Rachel Miller et l'orphelinat abandonné [Réécriture]

Chapitre 2 : La tempête

« Allez, matelot, le pont ne va pas se nettoyer tout seul », ordonna, muni d'un sourire aux lèvres, un jeune homme à peine plus vieux qu'elle.

Elle fronça les sourcils, montrant son mécontentement, tout en s'exécutant. Le jeune marin devait prendre plaisir à taquiner la demoiselle, comme s'il était son supérieur. Il restait pourtant plus agréable que la moitié de l'équipage, qui s'excitait au passage de la jeune femme comme des chiens. Ce n'était pourtant pas faute de les avoir déjà recadrés à plusieurs reprises.

De toute manière, ils ne pouvaient que poser les yeux sur elle. L'étiquette, qu'ils étaient loin de comprendre, interdisait quiconque de s'approcher d'une femme célibataire et de classe supérieure, à moins d'y avoir été présenté. Peu d'entre eux étaient des gentlemans. Le bateau de patrouille n'était pas assez grand pour contenir un équipage important, d'où la nécessité du recrutement.

L'amiral du bateau, un vieil ami de Monsieur Miller, avait pris la jeune femme sous son aile le premier jour, puis, contraint par la quantité de travail, l'avait laissé aux mains d'un de ses matelots : Ethan Adams. Le jeune blond aux cheveux ondulés n'avait pas rechigné à prendre de son temps pour elle. Il n'était pas d'un rang assez élevé pour, en temps normal, pouvoir s'adresser à une demoiselle comme Rachel. Pour autant, l'amiral l'estimait plus enclin à une telle tâche. Il n'était pas du genre à lancer des blagues vaseuses, comme d'autres, et était bon travailleur. Parfait pour ce rôle.

Rachel ne ressentait pas de colère envers son père et sa mère. Elle savait très bien qu'après sa semaine, les choses reviendraient comme avant. Sa quête d'aventure ne se serait pas essoufflée pour si peu.

Passionnée par l'exploration et la découverte du monde, elle avait toujours opposé ses idées à celles de ses parents et de la société en général. Presque comme un rituel, tous sujets entraînaient indubitablement des disputes, et cela continuerait, même après ce voyage.

Madame et Monsieur Miller étaient des personnes importantes de leur époque. Ils mettaient un point d'honneur à respecter l'étiquette et les coutumes des grandes familles dont ils faisaient partie. Ils connaissaient beaucoup de monde, et leur fortune ne faisait que s'accroître au fil du temps.

La passion fulgurante de leur fille pour l'exploration leur était donc insupportable. En cette époque victorienne, le statut restreint des femmes ne leur permettait pas d'être autre chose qu'une bonne maîtresse de maison. Pour autant, Rachel, comme beaucoup d'autres femmes, n'acceptait pas l'infériorité qui lui était attribuée. C'est pourquoi, depuis son plus jeune âge, la demoiselle tenait tête à ses parents en usant de divers stratagèmes. Comme récemment, où elle échangea sa vie sentimentale contre un peu de liberté.

Qui aurait cru que le compromis serait aussi peu avantageux pour elle ? Qu'importe celui qu'ils trouveraient pour son mariage, elle voulait simplement pouvoir travailler et vivre de sa passion. Elle n'avait pas d'autres désirs, du moins pour l'instant.

Pressant le manche du balai contre ses doigts, elle s'arrêta à la tâche. La colère l'avait figée sur place, alors qu'elle se remémorait tout cela.

« Eh bien, qu'est-ce qui vous met dans cet état ? » demanda une voix proche d'elle.

Elle se retourna pour faire face à son interlocuteur.

« Ce... Ce n'est rien, bredouilla-t-elle.

– Vous savez, suggéra Ethan, vous avez le droit de prendre des pauses si vous vous sentez nauséeuse.

– Ça ira, merci. Votre remède est très efficace. »

Jamais elle n'avait prévu qu'elle aurait le mal de mer. Le jeune matelot lui avait fourni une fiole d'huile essentielle de menthe poivrée, lui conseillant d'en déposer quelques gouttes sur son cou. Cela avait su apaiser ses maux, jusqu'à maintenant.