› La Légende des Yeux Univers | 지국

Jour Premier - On dirait qu'on ne serait que nous

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Il avait le moelleux de son lit pas très confortable dans son dos. Il avait le blanc de son plafond légèrement tacheté dans son champ de vision. L'araignée dans le coin s'était enfuit par un petit trou. La pluie cognait contre la fenêtre de sa chambre. Et lui, il attendait. Il attendait le bruit infernal de son réveil. Comme d'habitude, il s'était réveillé beaucoup trop tôt puis il était allé ouvrir les volets de sa chambre pour laisser entrer les premiers rayons de soleil -enfin, soleil... -, avant de s'aplatir de nouveau dans son lit, puis d'attendre. Il avait des tas de choses à faire. Il n'avait envie de rien faire. Alors il attendait.

Puis soudain.

Le fameux bruit strident de son réveil. Il soupira le plus fort possible avant de l'éteindre et de s'assoir sur son lit. Il s'arma de tout le courage nécessaire pour se lever et se rendre dans sa salle de bain. Ces derniers temps, il ne prenait même plus le temps de simplement se regarder le miroir. Or ce matin, il s'était vu. Il avait froncé les sourcils à son teint blafard et ses cernes plus que conséquentes. Il avait encore maigri aussi. Il était vrai qu'il travaillait beaucoup ces jours-ci. Oui, c'était une excuse comme une autre. Qu'est-ce que cela pouvait bien vous faire ?

Jungkook était l'une de ces personnes affreusement banal. L'homme normal et basique par excellence. Sa seule particularité – enfin si on pouvait la nommer comme ça. – était que malgré ses origines asiatiques, il possédait des yeux bleus. Foncés, certes, mais bleus quand même. C'était plutôt surprenant car ses parents avaient leur yeux marrons, seuls sa grand-mère avait les yeux d'un marron plus clair. Son visage étaient toujours marqués par les rondeurs de son enfance, bien qu'il eût perdu beaucoup de poids récemment. Il ne faisait pas du tout attention à lui et était le genre de personne qui s'était rapidement retrouvé coincé dans la routine. Trop rapidement, peut-être. Un automate, un androïde, un robot, ce que vous voulez. Le jeune homme n'avait que vingt-et-un ans mais sa vie lui laissait à penser qu'il en avait quarante-cinq.

Jungkook n'en était pas content, de sa vie. Il voulait juste partir vivre des aventures. Vivre comme il l'entendait. Mais rendre ses parents fiers de lui en accomplissant de grandes et lourdes études le poussait à continuer. Se lever, université, rentrer, dormir. Sa vie se résumait à cette routine depuis la fin de son lycée. Il avait entrepris des études de médecine alors que son seul souhait depuis sa jeunesse était de se lancer dans une carrière de danseur professionnel. Il n'avait pas le courage d'entreprendre son rêve et il préférait se mettre des œillères et se dire que finalement, ce n'était pas si terrible que ça. Ses parents n'y pouvaient rien, ils avaient peur pour leur enfant. La Société était comme ça. Réussit ta vie et tais-toi. Même au prix d'un rêve de toute une vie. Le pire, enfin pour lui, c'est que malgré tout, il réussissait. C'est vrai, il aurait pu rater sa première année puis peut être que ses parents l'auraient laissé faire autre chose, mais non, il avait fallu qu'il réussisse. Alors on en était toujours au même point, il travaillait pour continuer de réussir. Il avait l'intention de devenir pédiatre s'il y arrivait.

Ce matin-là, après son passage dans la salle de bain et le petit déjeuner sauté, Jungkook s'est sentit étrange, comme si sa vie allait changer. Il n'arrivait pas à savoir s'il pouvait considérer ce pressentiment comme quelque chose de mauvais ou pas. Cela ne l'empêcha de prendre le même bus, pour rejoindre les mêmes personnes qui allaient dans la même université pour apprendre la même chose. Il ne prenait même plus le temps de regarder le monde autour de lui, il n'avait d'ailleurs jamais vraiment regardé autour de lui. Il pensait connaître la ville par cœur. Connaitre était un bien grand mot. Ses pieds le portaient vers sa destination alors que ses yeux étaient rivés sur le sol. Il ne se rendait même plus compte que la seule chose qu'il regardait pendant son trajet était le sol de cette ville si familière et si étrangère à la fois.