« Soudainement c'était une évidence pour Jérémy. Thibault ne comprendrait jamais ce qu'il ressentait. Autant oublier ses sentiments et se laisser emporter dans cette valse de désir qui les envahit irrémédiablement. Et au diable les souffrances, au diable les prises de têtes, puisque tout ceci n'a aucun sens, autant faire la fête. »
Cette note, je l'ai retrouvé sur mon bureau en allant travailler. Je suis professeur de littérature dans un lycée, n'importe quel élève aurait pu faire cela, seulement cette note était celle du roman de Thamia. J'ai d'abord crûs que c'était Thomas mais quelque chose écrit au verso fit cesser mon cœur de battre :
« Cela fait longtemps que tu ne m'as pas passé la suite du cours. »
Seule Thamia savait que je lui passais le cours en échange de la lecture de son roman. Je n'imagine pas une seule seconde qu'elle ait pu le dire à son frère, c'était entre nous.
D'ailleurs, son fantôme me regardait sur le seuil de la porte de ma classe.
[...]
Je m'éveillais dans ce qui semblait être l'infirmerie du lycée. Pas destinée aux professeurs normalement, cependant selon l'infirmière on m'avait retrouvé étendu dans ma classe, évanoui.
Mon cerveau embrumé ne comprenait rien de ce qu'il avait pu se passer. Thamia se tenait là, sur le seuil de la porte, et l'instant d'après moi, j'étais ici. Un songe ? Une illusion ? Je n'y crois pas. C'était bien trop réel...
Et seule la note pourra me confirmer ce que je pensais.
J'accourus alors dans un élan de folie vers ma classe, retrouver cette note que j'avais vu, malgré les cris de l'infirmière qui voulait me retenir. Et elle y trônait toujours, la note. Je la serrai dans mes bras en pleurant, en pleurant comme jamais je n'avais su pleurer pour la mort de Thamia.
« Damien... »
Dit une voix familière qui se forçait à se faire douce. Je me retournai et la revoyait.
« C'est... c'est toi ? »
Thamia acquiesça, les larmes aux yeux. Je me relevai, abasourdi, et me dirigeai presque automatiquement dans ses bras, afin de constater que c'était bien elle. Elle avait terriblement changé, ses vêtements sombres masquaient sa silhouette, mais je la reconnaissais. Je la serrai si fort, et elle bougeait si peu... Mais j'étais convaincu que ce n'était pas un rêve, tout ceci était la réalité.
Après un nouveau torrent de sanglot, que partagea Thamia, et une étreinte qui sembla durer une éternité, je pris la parole.
« Ton frère... il m'avait dit que tu étais morte... »
Je disais cela la voix tremblante, encore sous le coup de l'émotion.
« Je le suis. »
Mon visage se relevait vers elle, plein d'incompréhension.
« Je suis morte à l'instant où j'ai accepté de coucher avec toi... »
Cette phrase me fit terriblement mal. Je refusai de croire Thomas quand il parlait de ma responsabilité, et m'y voir confronté était terrible. J'essayais de la caresser, de l'embrasser mais elle fuyait mes mains.
« Cependant j'ai eu tort de fuir. J'aurais dû t'expliquer, j'aurais dû te parler... Mais ça faisait si mal... Je t'aime tellement Damien... »
Mon incompréhension ne fit que s'accroître. Je pensais qu'elle ne ressentait rien pour moi et que c'est cela qui avait rendu notre acte si terrible à ses yeux. Mais il fallait croire que c'était donc autre chose.
« Si je suis revenue c'est pour te faire mes adieux pour de bon. Et pour te dire que... mon frère... a fait une lourde erreur. Il n'aurait jamais dû faire ça. Et il s'en voudra toute sa vie. Mais je te supplie de lui pardonner, il était dans une période de transition, c'était difficile pour lui tu n'imagines pas. »
Je me décidais enfin à prendre la parole, piqué à vif.
« Et le vol de ton roman, c'était difficile ça peut être ? »
Elle soupira en regardant ailleurs.
« Damien... c'est ma décision. »
Je comprenais de moins en moins son comportement. Tant d'indulgence à l'égard d'un frère qui en méritait si peu... C'est moi qui devrait être la victime et j'ai l'impression d'être le monstre !
« Je croyais que tu ne l'avais montré qu'à moi... que c'était notre lien spécial... »
« Tu t'es trompé sur beaucoup de chose à mon propos Damien. »
« Thamia... »
« Oublie-moi, car je ne réapparaîtrais jamais plus dans ta vie. »
Je souffrais atrocement. Je me sentais si proche de la vérité et à la fois si loin. Et Thamia voulait juste m'abandonner. Est-ce égoïste de penser qu'elle est horrible de me laisser ainsi après m'avoir fait croire qu'elle était morte ? Revenir pour me reprocher sa disparition et vouloir que je pardonne son frère, n'est-ce pas terriblement mesquin ?
Et pourtant je ne pouvais me résoudre à la haïr car je l'aimais toujours autant.
J'essayai vainement de soutirer un baiser, une caresse, un dernier contact physique avant qu'elle me laisse, mais elle s'en alla comme elle était venue, comme un fantôme.
[...]
« Et... Suite à cela... qu'est-ce que tu ressens chéri ? »
« De la colère, du désespoir... je me sens abandonné. Et trahis. Et... je n'y comprends rien, Emilie. »
« Es-tu sûr de ne rien comprendre ? Ne penses-tu pas que tu fuis une réalité que tu as compris, depuis peut être plus longtemps que tu le penses, pour éviter de souffrir ou juste parce que tu refuses d'y croire ? »
« Non putain ! Thamia est une salope qui a profité de moi c'est tout ! Et je suis sûr qu'elle en a fait de même avec son frère. Si ça se trouve c'est elle qui l'a convaincu de faire ça, elle avait l'air de culpabiliser comme si elle l'avait fait elle-même. »
« ... Et que comptes-tu faire maintenant ? »
« Parler à Thomas. J'ai besoin d'éclaircissement. »
« Chéri... est-ce que tu vois que tu fais exactement ce que Thamia attends de toi ? »
« J'ai pas dis que j'allais lui pardonner ! »
« Bien... si tu le dis... »
[...]
« Salut Damien. »
« Toi et ta putain de sœur. Vous êtes en train de ruiner ma vie, vous le savez ça ? J'ai mis des années à me reconstruire. »
« Se reconstruire sur des fondations abîmés c'est juste préparer un effondrement latent. »
« Thomas je ne joue plus. J'ai besoin de vraies réponses, je comprends rien. »
Des larmes coulent le long de mes joues et Thomas vient les essuyer de son pouce. Son visage est tout près du mien, et ses yeux sont compatissants à la façon de ceux de Thamia hier. Mais cette fois ni l'un ni l'autre ne cherche à s'éloigner. Au contraire, nos visages se rapprochent et nous nous embrassons.
Mais pas un baiser plein de haine comme la dernière fois, un baiser plein de tristesse, une tristesse lourde de plusieurs années.

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Le Roman Erotique
FanficUne étudiante autrice de romans érotiques, un étudiant indélicat et des profonds problèmes de mal-être. Et tout ceci dans un terraink !