Partie 1 - 5 : Palakuu

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Je suis enfin en vacances ! Cette fin d'année a été très longue. Je vais essayer de finir d'écrire Hiero avant la rentrée.

J'ai déjà une autre idée de projet une fois celui-ci terminé. Je vous donnerai plus d'infos une prochaine fois, je ne suis pas encore sûre de moi.

J'espère que ce chapitre vous plaira !

Point de vue d'Anna

Lorsque je me réveillai, les paupières encore closes, je me surpris à penser que j'étais chez moi. Malheureusement, la consistance de ce sur quoi j'étais allongée m'indiqua que tous les évènements de la veille étaient réels. Cette matière confortable ne se trouvait pas dans mon monde.

J’ouvris les yeux et découvris une pièce meublée uniquement par une Lise endormie. Je me levai. Le lit sur lequel j'avais passé la nuit ressemblait à un rectangle de terre battue. On aurait pu s’y méprendre s'il n'était pas de cette couleur indigo et de cette consistance improbable. Le sol, quant à lui, était d'un gris clair tirant sur le bleu. Il était de la même couleur qu'à l'extérieur.

Je décidai de m'aventurer dans la maison. C'était minuscule : trois petites pièces entourées de murs constitués d'une espèce de paille brunâtre laissant passer la lumière. La première pièce était celle dans laquelle j'avais dormi. Aucune porte ne la séparait d'un étroit couloir. Un peu plus loin dans ce dernier, une deuxième pièce devait être la chambre de la personne qui habitait ici. À l'opposé, la troisième salle abritait la porte par laquelle nous étions entrés, ainsi que mon père, son frère et la propriétaire des lieux en pleine discussion. Je ne savais pas pourquoi, mais j'avais l'intuition qu'il s'agissait d’une femme.

Sans me poser plus de questions, j’avançai dans le couloir. Je ne le percevais que maintenant, mais depuis mon réveil, un bruit sourd mettait à vif mes oreilles. Cela provenait de l'extérieur : des marchands proposaient des produits à des clients, comme la veille.

Toujours dans le couloir, je percevais la discussion à voix basse des trois adultes. L'horrible voix grinçante de la veille parlait :

– Eh ben mes agneaux, je vous trouve tellement mignons, à vous préoccuper de ma santé ! Mais je vais bien, même très bien, je ne sors pas de chez moi et ça me va. Mais vous, mes agneaux ? J'ai vu les jumelles, elles sont adorables ! Quel âge ont-elles ?

Alain répondit. Sa voix basse m’empêcha de bien comprendre ce qu'il racontait. Je n’aimais pas notre hôte, sa manière de parler me paraissait désagréable. J’hésitai un instant avant de me signaler, instant durant lequel la propriétaire des lieux se remit à parler :

– Oh, elles sont toutes jeunettes dans ce cas !

Et elle éclata d'un rire déconcertant, à mi-chemin entre le hennissement et le barrissement. Je me dévoilai alors, sortant de la pénombre du couloir. Notre hôte s'interrompit pour me scruter de la tête aux pieds. Je m'arrêtai également. Mon cœur aussi, semblait-il. Elle était hideuse. Le nombre de cheveux sur son crâne se comptait sur les doigts de la main. Son visage flasque avait l'air de dégouliner et son long cou maigre paraissait ne pas réussir à tenir son immense tête. Son corps était frêle et maigre, sa peau laiteuse recouverte de plaques d’un vert douteux.

Ses pieds ainsi que ses mains étaient proportionnelles à sa tête, c'est-à-dire énormes. Elle agrippait une canne de la même épaisseur que son bras.

Elle me dévisageait comme un animal curieux, et cela me dérangeait. Ses yeux étaient d'un gris plus foncé que clair, et à l'intérieur on distinguait un éclat intriguant. Puis elle fixa un point derrière moi, et un sourire déforma son visage. Je me retournai, et découvris que Lise s'était réveillée.

– Ben, mes agneaux, vous ne me présentez pas ?

Alex prit la parole :

– Anna, Lise, voici Palakuu.

– Vous ressemblez tellement à Tatari ! s'exclama-t-elle en gloussant.

– Tatari est votre mère, précisa Alex.

Palakuu gloussa à nouveau.

– Qu'ils étaient mignons, tous les trois, lorsqu'ils sont venus chez moi ! Ils voulaient regagner leur monde, car il parait que le nôtre est trop dangereux pour une jeune femme enceinte !

Alex semblait désireux de changer de conversation :

– Bref, tu sais ce qu'on doit faire pour échapper aux Rooks, Palakuu ? Où aller ?

– Moi, je ne sais pas, répondit Palakuu. Mais je connais quelqu’un. Vous n'avez qu'à aller à Wanui, et demander à voir Nivôse.

– Wanui ? Qu'est-ce que c’est ? Et qui est Nivôse ? demanda Alex.

– Wanui est l'une des plus grandes villes du royaume. Et Nivôse est l’ange le plus important de Wanui.

Cette réponse sembla suffire à Alex.

Comme la veille, nous attendîmes la nuit afin de sortir de la maison. Nous passâmes la journée à discuter avec Palakuu. Je m’habituai à son apparence repoussante et découvris sa personnalité haute en couleur. Elle nous témoignait beaucoup d’affection. Elle racontait ses aventures, j'en suspectais certaines d'être fausses, mais c’était intéressant.

Lorsque nous partîmes pour Wanui, Palakuu sembla triste. Quant à moi, j’étais assez soulagée. Cette Nivôse nous permettrait peut-être de regagner une vie normale, et la compagnie de Palakuu était certes divertissante, mais me mettait mal-à-l’aise parfois.

Le trajet dura longtemps, je n'avais rien pour mesurer le temps mais il me semblait que nous parcourûmes une distance plus de cinq fois plus grande que pour aller de la plage au village de Palakuu.

Le paysage se composait de plaines immenses parsemées de collines et de quelques arbres esseulés. Tout était verdoyant. Encore une fois, ce qui me surprit fut les couleurs de tout ce qui m'entourait : l’herbe rouge foncé, les fleurs bleu marine, beiges, blanc rosé et vert-gris pâle, les arbres pour la plupart jaune orangé avec des feuilles rouge-ocre clair…

Mais au bout de quelques quarts d'heure passés à marcher et à regarder le paysage, je me mis à fatiguer. Bientôt, mes jambes se mirent à m'élancer, ma respiration devint saccadée et un point de côté apparut sur mon flanc droit. Après un moment à endurer ce calvaire, je demandai une pause. Dès qu'elle fut accordée, je m'allongeais sur le dos en étoile de mer. Un caillou faisait souffrir mon dos, mais je ne m'en préoccupai pas et fermai les yeux. C'était la nuit, mais il ne faisait pas si froid que ça. Alors que j'étais en débardeur, je n'avais même pas la chair de poule.

Nous nous remîmes en route. Je traînais mollement à l’arrière. Alex commençait également à se laisser distancer. J’enviai l'endurance de Lise et Alain.

Pendant le trajet, je me rendis compte de certaines petites choses : dans ce monde, certains besoins quotidiens et incontrôlés n’avaient pas lieu. Je n'avais pas encore ressenti la faim, la soif ou l'envie d'aller aux toilettes. Cette observation m’étonna.

Ce fut après avoir escaladé une colline plutôt haute que nous aperçûmes Wanui.

La ville était immense, et les maisons ne ressemblaient pas aux huttes du village de Palakuu. Un immense mur d’enceinte entourait Wanui. Contrairement à chez Palakuu, une vive agitation régnait encore ici. Nous n'étions pas fatigués, car nous avions dormi à des intervalles beaucoup trop courts les jours précédents. Alex décida donc d'aller voir Nivôse tout de suite. Nous fîmes le tour du mur jusqu'à trouver une entrée ouverte. Il y avait beaucoup de gens, même s’ils étaient moins nombreux que dans certains endroits de notre monde.

Nous regardâmes Alain, inquiets. Mon oncle était sujet à des crises d'agoraphobie et de claustrophobie. Ici, c'était exactement le genre d'endroits spacieux et bondés qui le faisait paniquer. Pourtant, il paraissait calme, même agacé que l'on s'inquiète pour lui.

Nous continuâmes d'arpenter Wanui.

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