6. Début

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3 mois plus tôt
Jaura Elzevanki

Il y a cet homme quelques tables plus loin qui n'arrête pas de me lancer des regards peu discrets. Mêmes mes deux amies déjà bien éméchées l'ont remarqué.

Et arrive ce moment où il se lève. Il est plutôt grand, il a un bon visage qui inspire la joie et la confiance. Son sourire ? Craquant. Il s'approche de plus en plus de notre table, et vient discuter avec moi. Le premier contact est difficile, son allemand n'est pas bon, mais l'essentiel est transmis entre nous, je me retrouve donc avec un papier à 10 chiffres entre les mains.

- Allez, range ça dans ta poche et on y va »

On me tire déjà le bras pour me traîner hors du bar. Hendrike et Naomi me tiennent les mains pour être certaines que je ne les lâche pas au dernier moment.

- J'ai un super plan pour ce soir » nous dit Hendrike

Ce n'est jamais bon signe, elle qui est toujours fourrée dans des endroits impossibles.

- Et comme ça tu pourras faire ta première fois ! » m'annonce Naomi

- Mais j'ai déjà fait ma ... »

- Je parle en drogues idiote ! Je sais bien que tu t'es tapé mon frère »

Détail gênant qu'elle adore me rappeler. Trop d'alcool, un black-out et son frère dans mon lit. Je suis déjà un peu une habituée des soirées qui finissent mal, mais cette fois-ci l'enjeu sera plus grand.

On finit par arriver devant un grand hangar désaffecté. Il fait nuit, il y a une très légère pluie : en soit, rien de rassurant. Mais maintenant que je suis là, il va falloir y aller, je ne peux plus vraiment faire marche arrière au risque de me perdre dans la zone industrielle. Mon téléphone ne s'allume plus, je n'ai plus de batterie. Je vais donc même devoir rester jusqu'au bout.

Hendrike tire la gigantesque porte du hangar sur quelques dizaines de centimètres et nous fait signe de rentrer. Et la referme après son passage. Un grand bruit sourd résonne dans ce grand espace vide.

Un groupe de personne discute au centre du hangar, autour d'un baril qu'ils ont mis en feu pour éclairer les environs. Je reconnais quelques têtes, et d'autres me sont totalement inconnues. Il y a Pia, Frenkie et Michelle. Pour le reste, les noms ne seront pas retenus.

Les discussions passent, le temps passe et finit par arriver une proposition qui changera le court de ma vie.

- Il me reste un peu de coke et d'oxys, ça vous intéresse les filles ? »

Pia et Hendrike répondent positivement, suivies par Michelle et Naomi. Je reste sur la réserve, je n'ai pas trop envie de toucher à ça, je connais ma facilité à tomber dans de mauvaises passes.

- Allez, ne fait pas ta prude, on est là pour s'amuser ce soir, alors détend toi un peu ! » me dit Pia en me traînant vers une petite table

- Explique-moi comment faire alors »

Elle prend sa dose, avant de m'expliquer point par point comment faire sans se louper, ni se faire mal. Les détails ne seront pas retenus par l'histoire.

Le rail est devant moi et quelques secondes plus tard il ne l'est plus. Mon nez brûle, la sensation est loin d'être agréable jusqu'ici.

- Et maintenant, tu attends que ça fasse effet » me souffle Naomi à mon oreille.

Les dix premières minutes, je ne ressens rien.

Puis d'un seul coup, je me rends compte que je transpire à grosses gouttes et qu'il fait une chaleur insoutenable ici dans le hangar. Je retire mon haut, me retrouvant en soutien-gorge devant mes amies et de parfaits inconnus. Pudique d'habitude, c'est ma première surprise des effets de la drogue : mon identité change.

- Wouah, il fait une chaleur dingue ici »

L'ensemble des personnes présentes s'amusent de ma remarque.

Et puis ma perception des choses commence à changer. J'ai l'impression d'avoir un bras de plusieurs mètres, de voir des formes plus carrées qu'elles ne le sont, mais aussi d'avoir des fourmis qui courent dans tout mon corps.

Tous mes sens sont peu à peu affectés et vient ensuite le pic.

L'euphorie, où tout devient sans importance et où je n'ai plus aucune limite.

Je n'ai aucun souvenir de la fin de la soirée, mais il y a quelque chose dont je me souviens parfaitement.

C'est cette faim au réveil. Cette faim d'y retourner, de retrouver ces sensations déjà dissipées et d'y goûter de façon plus fréquente. Mais le corps finit par s'y habituer aux charges que je lui inflige, et je n'arrive pas à retrouver cette extase.

Alors je passe de la cocaïne à l'oxy. Puis de l'oxy à des substances au nom imprononçable.

Et puis c'est la descente aux enfers.

Overdose | Lucas HernandezOù les histoires vivent. Découvrez maintenant