Mélina et les planètes

Chapitre 9 - Céleste

Il fallait bien se l'avouer, la nourriture ici était exceptionnelle. Tout en léchant le contour de sa gamelle, Céleste observait la flamme blanche qui dansait contre le mur. Quel était cette étrange créature ? Pourquoi la narguait-elle dans sa cage de verre ? Son instinct de chasseuse était en alerte. Elle délaissa son reste de pâté et monta sur l'étagère au dessus du bureau. La médaille que Lorna lui avait mise pendant sa sieste bougea et émit un tintement désagréable. Espérant que le bruit n'ait pas fait fuir sa proie, Céleste leva la tête. Super, sa cible n'avait pas bougé. Toutefois, la torche qu'elle visait était beaucoup trop haute. Elle posa ses griffes sur le béton froid. Était-il suffisamment solide pour qu'elle puisse l'escalader? Les crochets se plantèrent dans le mur. Ravie, elle se hissa d'un mètre. Le ciment s'effrita et Céleste glissa. La trace de ses pattes était maintenant gravée dans la paroi grisâtre.

Après un deuxième essai infructueux, le chaton chercha un autre chemin. Il lui était plus difficile de parvenir à ses fins lorsqu'elle ne connaissait pas le terrain. En effet, la pièce dans laquelle elle s'était réveillée lui était inconnue. Couchée sur un coussin de velours noir, elle avait ouvert un oeil. Une délicieuse odeur de saumon s'était emparée de son museau. Elle l'avait suivit et avait dégusté son repas sans réaliser qu'elle n'était plus chez elle. Pourtant, le goût l'avait intriguée. Son organe de Jacobson était en alerte. Jamais Lorna ne lui avait servie un tel délice.

Elle avait d'abord supposé qu'il s'agissait d'une récompense. Puis, sa langue avait rapé contre le récipient. L'habituel goût de métal glacé avait disparu. Étonnée, elle l'avait regardé. Son minuscule bol en inox avait été remplacé par un contenant blanc. Celui-ci semblait être en porcelaine antidérapante. Se souvenant avoir cassé plusieurs bibelots en se baladant sur la bibliothèque, Céleste fut déconcertée par le choix de Lorna. Quelque chose clochait. Et d'où venait cette lumière ?

C'est là qu'elle l'avait vue. Elle l'hypnotisait et l'obsédait. Il fallait absolument qu'elle l'attrape.

En grimpant sur le lit-mézanine, elle avait pu prendre de la hauteur. La torche restait malgré tout hors d'atteinte. Frustrée, Céleste décida d'inspecter la chambre. Munie d'une unique fenêtre ronde, la salle était relativement sombre et étroite. Pas grave, le manque de luminosité ne la dérangeait pas.

Chaque meuble semblait vieux et usé. Comme tout était trop flou de loin, elle s'approcha pour mieux voir.

Sur le bureau, elle remarqua des tâches de crayon incrusté dans le bois. La grande armoire, quant à elle, était bancale et abîmée. L'une des quatre portes était complètement détruite et laissait entrevoir l'intérieur. Les vêtements y étaient jetés en boule. Les livres étaient éparpillés sur les chaussures. Les jouets dépassaient par l'ouverture.

D'un autre côté, sur la gauche de la chambre, tout semblait neuf et ordonné. Hormis les gamelles et le coussin de velours, Céleste y découvrit un gigantesque arbre à chat gris doté de hamacs ainsi qu'une litière beaucoup trop grande pour elle. Posé sur un meuble constitué de griffoires, un gros pot de cataire diffusait un parfum exquis.

Elle s'en approcha à pas feutrés et se sentit immédiatement détendue.

Cet endroit est bien sympathique, pensa le chaton en s'étirant. Elle s'allongea sur un coin d'herbe jaune qui avait étrangement poussé sur un carré de sol et s'endormit.

Peu de temps après, un grincement la réveilla. Elle reconnût immédiatement le bruit caractéristique d'une porte qui s'ouvre. Un garçon à la démarche pesante marcha vers elle. Gentiment, il passa ses doigts sur son pelage. Céleste détecta aussitôt l'odeur de saumon sur sa peau. Elle ronronna. Si c'était lui qui fournissait la nourriture, c'était son nouveau meilleur ami.