étaient incassables. A force d'essayer, il entailla la peau du monsieur, qui laissa échapper un flot vermeille. Au lieu de paniquer ou de s'arrêter, le petit s'approcha, obnubilé par cet écoulement qui chantait à ses oreilles. Il posa la main dessus et recueilli le liquide en coupe, sans qu'une seule goute tente de s'échapper de sa main. Désireux de mieux comprendre ce phénomène, le petit enfant appela alors à lui plus de sang de l'homme. Les yeux écarquillés, celui-ci se mit à convulser et son sang quitta son corps par tous les orifices de sa peau. S'amassant au sol, le liquide serpenta vers son maître. Pendant longtemps, le petit enfant joua avec ce liquide qui lui obéissait, ayant totalement oublié le corps de moldu allongé non loin. Quand il eut fini de découvrir cet étrange liquide, il leva les yeux vers ses parents, qui le félicitèrent chaudement. Pour la première fois de sa vie, ses parents étaient heureux et ne lui criait pas dessus. Mal à l'aise face à cela, le petit Sirius avait détourné le regard vers l'escalier, où son petit frère le regardait avec horreur. Baissant les yeux sur son corps, il le vit tâché de ce brun sombre qui avait séché. L'odeur de fer empli ses narines, le dégoutant et l'exaltant à la fois. Il ne voulait pas de ce pouvoir, de ce liquide si particulier. Alors, sans faire attention à ce qu'il y avait autour de lui, il demanda au sang de retourner dans le corps du vieux monsieur. Obéissant, le liquide reprit sa place, rendant une certaine couleur au visage de l'homme, qui ne reprit pas connaissance. Le petit garçon s'était approché, avait posé ses mains sur l'une de ses épaules pour le secouer, mais l'homme ne bougeait plus. Derrière lui, ses parents avaient échangé un regard, un Black ne pouvait pas être ainsi avec un sang de bourbe. Leur fils possédait beaucoup de talent, mais il faudrait le renforcer mentalement. Ils n'imaginèrent pas une seule seconde que cela était le premier signe de rébellion, après tout, il était un Black.

Jusqu'à sa fuite, la mort l'avait accompagné pendant son enfance, elle avait été là, telle une dragonne veillant sur son trésor. Il avait cru s'en défaire en rencontrant les maraudeurs, mais elle s'était mise à le traquer, voulant reprendre son bien. Pendant ses années à Poudlard, elle n'était jamais bien loin, dans l'ombre au détour d'un couloir, chuchotant parmi le grincement des armures. Pourtant, il ne l'avait pas revu avant de faire confiance à son petit-frère et de rentrer dans sa première maison. Il se croyait supérieur à la mort, après tout, il était un Black.

Le repas de famille avait été étrange, il y avait une doucereuse entente, chargé de piques et de moqueries. Sirius avait joué le jeu, tentant de rester calme. Il avait mis une tenue sombre, mais pas verte et avec une petite touche d'or et de rubis. Si sa famille le voulait, elle devrait l'accepter comme il était. Etonnamment, son séjour se passait plutôt correctement. Ses parents méprisaient certaines de ses activités, mais ne les commentaient pas tant qu'elles restaient cachées dans sa chambre. Pour sa part, il ne remettait pas en cause certains de leur propos, tant que ses amis n'étaient pas concernés. C'était lâche et il s'en voulait, mais sans qu'il n'ose se l'avouer, sa famille lui avait manqué. Parfois, quand il tenait tête à sa mère ou qu'il réalisait un sortilège de haut niveau, il remarquait une brève lueur de fierté briller dans le regard de son père. Ce n'était rien, il n'aurait pas dû s'en soucier, mais cela le rendait heureux. Il ne ressemblait pas à sa famille, il n'aimait pas leur manière de pensée, mais il était prêt à fermer les yeux, à leur pardonner. Non, cela faisait bien longtemps qu'il leur avait pardonné, seul son orgueil lui interdisait de le faire savoir, alors il tentait maladroitement de le faire avec des gestes. Ses parents avaient fait ce qu'ils pensaient être le mieux pour lui et à bien des égards, ils avaient réussi. Sirius n'osait le penser, mais il savait que s'il avait survécu toutes ces années, c'était grâce à leurs enseignements, un Black restait un Black. Il ne s'en était pas rendu compte, mais il était un vrai Black, plus que son frère, il ressemblait trop à sa famille. Il possédait le même honneur, la même loyauté, il ferait tout pour protéger les siens. Ce-jour-là, pendant le repas de famille, il aurait pu redevenir l'un des leurs, seulement si les adultes avaient accepté les maraudeurs. Ce n'était pas grand-chose, une né-moldu, deux sang-mêlé, trois sang-purs, quatre garçons, cinq anciennes magies, six Gryffondors. Mais les Black sont têtus et ne savent pas reconnaitre leurs torts. La dispute fut venimeuse et Sirius claqua définitivement la porte. Peut-être que s'il s'était retourné au bas de la porte, les yeux rempli de larmes de sa mère l'aurait convaincu de faire demi-tour. Mais il était trop fier pour regarder en arrière, après tout, il était un Black.

Les maraudeurs à Poudlard, 2ème année [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant