La nuit commençait à tomber lorsqu'Astrid sortit de sa maison.
Elle se dirigea vers la forêt. Elle savait exactement où était cette fête. Un soir où elle avait retrouvé Liam en cachette, ils avaient aperçu le feu de camp de loin et entendu des éclats de voix. Ils s'étaient empressés de s'éloigner, pour ne pas être repérés.
Cette nuit était belle. Astrid observait le ciel tout en marchant, les étoiles brillaient d'une douce lumière pareilles à des milliers d'ampoules suspendues au plafond du ciel. Elle avait vu dans ses manuels que les étoiles étaient de petites boules de gaz incandescentes qui produisaient une lumière bien moins forte que celle du soleil et qu'on ne pouvait donc voir que la nuit. Elle avait encore du mal avec le terme gaz, mais s'enorgueillait de savoir toutes ces choses que sans doute personne dans le village n'avaient étudiés.
Ses manuels... N'étaient pas au programme des leçons du maître d'école. Astrid les avait en quelque sorte volé... Dans la réserve. Elle n'avait jamais partagé sa trouvaille - à part avec Liam - car ils semblaient interdits... Jamais le contenu qu'ils renfermaient n'avait été abordé en classe et... Astrid se demandait même si les adultes en connaissaient au moins leur existence.
Sa mère lui avait d'ailleurs toujours dit que ces étoiles étaient les âmes bonnes qui étaient montées au ciel et nous irradiaient toujours de leur lumière à travers le paradis. Un tissu de mensonge aux yeux d'Astrid désormais. Elle ne comprenait pas pourquoi tout ce qu'elle avait appris dans ses manuels cachés n'était pas étudié à l'école. Elle savait qu'un jour où l'autre, elle découvrirait pourquoi. Un jour, elle quitterait le Village et irait enfin voir le monde de dehors, avec Liam - du moins elle l'espérait encore.
Les tiges de blés lui effleuraient délicatement les mollets. Elle sentait de petits insectes qui lui grimpaient accidentellement dessus. Elle les enleva en les balayant de sa main pour qu'ils retournent dans leur milieu et avança plus prestement, voyant l'heure tourner à sa montre. Elle regarda la forêt autour d'elle, et pour la première fois, eu l'impression que celle-ci l'engloutissait. Plus elle s'enfonçait dedans, plus celle-ci devenait oppressante.
Et en même temps, elle la rassurait un peu, elle avait l'impression d'être en sécurité entre ces branches et ces arbres, protégée par les innombrables feuilles. Ces bois avaient quelque chose de spécial au yeux de la jeune fille, comme s'ils avaient vécu quelque chose, comme s'ils avaient tout vu. Elle avait l'impression que ces conifères étaient vieux, très vieux, vieux comme le monde. Ils la faisaient se sentir toute petite, insignifiante même.
La petite pensée de réconfort entre ces arbres s'envola au moment où elle sentit une présence. Un courant d'air froid lui avait effleuré la nuque et chaque bruissement lui faisait penser que quelqu'un la suivait. Les ombres des branches la faisait devenir méfiante envers chaque bruit.
Lorsqu'elle aperçu enfin l'orée de la forêt, elle accéléra le pas. La lumière du feu commençait à se refléter de plus en plus au fur et à mesure qu'elle se rapprochait. Le sentiment d'être suivie s'arrêta lorsqu'elle déboula dans la clairière avec le feu de camp au milieu. Elle vit du monde autour, et fut rassurée pour la première fois de voir ses camarades de classe. Elle avait vraiment eu l'impression qu'on la suivait. Elle se retourna une dernière fois vers la forêt mais ne vit aucune ombre suspecte.
Elle s'était peut-être fait des idées ?
Enfin, elle continua son chemin dans le champ jusqu'à arriver à bonne distance du brasier. Elle ne vit pas la silhouette s'adosser contre le tronc d'arbre à l'entrée de la forêt. Elle ne la vit pas qui la fixait, qui jugeait ses moindres faits et gestes. Elle ne vit pas ses cheveux bruns tomber légèrement sur ses yeux bleus glacés. Elle ne vit pas son regard triste. Déçu.
VOUS LISEZ
RÉMINISCENCE Tome I : L'ombre du souvenir
Science FictionEt si vous ne pouviez même plus vous fier à votre esprit ? Quand Astrid Fills découvre que son monde et tout ce qu'elle connaît n'est qu'une vulgaire mascarade, elle ne peut plus faire semblant. Semblant qu'elle est comme tous les autres habitants...