La chambre 403

Virginie

- Bon ! Maintenant, il faut trouver la sortie... ai-je pensé tout haut

D'un côté comme de l'autre, le couloir semble s'étendre à l'infini.

- Il n'avait pas menti, le bougre !

Je frappe à la porte d'en face pour demander de l'aide. Une jeune fille habillée en soubrette m'ouvre.

- Bonjour, ai-je abordé, je suis votre voisine de chambre... Pourriez-vous m'indiquer la sortie de l'hôtel s'il vous plaît ?

- Vous avez beaucoup d'humour !s'exclame-t-elle, hilare. Ma maîtresse va vous adorez. Attendez un instant je vous prie.

Elle part avant que j'aie le temps de lui assurer mon sérieux. Puis arrive à son tour une tennisman cinquantenaire.

- Enchantée nouvelle voisine ! Je m'appelle Virginie. Je vous en prie entrez !

Elle me tire à l'intérieur, étouffant mes timides protestations. La porte mène à une grande cours intérieure lumineuse. Les murs sont décorés de rosiers grimpants jaunes et de mosaïques couleur pastel. Au centre de la cours trône superbement la statue d'un femme nue, déversant l'eau d'un vase dans la fontaine à ses pieds.

Virginie et moi nous installons autour d'un table métallique blanche. Elle agite une petite cloche puis un homme avec un collier de chien s'empresse de nous servir une infusion et des petites pâtisseries. Alors qu'il va pour retourner d'où il vient, il me regarde un instant par dessus sous épaule. Je lis la détresse dans ses yeux.

- Marcus ! crache-t-elle à l'homme qui s'enfuie la tête baissée avant de revenir à moi. Ne faites pas attention à lui, c'est mon ex mari. Je prends un malin plaisir à me venger de tout ce qu'il m'a fait subir mais mon ancienne vie.

- Les verseaux ne sont pourtant pas connus pour être rancuniers, dis-je en désignant la fontaine de la tête

- Je ne fais que dresser un chien égaré, on peut voir cela comme un acte de générosité... répond-elle avec un air faussement innocent

- Il est vrai que Marcus transpire la reconnaissance !

- Je crains qu'il y aie méprise ma chère, Marcus n'est pas mon ex mari mais mon nouveau ! Je l'ai façonné, il est mon idéal masculin ! Et son simple nom fait trembler de peur mon ex mari !

- Eh bien ! J'espère le rencontrer un jour...

- Je suis navrée de vous dire qu'il vous faudra repasser. À vrai dire je ne sais pas même où il se trouve. Il est en train de me préparer une surprise pour notre anniversaire de mariage ! Comme j'ai hâte !

- Depuis combien de temps êtes vous mariés ?

- Difficile à dire, ici le temps n'a aucun poids vous savez...

- Je vois... L'éternité ne vous paraît pas trop longue ?

- Si hélas ! Après avoir tout expérimenté, plus rien ne parvient à m'étonner...

- Comment faire dans ce cas ?

- Plusieurs options: accepter son quotidien ennuyeux, détruire ses créations et effacer sa mémoire pour repartir de zéro, ou encore demander au maître d'hôtel de revenir à la vie...

- Revenir à la vie ? Est-ce le seul moyen de sortir de cet hôtel ?

- À ma connaissance oui. C'est ce qu'a fait l'homme qui occupait votre chambre avant vous.

- Parlez moi de lui ! Je suis curieuse...

- Oh je suis bien heureuse qu'il soie parti ! C'était un anarchiste, je n'avais jamais vu un tel chaos dans une chambre ! Et entre nous soit dit, je le soupçonnais d'être également sataniste...

- Une telle personne au paradis ?

- Je n'en suis pas sûr mais je pense qu'ils ne font en réalité aucune sélection à l'entrée...

- Ce serait donc pour cela que l'on préfère parler d'hôtel: dire "paradis" n'aura aucun sens si l'enfer n'existe pas !

- Vous raisonnez bien. Mais pourquoi procèdent-ils ainsi ?

Je réfléchis un instant.

- Peut-être parce que chacun lorsqu'il agit pense bien faire. Partant de ce principe, qui mérite réellement l'enfer ?

- Que de théories mon amie ! Seul le maître d'hôtel connait la vérité. Mais ce vieux fou ne veut rien nous dire !

- Aurait-il des choses à cacher ?

- Il prétend que la magie de l'émerveillement réside dans l'ignorance. Quel beau parleur !

- Rassurez-vous: nous avons encore l'éternité pour le faire parler !