18. Trois belles gueules [Automne ]

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Je pensais qu'il allait être plus réticent à venir me parler juste avant un entraînement, mais non. Et nous nous tenons là, au milieu du couloir, devant la porte de la salle, sans rien se dire. Il passe, nerveusement, sa main dans ses cheveux qui sont pourtant parfaitement décoiffés. Je ne peux m'empêcher de détailler son visage aux formes parfaites et ses yeux de cristal qui me transpercent à chaque regard. Il finit par se racler la gorge, me sortant de ma rêverie.

" Alors ? S'impatiente-t-il.

- Pourquoi à chaque fois qu'on se parle, tu es agressif comme pas possible ? Me lancé-je.

- Je suis pas agressif, grogne-t-il.

- Mais regarde, tu viens de l'être ! Et en plus, ce n'est pas qu'avec moi, j'ai vu les regards noirs que tu jettes à Albin...

- Donc c'est de ça que tu veux me parler, d'Albin ?

- Non, répliqué-je, ce n'est pas du tout de ça que je voulais parler avec lui.

- Mais si, ton petit Albin chéri ! Raille-t-il.

- Ce n'est pas mon Albin chéri !

- Et pourquoi tu dors dans son lit alors ?

- Pour que tu ne me fasses pas de mal, je regrette mes paroles aux moments où elles franchissent mes lèvres.

- T'as peur de moi ? Demande-t-il, blessé.

- Ce n'est arrivé qu'une fois, de toutes façons.

- C'est ce qu'ils disent tous, vous avez de quoi vous protéger au moins ? Grimace-t-il.

- Mais il n'y a rien entre nous !

- Mais bien sûr... Bon, si on est là pour parler d'Albin et toi, je vais y aller. Annonce-t-il en se rapprochant à grands pas de la porte de la salle.

- Attend ! M'écrié-je, le faisant se retourner. Je voulais te parler de mon frère.

- Je t'écoute, dit-il en revenant sur ses pas.

- Tu le connaissais bien, pas vrai ?

- Mieux que personne, son regard se perd dans le vague, comme s'il était reparti à cette époque, aux côtés de mon frère.

- C'était ton ami, affirmé-je.

- Mon meilleur ami.

- Il y a une chose qui m'échappe. Comment l'as-tu connu, alors qu'il n'est resté qu'un an et que si tu avais été dans son armée, tu serais avec la Meute ? Remarqué-je.

- Aléna, elle était dans mon armée, et c'est pour elle qu'il est venu sur Thestias.

- Comme s'il avait eu le choix, ironisé-je en me rappelant de mon retour de l'école où mon frère ne m'attendait pas à la maison.

- Lui, bien sûr qu'il avait eu le choix ! Il a rendu une copie blanche ! Me secoue-t-il.

- Non...ce n'est pas possible... Bégayé-je, mon frère...il n'aurait jamais...

- Il était amoureux, Automne, murmure Maël, d'une voix plus douce.

- Pour Aléna ? Il m'a laissée pour elle ? M'écrié-je, au bord des larmes.

- Dès qu'il est arrivé ici, il est venu la voir, dans notre dortoir, tous les soirs. C'est là qu'ils nous a rencontré, les jumeaux et moi, raconte-t-il."

Mon frère m'a abandonné pour une fille ? J'aurais dû le savoir, il était très intelligent, il n'aurait jamais eu le pire résultat de la région sans le faire exprès. Le poignard de la trahison est si aiguisé qu'il pourrait charcuter un individu de l'intérieur en quelques secondes. J'imagine mon frère, entrant de le réfectoire et cherchant Aléna du regard. Je le vois, avec Maël et Edward en train de rire. Il a eu une vie ici, mais il y a une chose qu'il désirait plus qu'Aléna, c'était la Meute. La même chose que Maël.

" Qui a voulu la Meute en premier, lui, ou toi ? L'interrogé-je.

- C'est moi. Il est le premier avec qui j'ai partagé mes rêves et mes ambitions. J'ai fait naître en lui l'envie de la Meute, mais je m'attendais pas du tout à ce qu'il la rejoigne. Ton frère nous a tous eu. Le dernier combat de la saison était son armée contre la nôtre, il connaissait toutes nos stratégies. Sa voix se brise. Il a eu la Meute, et nous la Horde. Les jumeaux l'ont accepté, mais Aléna et moi sommes restés.

- Je ne le savais pas, sangloté-je en me laissant tomber par terre, un sentiment de culpabilité grandissant en moi.

- Tu ne pouvais pas savoir, me console-t-il en s'asseyant à côté de moi.

- Tu lui en veux ?

- Beaucoup trop, répond-il honnêtement, passant un bras autour de mes épaules.

- Je ne pensais pas qu'il était comme ça, avoué-je, un frisson me parcourt à son contact.

- J'aurais préféré te laisser une bonne image de lui.

- Lorsque je le reverrais, je lui mettrais mon poing dans sa belle gueule, m'énervé-je.

- Sa belle gueule ? Rit-il.

- Je sais reconnaître lorsqu'un garçon est beau, que je l'aime, ou pas, argumenté-je.

- Ah d'accord, est-ce qu'Albin à une belle gueule ?

- Oui, répliqué-je en laissant ma tête tomber sur son épaule.

- Ok.

- Mais toi aussi, tu as une belle gueule, ajouté-je en comprenant mon erreur. Ce n'est pas faux, mais c'est surtout pour ne pas blesser son ego.

- C'est vrai ? Sa voix grave est pleine d'espoir.

- Non, c'était juste pour que tu ne te sentes pas rejeté, rétorqué-je.

- T'as un sacré caractère, remarque-t-il en posant sa tête sur la mienne.

- Je sais.

- Comme ton frère.

- Je ne finirais pas comme lui, affirmé-je.

- T'as pas intérêt, je sens son souffle chaud sur le dessus de ma tête.

- Ne t'inquiète pas pour ça, assuré-je, m'imprégnant de son odeur masculine.

- Je viendrais avec toi, pour lui casser sa belle gueule, propose-t-il en me serrant encore plus contre lui.

- Pas trop quand même, hein, il reste mon frère !"

La porte de la salle d'entraînement s'ouvre alors, nous faisant sursauter. La tête d'Armand sort par l'embrasure. Losqu'il nous voit, enlacés par terre, un sourire moqueur se forme sur ses lèvres. Je réalise alors dans quelle position, plutôt inappropriée, je me lève d'un coup, me détachant de lui. Chaque centimètre carré de ma peau qui était en contact avec la sienne me brûle.

" On vous attend, nous annonce Armand, qui peine à ne pas exploser de rire.

- On arrive, l'informe son commandant, avant de passer par l'ouverture, sans arrêter de passer ses mains dans ses cheveux.

- Tu n'as rien vu, murmuré-je au garçon aux cheveux roses lorsque je passe à côté de lui.

- Oh que non, je n'ai pas envie de me faire trucider, réplique-t-il en riant."

***

voilà pour ce chapitre : ) 

J'espère qu'il vous a plu ; ) 

Que pensez vous de rapprochement Automne/Maël ? 

<3

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