Et il est là, son vieux bob bleu sur ses cheveux gris, debout dans le métro. Comme tous les jours, me direz-vous, il sort son petit appareil, lance la musique et il chante dessus, encore et encore, criant à qui veut l'entendre que l'argent ne fait pas le bonheur. Et il continue de chanter, sur son jovial air d'accordéon enregistré, le même depuis longtemps... Assis en face, à côté de la porte, je regarde le sol sali par le passage journalier des parisiens. À côté de moi, un vieux journal traîne, sale et déchiré sur un coin. Le métro s'arrête, les portes s'ouvrent, les gens sortent, entre et on repart, pour revenir, toujours sur la même ligne. C'est d'un lassant exaspérant, cette ville hautaine et fière, agressive et enjouée. Mais ils sont pourtant là, écoutant ce pauvre homme au gilet sale.
Je tourne nonchalamment la tête vers la vitre, le métro s'arrête, une jeune fille pressée sort tandis qu'un homme de quatre ans son aîné s'affaire à la draguer. Tous ces gens tellement différents, bloqués dans un tunnel durant trois minutes, trois minuscules minutes, si infimes. Ces trois minutes, tout le monde s'arrête dans sa course quotidienne pour regarder alentours, observer les gens, rêvasser sans se préoccuper du moment présent.
Le chanteur du métro sort, et change de wagon, les portes se ferment et la musique s'arrête. Devant moi, un jeune homme songeur, le visage fin surmonté d'une casquette. Soucieux, il remonte son short. Où va-t-il ? Je ne sais pas. Que va-t-il faire ? Je l'ignore. Je peux juste imaginer, inventer une vie à ces personnes que je ne connais pas, me perdre brièvement dans ces pensées, juste le temps de deux stations.Et cet homme, qui chantait, que lui est-il arrivé ? Il m'avait l'air jovial, drôle et sympathique, mais les apparences trompent trop souvent pour juger ainsi. Mon regard s'arrête sur les barres métalliques permettant de s'accrocher. Chaque jour, des dizaines de dizaines de personnes passent et repassent. Combien de personnes ont-elles vu ? Depuis combien de temps étaient-elles là, immobiles et froides ? Des milliers de questions tournent, virevoltent dans mon esprit songeur. Ce moment là, dans cet endroit mal entretenu, sale et brutal, je l'aime bien. Dans ce moment là, la course perpétuelle s'arrête, et nous ne faisons rien d'autre que penser. Alors on regarde, on s'égare, on rêvasse jusqu'à ce que les portent s'ouvrent de nouveau. Alors le brouhaha revient, la vue reprend son train, et tout recommence.
La voix monocorde de la compagnie annonce le prochain arrêt. Le métro s'arrête, les enfants tombent en avant et je saisis ma valise. Je sors suivi par quelques personnes, tandis que d'autres rentrent, tous inconnus les uns aux autres. Et, oubliant toutes mes pensées, je repars, marchant rapidement vers mon train.
VOUS LISEZ
Écrits Volatiles
ContoRecueil de nouvelles, d'histoires courtes, de textes pour divers concours.