Chapitre 14: Bienvenue!

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Déjà 6h du matin et ils sont dans le gbaka, direction la commune d'Adjamé. Les traits tirés, le regard lointain, elle fait abstraction de tout ce qui l'entoure tout le long du trajet.
Tout est si fade à ses yeux, voir les sourires sur les visages des filles de son âge habillées en tenues d'école, les sacs négligemment placés soit sur le dos, soit à la main. Voir cela lui fait encore détester ce monde qui est si injuste envers elle, qui connaît son problème ? Qui peut l'aider ? Personne ! Francis constituait finalement sa seule famille, sa tante décédée, sa mère également.
Pourquoi n'est-elle pas née dans une famille normale africaine ? C'est à dire avec de nombreux oncles et tantes, des grands parents en vie. Le mari de sa défunte tante, ne l'a appelé qu'une seule fois puis plus rien ! la famille de son défunt père n'a jamais voulu du mariage entre lui et sa mère, elle n'a donc aucun lien avec eux.
Fuir est pour elle une option, mais aller où ? Elle ne connaît même pas la route de son village, jamais elle y a mit les pieds, sa mère refusait catégoriquement lorsqu'elle énonçait le projet de visiter sa terre.
Sa mère craignait les sorciers du village, s'en était devenu une obsession pour elle, elle voyait les sorciers partout et peu à peu c'est éloignée de ses racines, excluant ainsi sa fille de son clan. Maintenant où ira-t-elle? En ce moment la question qui fuse son esprit est pourquoi est-ce que Dieu ne réagit pas? Ne dit-on pas qu'il est le Dieu des orphelins ? Alors que fout-il ?
Elle reste ainsi absente du monde qui l'entoure tout au long du trajet et lorsque ils fut à destination Olivier la tape pour la ramener au monde des vivants. Elle ne réagit immédiatement, elle voulu restée assise et ne pas descendre mais la façon dont il la regarde la fit réagir et elle se lève effrayée, une dame qui descendait voir la scène et s'arrête près du véhicule attendant qu'ils descendent à leur tour.
-Ma fille tu vas bien?
Coralie sursaute et voyant que c'est à elle que s'adresse cette dame, elle la regardait avec bienveillance.
-Ai...
-Cela ne te regarde pas la veille ! Dit Olivier sèchement qui revenait après avoir récupéré sa monnaie.
-Ça me regarde bien ! Abidjan ici là il faut se méfier de tout. Ma fille tu le connais ?
Coralie regarde la dame dans les yeux et hoche la tête pour répondre oui sous la pression d'Olivier. Mais elle dit le contraire avec ses yeux.
-On vient de perdre nos parents ! Lâche-t-il d'une voix cassée, la dame tique et regarde Coralie qui pleurait chaudement, elle voulu dire que cet type là l'a violée mais rien osait sortir si ce n'est que ses larmes.
-Heee yako mes enfants !
Olivier hoche la tête et tire Coralie dans les fins fond de la commune d'Adjamé très remonté contre la petite.
-Si jamais tu ose parler, on te tue! Tu as compris petite bête là.
-Mais je n'ai rien dit !
-Ai l'air normal !
Elle hoche la tête et le suit silencieusement sans rien faire, il lui tenait la main et elle pouvait sentir toute la pression menaçante dans la paume de sa main qui la tenait fermement.

-Où est Moussa?
-Au garbadrôme!
-Vas l'appeler, dis lui que il y'a une nouvelle!
-D'accord !
-Toi assieds-toi ici et reste tranquille! Ordonne-t-il à Coralie qui obéit, elle s'assoit sur un band qui tient mal, Olivier la regarde un bon moment et sourit en faisant sortir une cigarette de sa poche de son jean délavé à l'excès.
-Tu seras très vite habituée ! C'est parfait. 
Elle ne dit rien et baisse la tête, le regarder la répugne tellement.
-Le grand Olivier ! C'est comment ?
-Ehhhh mon brâ môgô Moussa! Voilà moi!
Les deux hommes se serrent dans les bras virilement en faisant un tapage de fou. Coralie regarde le fameux Moussa, il est grand et baraqué comme un catcheur Américain, son teint est d'un noir intensément mal entretenu, mais quand même beau. Sa coupe à la tectonique bien centrée au milieu de son crâne avec une touffe jaune. Il regarde Coralie qui baisse immédiatement les yeux, il la pointe du doigt banalement en demandant qui c'est.
-La nouvelle !
-Tu t'appelle comment ? Il s'adresse à Coralie sans violence mais avec autorité.
-Co...Coralie !
-Moi c'est Moussa! Tu as quel âge ?
-14 ans!
-Viens! Il l'invite à se lever et la détaille, elle est frêle, mais ses formes sont prometteuses observe-t-il.
-Bon champi, moi je go! La mère dit qu'elle va te capter après !
-Yafoy! A ciao frère !
-Reste sage petite !
Il part laissant Coralie seule avec Moussa, qui la détaille tranquillement en tirant sur sa cigarette.
-Tu as mangé ?
Elle hoche la tête pour dire non, depuis hier elle n'a pas mangé et elle a faim.
-Ok suis moi donc! Il la devance et elle court presque pour être à son niveau, il se stoppe devant un coin de garba et lui dit de s'assoir pendant qu'il commande.
-Choco, faut faire poisson 400fr et attieké 50fr chap chap. la veille mère, faut lâ l'eau 50fr!
Il la laisse manger pendant qu'il cause avec d'autres personnes qui ont l'air de le connaître, il a l'air de maîtriser le secteur.
Lorsqu'elle termine, il l'emmène où elle logera désormais. Dans une chambre miteuse et coincée, selon ses dires elle y dormira avec 3 autres filles qui présentement vendent de l'eau, chips et compagnie sur la route.
-Tu commence demain ! Ici si tu ne respectes pas les règles on te sanctionne. Tu dois te réveiller toujours à 5heures du matin pour puiser l'eau, t'apprêter et être sur la route à partir de 6heure pour vendre ce qu'on te donnera.
A partir de 19h tu rentre à la maison et tu as intérêt à avoir tout vendu, tu ne dois rien perdre. A 20h tu commences un autre travaille et tu dois avoir au moins deux clients si tu n'as rien eu. Tu passes que une heure avec chaque client, c'est moi qui récupère l'argent. Si tu travailles bien, t'auras ta propre chambre. Tu as compris ?
- Oui!
-Tu finis de travailler à 00h et tu rentre dans ma chambre pour en ressortir à deux heures !
Coralie tremble en entendant tout ce qu'il raconte, pourra-t-elle se reposer ?
-Tu commence demain ! Si tu as un souci tu me dis, tu ne couches pas avec un homme gratuitement !
Elle hoche la tête, c'est la seule chose qu'elle puisse faire, tout ceci la répugne et elle maudit intérieurement Francis et sa mère.
-Bienvenue Coco! Dit-il simplement en lui touchant la tête.

Juste une porte. [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant