Chroniques de la guerre entre le renard et le Bois d'or

II partie I

  Ochüno regarda la silhouette filiforme de Yalène s'éloigner de lui et s'engouffrait dans l'obscurité.

- Père, l'interpella Ochüno Ier, pensez-vous que l'on peut lui faire confiance ?

Le roi le plus grand et le plus robuste de sa génération, laissa son fils sans réponse et se contenta de dire:

- Repartons !

Les soldats s'empressèrent alors de le suivre tout en l'encerclant afin de le protéger. Ochüno continua sa route vers le bout de ce tunnel terreux sans qu'aucun doute ni aucune inquiétude ne vienne troubler son cœur. Il était persuadé que « Tout se passerait comme prévu. »

Tout en se déplaçant derrière le prince, Var et Nüt les fils du Cèdre d'or échangèrent un regard sérieux et inquiet. Ils étaient soucieux de comprendre pourquoi le roi avait préféré déserter le palais royal. Var l'ainé d'un tempérament aussi angoissé que celui de sa mère, espérait que celle-ci ainsi que sa jeune sœur et sa grand-mère étaient saines et sauves.  Il avait conscience que le plus grand accomplissement de leur famille à savoir, le mariage de Varinöe avec l'héritier du roi, était sur point de prendre forme.

« Pourquoi faut-il que ce malheur arrive maintenant !? »

Le roi partageait aussi en quelque sorte les inquiétudes de Var. Car lui aussi pensait à sa future belle-fille âgée de 16 fleurs, avec qui il partageait depuis des mois dans le secret, une relation platonique mais passionnée.

   La jeune vieille remonta sans peine à la surface. Dès l'instant où sa tête se retrouva hors du tunnel, les bruits stridents du champ de bataille lui redonnèrent une forte migraine.

« Ne connaître qu'une seule partie du futur ; Quelle poisse ! » Pensa-t-elle agacée par la situation. Alors qu'elle frappait nerveusement un caillou avec l'un de ses pieds palmés, un étalon attira son attention. Un grand cheval au pelage marron galopait à sa rencontre dirigé par le Béni des Séquoias. Arrivé à son niveau il descendit de sa monture et tout en tentant de reprendre son souffle, il lui dit :

- C'était...C'était donc vous dans le ciel.

Yalène le dévisagea avec amertume, elle n'avait jamais apprécié cet illustre elfe, qui, à son avis n'était qu'un simple fanfaron.

- C'était bien moi.

- Je...Je

Yaléne croisa ses bras de plus en plus impatiente et irritée par la présence du sage royal. Voyant qu'il n'arrivait pas à parler clairement, elle créa une petite bulle d'eau et d'air qu'elle lança adroitement dans la bouche du Séquoia. Estomaqué par cet acte, qui lui sembla être un empoisonnement, le vieil elfe tenta en vain de la recracher.

Yaléne soupira :

« Quel idiot ! »

Le Béni des Séquoia reprit brusquement une posture digne, lorsqu'il comprit que cette boule d'eau lui avait redonné une bouffée d'oxygène.

Il s'exclama :

- C'est un acte vil digne d'une condamnée ! J'en parlerai au roi quand je le retrouverai !

- Votre souverain n'a pas besoin de vous à ses côtés ! Il a besoin de vos compétences pour secourir son second fils toujours présent dans la basilique royale, lui répondit-elle sèchement.

- Vous l'avez vu !?

Tout en ricanant, elle ironisa :

- Je l'ai retrouvé ! Quoi cela vous étonne ? Il suffit de maîtriser ses capacités pas de jouer avec !

Furax, il transforma ses ongles en branches d'arbres tranchantes tandis que Yaléne tel un mauvais garnement, mimait son attitude.

Le cheval finit par mettre fin à cette incartade en leur disant :

- Allez-vous seulement vous concentrer sur ce qui se passe !

Ils se figèrent embarrassés d'avoir oublié que l'étalon les observait.

- Que faut-il que je fasse ? Questionna l'elfe mâle en tournant son regard vers la jeune vieille.

- Vous devez vous rendre à la basilique royale avec moi.

- Eh bien, si c'est la volonté de mon maître, allons-y.

Ochüno n'avait jamais ordonné à Yalène de prendre le Séquoia avec elle, il aurait au contraire, aimé avoir à ses côtés l'un des cerveaux de sa politique. Mais depuis sa phrase énigmatique, Yalène redoutait d'être prise au dépourvu par le roi et préférait garder ses sbires à l'œil.

« Il pourrait m'être utile après tout »

Le Béni des séquoias dirigea alors son destrier vers l'ouest puis galopa vers la basilique. Yalène  le suivait de près en volant au-dessus de lui.

L'esprit du sage était fortement agité par tous ce qu'il avait observé et entendu depuis le début de l'invasion. Perché au-dessus de la place royale pendant de nombreuses heures, il avait bien ressenti l'aura royale d'un elfe près de lui, mais celui-ci était très faible. Le prince était-il mourant ? Dans tous les cas son attention s'était beaucoup plus porté sur le Cèdre d'or et la guerrière aux cheveux blancs qui l'affrontait, que sur son prince et il en avait honte. Leur combat était digne des plus grands arbres d'or de son roi. La jeune elfe réussissait à rester debout face au colossal Varinüt et cela l'avait grandement impressionné mais aussi terrifié. Car quelque chose de difficile à observer même avec un œil spirituel se mouvait constamment autour d'elle .Qu'est-ce que c'était ? Il l'ignorait car cette ombre ne semblait pas être le simple résultat d'un sort maléfique mais bien :

« Un être !? C'est impossible ! »